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À La Une - Turquie

Öçalan : « Une nouvelle ère se lève où la politique doit prévaloir, pas les armes »

Le chef rebelle appelle les Kurdes à déposer les armes, laissant entrevoir l’espoir d’une paix prochaine entre le PKK et Ankara.

À Diyarbakir, dans le sud de la Turquie, les politiciens prokurdes Sirri Sureyya Onder, à gauche, et Pelvin Buldan, à droite, ont lu hier la déclaration du chef rebelle emprisonné. STR/AFP

Le chef rebelle emprisonné Abdullah Öçalan a ravivé hier l’espoir d’une issue au conflit kurde, qui déchire la Turquie depuis vingt-neuf ans, en demandant aux combattants du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) de déposer les armes et de se retirer du pays, un geste prudemment salué par Ankara. « Nous sommes arrivés à une phase dans laquelle les armes doivent se taire (...) les éléments armés doivent se retirer en dehors des frontières de la Turquie », a lancé M. Öçalan dans un message lu à Diyarbakir, dans le Sud-Est, par un élu kurde devant une foule de plusieurs centaines de milliers de personnes. « Je le dis devant les millions de personnes qui écoutent mon appel, une nouvelle ère se lève où la politique doit prévaloir, pas les armes », a-t-il ajouté à l’occasion des célébrations du Nouvel An kurde (Newroz).


Très attendu, son appel au cessez-le-feu a été accueilli favorablement par le gouvernement turc comme un geste « positif ». Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a ajouté que « s’il n’y a plus d’actions armées (du PKK), nos troupes n’entreprendront plus d’opérations militaires », espérant que le cessez-le-feu « aura un effet le plus vite possible ». Interrogé depuis son quartier général du nord de l’Irak, le commandant militaire du PKK Murat Karayilan a promis que son mouvement respecterait l’appel de son fondateur. « Tout le monde doit savoir que le PKK est aussi bien prêt à la paix qu’à la guerre », a-t-il assuré.

 

Dans son message, M. Öçalan n’a pas précisé de calendrier pour le retrait de ses combattants, dont le nombre est estimé à 5 000. De son côté, la diplomatie américaine a bien accueilli cet appel, saluant « l’annonce par le PKK d’une cessation de la violence, considérée comme une étape positive vers la fin de plus de trois décennies de conflit tragique », a écrit la porte-parole du département d’État.

 

(Pour mémoire : Le PKK dément son retrait prochain de Turquie)

« Début d’un nouveau combat »
À quatre reprises déjà depuis le début de sa rébellion en 1984, Abdullah Öçalan a proclamé des cessez-le-feu unilatéraux. Aucun n’a jusque-là débouché sur une solution à ce conflit qui a fait plus de 45 000 morts. Dans son message, M. Öçalan, âgé de 63 ans, a justifié sa conversion à la paix en expliquant que « la période de la résistance armée a ouvert une porte à un processus de politique démocratique. Les sacrifices n’ont pas été faits en vain », a-t-il assuré, « ce n’est pas la fin du combat, c’est le début d’un nouveau combat ». Sa déclaration a été acclamée par la foule rassemblée depuis des heures pour l’écouter sur une immense esplanade de Diyarbakir. Les 12 à 15 millions de Kurdes du pays considèrent cette métropole du sud-est de la Turquie comme leur capitale.


Cet appel lancé par le chef rebelle concrétise plusieurs mois d’intenses discussions entamées fin 2012, au terme d’une année de combats particulièrement meurtriers et d’une grève de la faim de détenus kurdes. Les gestes de bonne volonté des deux parties se sont enchaînés depuis. Le Premier ministre Erdogan, qui s’est dit prêt à « avaler du poison » pour faire la paix, a fait lever les mesures d’isolement frappant Öçalan, qui purge depuis 1999 une peine de réclusion à perpétuité. Son gouvernement a aussi déposé au Parlement un « paquet » législatif pour permettre la libération de centaines de Kurdes incarcérés pour leurs liens avec le PKK. En retour, le mouvement rebelle a libéré la semaine dernière huit prisonniers turcs détenus en Irak depuis deux ans.

« Un tueur d’enfants »
Cependant, les obstacles sur le chemin de la paix restent nombreux, à commencer par le sort réservé à Öçalan. Ankara a écarté toute idée d’amnistie générale mais les Kurdes insistent pour sa remise en liberté ou, à défaut, son assignation à résidence. En outre, une majorité de Turcs répugne à toute négociation directe avec le chef kurde, souvent considéré comme un « terroriste » ou un « tueur d’enfants ». La déclaration du chef rebelle a suscité la colère des députés du parti ultranationaliste MHP, qui ont étalé dans l’hémicycle des photos de militaires tombés lors des combats avec les rebelles kurdes. De plus, l’opposition soupçonne M. Erdogan de vouloir accorder de nouveaux droits aux Kurdes en échange du soutien de leurs députés à une réécriture de la Constitution pour renforcer les pouvoirs du président. Car contraint de quitter son poste en 2015, Erdogan souhaite briguer la magistrature suprême en 2014.
Enfin, des affrontements ont opposé hier matin des jeunes manifestants kurdes aux forces de l’ordre à Sirnak, près de la frontière irakienne, signe que l’appel du chef du PKK ne fait pas l’unanimité dans ses propres rangs.

 

Pour mémoire
Vague d’attentats à la veille d’un appel au cessez-le-feu du PKK

Le chef rebelle emprisonné Abdullah Öçalan a ravivé hier l’espoir d’une issue au conflit kurde, qui déchire la Turquie depuis vingt-neuf ans, en demandant aux combattants du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) de déposer les armes et de se retirer du pays, un geste prudemment salué par Ankara. « Nous sommes arrivés à une phase dans laquelle les armes doivent se taire (...)...

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