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Moyen Orient et Monde

Sous les pavés... à Istanbul

Des jeunes bien équipés : masques, imperméables et... sandwiches.

Une foule immense occupe toujours la place Taksim et ses abords. Une foule hétéroclite composée majoritairement de jeunes de tous bords.
On y trouve des militants de gauche, communistes en tête, des écologistes, des sympathisants des partis laïques, des anarchistes, des militants pour la cause homosexuelle, ainsi qu’une légion d’étudiants universitaires sans opinion politique affichée.
Tous continuent de scander le même slogan : « Erdogan Istifa ! Hükümet Istifa ! » : « Erdogan démissionne ! Gouvernement démissionne ! »
Parallèlement, sur les murs, la guerre des graffitis fait rage, avec des slogans dignes de mai 68 : insultes contre la police, connue sous le sobriquet « ACAB » (« All Cops Are Bastards » – « Tous les flics sont des salauds »), pris aux mineurs britanniques dont les grèves ont tant défié le thatchérisme ; contre le gouvernement en général, mais surtout contre le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan : « Fils de ... », « dictateur », « démissionne », etc. Parmi tous ces noms d’oiseaux, un graffiti attire l’attention : « Erdogan ! On foutra un minaret dans ton c... » !!!
D’autres slogans montrent l’esprit de solidarité qui règne parmi ces jeunes : « Nous n’appartenons à aucun parti, nous représentons le peuple ! » Un autre graffiti affirme : « Nitimur in vetitum, semper cupimusque negata » un vers d’Ovide ! En plein Istanbul ! Sans doute tracé par un étudiant rebelle ou un intellectuel. « Nous nous efforçons vers l’interdit et nous désirons toujours ce que l’on nous refuse... »
Sur la vitrine d’un restaurant on a gribouillé : « Au menu : gaz au poivre, gaz orange... et plus de démocratie ! »
La porte principale du Centre culturel français n’échappe pas aux aérosols des manifestants : « La poésie est dans la rue », peut-on lire en français sur l’énorme porte en bois d’époque.
Ce jour-là, d’autres manifestants ont rejoint la foule de jeunes. Des artistes, des stars de la télé ou de la chanson, des intellectuels, écrivains, poètes, etc.
Les manifestants s’affairent à nettoyer la place dans un élan de solidarité civique. Tout près de la statue d’Atatürk, on collectionne les cartouches vides de gaz lacrymogènes. Les débris jonchent toujours le sol. Un amas de verre, de suie, de pavés, quelques bus transformés en barricades... On est vraiment loin de la charge brutale effectuée par la police au premier jour des événements, quand les argousins antiémeute ont investi le parc Gezi où des dizaines de jeunes avaient passé la nuit.
Mais la violence demeure, plus loin, en descendant vers le quartier de Besiktas. Les heurts entre la police et les manifestants étaient particulièrement violents. En effet, la foule tentait de s’approcher des bureaux du Premier ministre, sis tout près du flamboyant palais de Dolmabahçe, une des dernières demeures des sultans ottomans et principale attraction touristique de la ville aux mille mosquées.
Les bureaux d’Erdogan sont protégés par un énorme dispositif policier alors que la mosquée du palais a été improvisée lundi en hôpital de campagne où plusieurs blessés ont eu leurs premiers soins grâce au concours de quelques médecins bénévoles. D’ailleurs, l’occupation de la mosquée a attiré l’ire des conservateurs et des religieux qui dénonçaient le fait que les occupants n’avaient pas ôté leurs chaussures avant d’y pénétrer !
Des vagues de protestataires continuent d’affluer vers la place Taksim, située tout près sur la colline qui surplombe le Bosphore. Ils viennent surtout de la partie est de la ville, dans les dizaines de bateaux-bus qui font la navette entre les deux rives.
Aysegül, guide touristique, est arrivée avec son frère cadet et son cousin, bien équipés : imperméables, masques, etc. « Nous allons essayer de gagner la place à pied ! Nos amis nous attendent, nous avons apporté de la nourriture et des bouteilles de vinaigre, il paraît que c’est très efficace contre les brûlures des yeux par le gaz ! »
Burak, lui, a directement quitté son bureau pour se rendre sur la place : « C’est une manifestation historique ! Il faut faire pression sur le gouvernement, la Turquie doit rester laïque, les libertés ne doivent pas être bafouées de la sorte ! Il faut qu’Erdogan démissionne ! » dit-il sur un ton douteux...

 

R.B.

Une foule immense occupe toujours la place Taksim et ses abords. Une foule hétéroclite composée majoritairement de jeunes de tous bords.On y trouve des militants de gauche, communistes en tête, des écologistes, des sympathisants des partis laïques, des anarchistes, des militants pour la cause homosexuelle, ainsi qu’une légion d’étudiants universitaires sans opinion politique...

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