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Moyen Orient et Monde - Analyse

En Afghanistan, l’Inde et le Pakistan se font la guerre par procuration

Les éternels rivaux d'Asie du Sud sont engagés dans une lutte d'influence pour protéger leurs intérêts stratégiques et politiques.
L'Inde et le Pakistan, éternels rivaux d'Asie du Sud, sont aujourd'hui engagés dans une lutte d'influence en Afghanistan, un nouveau bras de fer qui alimente des attentats visant des intérêts indiens dans ce pays secoué par une insurrection des talibans, selon les analystes. La semaine dernière, sept Indiens, dont des fonctionnaires du gouvernement, ont été tués dans une attaque de talibans à Kaboul. Deux attentats avaient en outre visé l'ambassade indienne à Kaboul en juillet 2008 et octobre 2009. Le groupe islamiste pakistanais Lashkar-e-Taïba (LeT), accusé par l'Inde d'avoir organisé les attentats de Bombay en novembre 2008, a affirmé hier ne pas être impliqué dans l'attentat de vendredi dernier à Kaboul.
« Les attentats ont pour objectif de forcer l'Inde à se retirer d'Afghanistan », affirme Rahul Roy-Chaudhury, un expert sur l'Asie du Sud à l'Institut d'études stratégiques basé à Londres. « L'Inde et le Pakistan essaient chacun de limiter l'influence de l'autre car ils ont des intérêts rivaux » dans ce pays, estime-t-il.
Après plus de deux décennies sans influence en Afghanistan, l'Inde a promptement établi des liens diplomatiques avec le nouveau gouvernement après la chute du régime taliban en 2001. Depuis, New Delhi a engagé 1,3 milliard de dollars dans divers programmes d'aide et de reconstruction, devenant le premier pays donateur dans la région. Environ 4 000 Indiens sont employés en Afghanistan dans la construction d'infrastructures. Même le nouveau Parlement afghan a été construit par l'Inde.
Selon les analystes, c'est ce « pouvoir en douceur », installé au fil du temps dans un pays que le Pakistan considère comme son arrière-cour, qui a attisé les inquiétudes à Islamabad. Pour J. Alexander Thier, un expert de l'Institut américain de la paix (USIP) basé à Washington, le Pakistan voit dans l'implication de l'Inde en Afghanistan « une sorte d'encerclement ». « Le Pakistan compte sur l'Afghanistan en termes de profondeur stratégique : en cas de nouvelle guerre contre l'Inde, Kaboul soutiendra le Pakistan », ajoute cet expert des relations ente les deux pays dotés de la puissance nucléaire. De son côté, New Delhi veut s'assurer que l'extrémisme ne se renforce pas à Kaboul, de crainte qu'il entraîne une radicalisation d'Indiens musulmans et de nouvelles attaques dirigées contre l'Inde, ajoute-t-il.
À Islamabad, le gouvernement considère clairement que l'engagement de l'Inde en Afghanistan est une menace et « une complication inutile ». « Nous avons de sérieuses preuves (que l'Inde) utilise l'Afghanistan pour déstabiliser le Pakistan », a affirmé récemment le porte-parole du ministère pakistanais des Affaires étrangères, Abdul Basit, sans donner plus de détails.
Depuis leur indépendance concomitante en 1947, les deux pays rivaux se sont mené trois guerres, dont deux portant sur la région disputée du Cachemire. New Delhi et Islamabad avaient lancé en 2004 un processus de paix qui avait permis d'atténuer les tensions, mais les attentats de Bombay en novembre 2008, attribués par l'Inde à un groupe islamiste pakistanais, ont interrompu le dialogue pendant plus d'un an. New Delhi accuse son voisin de soutenir des groupes islamistes ciblant l'Inde et il a aussi vu l'ombre des services de renseignements pakistanais dans les attentats contre son ambassade à Kaboul.
C.U. Bashkar, qui dirige la Fondation nationale maritime, un centre de réflexion basé à New Delhi, partage cette opinion. « Tous ces attentats ont des liens avec le Pakistan, soit par le biais d'un soutien matériel, soit parce que c'est un sanctuaire (pour les auteurs) », détaille-t-il. « Le Pakistan et l'Inde sont engagés de plus en plus dans une sorte de guerre par procuration en Afghanistan », considère un analyste pakistanais, Rahimullah Yusufzai.

Elizabeth Roche (AFP)
L'Inde et le Pakistan, éternels rivaux d'Asie du Sud, sont aujourd'hui engagés dans une lutte d'influence en Afghanistan, un nouveau bras de fer qui alimente des attentats visant des intérêts indiens dans ce pays secoué par une insurrection des talibans, selon les analystes. La semaine dernière, sept Indiens, dont des fonctionnaires du gouvernement, ont...

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