Hier matin, la présidente du FN qui, comme son père, n’a jamais craint de dénoncer ce qu’elle considère comme un « système » politico-médiatique, a cassé le consensus autour de la libération des quatre hommes, retenus au Sahel dans des conditions extrêmes. Au micro d’Europe 1, elle a assuré que la séquence du retour retransmise en direct, mercredi à la télévision, l’a laissée « dubitative. J’ai trouvé ces images étonnantes, cette extrême réserve étonnante, leur habillement étonnant. J’ai ressenti un malaise et je pense que je n’ai pas été la seule », a poursuivi Mme Le Pen, ajoutant : « C’est ce qu’ont ressenti beaucoup de Français. » Pressée de s’expliquer, l’eurodéputée a développé : « On avait l’impression d’avoir des images d’hommes qui étaient très réservés, c’est le moins qu’on puisse dire, les deux qui portaient la barbe taillée d’une manière assez étonnante, l’habillement était étrange. » « Cet otage avec le chèche sur le visage... Tout ça mérite peut-être quelques explications de leur part », a-t-elle risqué. Pense-t-elle qu’ils ont été islamisés pendant leur détention par des ravisseurs extrémistes ? « Je n’irai pas jusqu’à faire des théories, je ne serais pas dans mon rôle », a-t-elle répondu.
Interrogée sur le versement d’une rançon, démenti par les autorités françaises, Mme Le Pen a déclaré qu’il est « problématique de payer une rançon, d’autres pays ont fait le choix inverse, de ne pas payer ». Le fait de ne pas payer « ne veut pas obligatoirement dire que les otages vont mourir », a-t-elle poursuivi.
Les propos de Mme Le Pen ont rapidement suscité la colère sur les réseaux sociaux. « À venir dans le programme du #FN, une police de la pilosité politique ? » s’interroge un twitteur. « Le père Noël fera-t-il les frais de la suspicion antibarbe ? » ironise un autre. Au niveau des médias, le quotidien Le Monde, daté d’aujourd’hui, clame en une « Le dérapage de Marine Le Pen ». Les politiques ne sont pas en reste, surtout à gauche. Najat Vallaud-Belkacem, porte-parole du gouvernement, dénonce dans un tweet une « invraisemblable indécence ».
Solidaires
Dans l’après-midi, Marine Le Pen s’est efforcée de revenir sur ses propos.
« Manifestement, je me suis exprimée de manière maladroite puisqu’il ne s’agissait en aucun cas, dans mon esprit, d’émettre la moindre critique à l’égard des otages dont, tout à fait évidemment, je me réjouis de la libération », a-t-elle assuré sur la radio RTL. Elle a ensuite expliqué dans un communiqué qu’elle avait dans son viseur non pas les otages, mais leur « instrumentalisation politique » par les gouvernements.
Réagissant de son côté aux propos de Mme Le Pen, Pascale Robert, la mère de Pierre Legrand (le plus jeune des ex-otages), a déclaré sur i-Télé : « Ils nous ont dit clairement que garder barbe et chèche, c’était en solidarité avec les autres otages restés là-bas. Ça leur appartient, on a trouvé ça très touchant qu’ils se sentent solidaires des autres. » Les quatre hommes « ne sont pas des personnalités
médiatiques. Être projetés comme ça devant les médias, ce n’est pas évident, ils ont besoin de se protéger », a-t-elle insisté, soulignant que les ex-otages « sont complètement perdus ». « Ils doivent reprendre des repères, mais ils ont plus envie de se cacher que de s’exprimer », a-t-elle encore dit, répétant qu’ils avaient « été réellement en danger » au moment de l’opération française Serval au Mali.
(Sources : OLJ/AFP)