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Lifestyle - Musique

La « viola organista » de Léonard de Vinci, ou le son du génie

L’étrange instrument, aux allures de piano à queue, marie le clavier et l’archet.

Plus de cinq cents ans après sa création par Léonard de Vinci, le pianiste Slawomir Zubrzycki a tiré de l’oubli la « viola organista ».Photos Tomasz WIiech/AFP

Ses touches bicolores ont tout du piano, mais au toucher du pianiste, elles font entendre le son des cordes frottées d’un violoncelle. À la fin du XVe siècle, l’auteur de la célèbre Joconde, Léonard de Vinci, le grand peintre de la Renaissance et génie aux talents multiples, avait inventé une « viola organista », un étrange instrument aux allures de piano à queue, mariant le clavier et l’archet. Mais il ne l’a jamais fabriquée.


Plus de cinq cents ans plus tard, Slawomir Zubrzycki, un pianiste polonais, facteur d’instruments de musique et passionné de musique ancienne, l’a tirée de l’oubli. « Léonard de Vinci a inventé son instrument entre 1470-1480 », a expliqué ce quinquagénaire affable à l’occasion d’un premier concert donné récemment à l’Académie de musique de Cracovie.

 

Pour le fabriquer, Zubrzycki s’est basé sur des dessins de l’instrument laissé par le génie et rassemblés dans le Codice Atlantico. Ce recueil de 12 volumes qui comporte des inventions techniques et scientifiques est préservé aujourd’hui à la Bibliothèque ambrosienne de Milan, en Italie. « La viola organista a les caractéristiques de trois instruments : le clavecin, l’orgue et la viole de gambe », explique-t-il.


Sous le couvercle ouvert à 45 degrés, on découvre au fond du coffrage une rangée de 61 cordes en métal et tout un système de roues et rouages, un vrai chef-d’œuvre de technique. Chacune des cordes est reliée à autant de touches du clavier, noires et couleur de bois clair. Toutefois, à la différence du piano, l’instrument n’a pas de marteaux, mais quatre roues qui agissent comme des archets sur les cordes. Elles sont enroulées de crin de cheval, matériau traditionnel utilisé pour fabriquer les archets des instruments à cordes. À l’aide d’une pédale, le musicien les fait tourner via une manivelle.
Quand le musicien frappe une touche, elle presse l’une des cordes contre l’une des roues en la frottant. L’archet, au contact du métal, émet des sons très variés, des vibrations qui rappellent le son d’un violoncelle, d’un orgue ou d’un accordéon.

 

L'instrument, aux flancs bleu roi ornés d'or, ressemble à un piano à queue. AFP PHOTO/TOMASZ WIECH

 


De Vinci n’a pu que rêver d’entendre ce son, car pour des raisons inconnues, il n’a jamais fait construire son instrument, souligne Zubrzycki. « Difficile d’imaginer ce qu’il en aurait pensé, mais j’espère qu’il aurait aimé ce que j’ai fait », dit-il. Pour le réaliser, il a dédié trois ans de sa vie, soit au moins 5 000 heures de travail et un budget de 30 000 zlotys (7 174 euros).


Le Musée des instruments de musique de Bruxelles (MIM) conserve un instrument de ce type réalisé vers 1625 en Espagne par Truchado Raymundo, qui, selon Pascalle Vandervellen, une spécialiste de ce musée, est « le seul instrument préservé en entier ».
Il est postérieur au « Geigenwerk », construit en 1575 par l’organiste allemand Hans Hayden de Nurember. Il y a une dizaine d’années, le Japonais Aiko Obuchi a réalisé un instrument similaire, mais il est bien plus petit.

Chair de poule
Pour son premier concert, dans la prestigieuse Académie de musique de Cracovie, la viola organista a fait salle comble, avec un public de musiciens, musicologues, étudiants et mélomanes avertis.
Gabor Farkas, un pianiste hongrois renommé et professeur de piano à l’Académie de musique de Budapest, en est sorti émerveillé. « C’est un instrument à clavier, mais on a l’impression que quelqu’un y joue avec un archet comme sur un violon ou un violoncelle. L’instrument donne un son très doux, chaleureux, un son de velours, très beau », a-t-il souligné. « Quand on frappe une touche au piano, la note disparaît aussitôt. Sur cet instrument, on peut faire un crescendo sur la même note. C’est ce dont rêvent tous les pianistes », explique-t-il.
Marian Sobula, pianiste renommé et directeur d’un festival de musique à Cracovie, est lui aussi émerveillé par les capacités de l’instrument. « J’en suis devenu amoureux. C’est une chose dont rêvent tous les pianistes. On peut prolonger le son presque sans fin. On a la possibilité du vibrato, ce qu’on ne peut pas obtenir sur un piano contemporain. Beaucoup disent que cet instrument donne la chair de poule », a-t-il déclaré.

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