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Liban - Artisans de la paix de demain

Au commencement est l’éducation

L’histoire de l’humanité est jalonnée d’essais et d’échecs en termes de rétablissement de la paix. Les conflits et la paix se côtoient, mais cette dernière s’est toujours inscrite dans un certain dépassement de soi.

Une école qui se veut démocratique devrait avoir une longueur d’avance sur la société et implémenter les balises de la démocratie pluraliste, de la liberté, de la justice et du respect mutuel.  Photo Sami Ayad

La paix tend continuellement à se construire de façon lente et discrète par des gens de bonne volonté qui y croient et qui arrivent à tisser patiemment un canevas de solidarité humaine dans une chaîne d’harmonie entre les personnes, entre les quartiers, entre les peuples. Dégager quelques pistes de réflexion et d’action pour son éventuelle éclosion permettrait, peut-être, de passer d’une position de spectateur passif à une position d’acteur responsable, afin de penser et de créer ensemble des initiatives propices à la paix, émergeant d’un choix, d’une décision, d’une volonté de changement.
La paix peut être extérieure ou intérieure, sociale ou politique, sociologique ou d’ordre psychologique... Toujours est-il qu’elle incarne en même temps un état d’esprit intérieur résultant d’une harmonie personnelle, un état d’entente et d’harmonie sociale résultant d’une aptitude à la solution pacifique et constructive des conflits, une harmonie avec soi et la nature. Ce n’est pas un absolu statique, mais une recherche permanente, une quête. Elle ne se trouve pas uniquement dans l’absence de conflits – ce qui est utopique car on ne peut les supprimer –, mais elle est basée sur la transformation positive de ces conflits dans le respect des droits de l’homme, de la justice, de la dignité ainsi que sur la résolution (et la prévention) des conflits par le dialogue permanent, d’abord avec soi-même et ensuite avec autrui, dans la découverte de « l’autre côté de son visage ». Malheureusement, aujourd’hui, la paix est gravement menacée, d’où la nécessité de la recherche de ses promesses au sein de l’éducation.

Rôle de l’école
« L’éducation est la clé de demain, le secret de tout développement, le meilleur investissement qu’une nation puisse faire pour construire son avenir. » Henri Boulad s.j.
Tensions sociales et politiques, injustices, pauvreté, prolifération des armes, avidité, discrimination, rupture de l’équilibre entre l’homme et la nature... toutes ces formes de violence augmentent en cette période de crise mondiale où l’individualisme bat son plein. Les milieux scolaires ne sont pas en reste. Faisant partie de la société, ils en épousent les contours et reproduisent souvent ses formes de conflits, surtout dans les systèmes qui mettent l’accent sur la compétition et l’élitisme, glorifiant l’individualisme plutôt que la coopération et la solidarité. L’union cède alors la place à la division. Or l’école qui se veut démocratique devrait avoir une longueur d’avance sur la société et implémenter les balises de la démocratie pluraliste, de la liberté, de la justice et du respect mutuel, afin de jouer son rôle primordial dans l’éducation « pour » et « à » la paix.
Éduquer, c’est d’abord avoir une vision de l’homme. Si la paix est dans cette vision, l’école est donc un instrument de paix fondamental. Idéalement, l’éducation facilite l’accès au savoir et œuvre à promouvoir le respect de la vie et des êtres. Elle développe l’acceptation de l’autre, le sens des responsabilités, le dépassement de l’égoïsme. L’éducation à la paix a pour but ultime de permettre aux personnes de vivre en harmonie avec elles-mêmes, avec la société et avec la nature dans une perspective de développement durable. Nécessairement, cette éducation passera par le sens des valeurs universelles et l’apprentissage des types de comportements qui favorisent la paix dans la vie en commun, en amenant les enfants à se connaître d’abord et à apprécier les notions de droits de l’homme, de justice, de liberté, de partage, de dialogue et à vouloir travailler pour un monde plus humain. D’où la nécessité de développer les capacités de travailler en groupe, les capacités de mettre en œuvre son esprit critique, de s’ouvrir au changement, de modifier son jugement, de participer à l’élaboration des règles de vie en les respectant à l’école, de comprendre la nature des conflits, puis de les résoudre de façon constructive.
L’éducation à la paix doit être globale en abordant l’élève dans tous les aspects de son être. Mais c’est la façon d’enseigner qui prime car elle est porteuse d’habiletés sociales concrètes qui passeront par une relation d’apprentissage valorisante. Tout commence par ce regard créateur et confiant de l’éducateur, qui pousse à aller plus loin et plus haut. La paix se chercherait par là, par le regard, par l’exemple.

Quelques pistes d’action
Certains cours transversaux peuvent être mis en place afin de développer la culture de la paix par l’apprentissage d’attitudes et de comportements individuels et collectifs inspirant et fondant cette culture. Ajouté à cela, l’établissement de liens interculturels est une dimension importante pour développer la tolérance active entre les cultures et les religions, en les situant dans un ensemble global qui les transcende. De même, la mise en valeur d’histoires et d’hommes de paix qui dépasseraient les histoires de guerre et de pouvoir – qui sillonnent l’histoire humaine – peut enrichir l’imaginaire de l’élève. De plus, le développement d’un civisme global serait une base qui consisterait à construire l’avenir sur des bases de droits, de respect de l’environnement et des personnes. Tout cela exige assurément que l’on forme chez le jeune la volonté et la méthode qui lui permettront de pouvoir se développer et changer certaines données. Enfin, l’éducation à la démocratie et à la citoyenneté serait une nécessité qui viserait l’acquisition de compétences pour le dialogue, la négociation et la résolution non violente de conflits. Les droits de l’homme doivent se vivre en classe et dans les autres structures de l’école comme les associations, les clubs. L’organisation scolaire doit permettre de vivre les valeurs apprises, donc de lier la pratique à la théorie. Pour clôturer, il est important d’introduire chez l’enfant la dimension d’intériorité et de réflexion qui va au fond des choses et des êtres pour les comprendre, les accepter et faire évoluer les relations.
En définitive, le niveau du savoir ne suffit plus pour la formation des hommes et des femmes de demain mais, dans ce cadre, certains nouveaux apports sont à introduire comme dans cette école qui a introduit des cours relatifs aux concepts de violence et de non-violence, de droits humains, de démocratie et de développement durable, en les animant par des échanges et des discussions vivantes. Au-delà du savoir, c’est surtout le savoir-être qu’il faudrait travailler pour promouvoir la paix en lui donnant son sens large, par un accompagnement centré sur la personne profonde, non seulement sur le rendement scolaire basé sur la réussite ou l’échec qui ne sont pas des buts mais des moyens, tremplins de développement personnel. Le savoir-faire est aussi à favoriser par les techniques de gestion de conflits et de médiation, par les compétences de réflexion critique et d’échanges, à travers des pratiques participatives de ces savoirs, valeurs, comportements et compétences.
Certaines écoles au Liban réalisent l’importance de cette éducation centrée sur l’être pour la construction d’un corps social cohérent et viable à long terme. Ces établissements scolaires introduisent par des initiatives plus ou moins timides certaines actions de dialogue social et d’apprentissage de la citoyenneté à travers des projets ponctuels, des procédures ou des activités parascolaires. Vu le vaste champ de travail en attente, une vision de cette éducation à la paix plus globale serait à envisager, mettant l’accent sur la formation des « êtres » dans leur globalité, non des espèces de réservoirs de connaissances formatés pour la productivité économique. Le vrai développement sera toujours celui de l’être, au-delà des acquis d’excellence compartimentés et insuffisants pour la formation de « la » personne humaine qui ne trouvera sa tranquillité, sa vraie paix que par son être profond qui aspire à l’amour. Y aurait-il donc une éducation à l’amour ?
Cet amour qui, selon Jean Lacroix, « a le rôle de prendre chaque homme pour ce qu’il est authentiquement, même s’il ne s’est pas encore réalisé car on n’aime jamais un être fini qu’au-delà de lui-même... qu’au-delà de ce qu’il a réalisé dans sa vocation... L’amour qui est un appel à être et à se réaliser... ».
À cette seule condition, les éducateurs deviendraient de vrais acteurs de paix, créateurs de meilleurs lendemains.
La paix tend continuellement à se construire de façon lente et discrète par des gens de bonne volonté qui y croient et qui arrivent à tisser patiemment un canevas de solidarité humaine dans une chaîne d’harmonie entre les personnes, entre les quartiers, entre les peuples. Dégager quelques pistes de réflexion et d’action pour son éventuelle éclosion permettrait,...

commentaires (2)

IL Y A DEUX SORTES D'ÉDUCATION : ÉDUQUER... ET... DRESSER... AU MOYEN ORIENT PRÉVAUT LA SECONDE !

SAKR LOUBNAN

14 h 24, le 18 octobre 2013

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Commentaires (2)

  • IL Y A DEUX SORTES D'ÉDUCATION : ÉDUQUER... ET... DRESSER... AU MOYEN ORIENT PRÉVAUT LA SECONDE !

    SAKR LOUBNAN

    14 h 24, le 18 octobre 2013

  • Au commencement c'est l'éducation ...soit.... à l'arrivée la c'est sous-culture ...qu'est ce ... qui c'est passé entre temps....?

    M.V.

    13 h 21, le 18 octobre 2013

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