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À La Une - crise

Au chômage, "désespérée", une Espagnole met en vente ses organes

La vague d'expulsions de propriétaires endettés plonge l'Espagne dans un malaise social qui vire au drame.

Capture d'écran de l'interview diffusée dimanche sur le site Internet du quotidien El Mundo.

Une chômeuse espagnole, âgée de 44 ans, a annoncé dimanche proposer à la vente tous les organes qui ne seraient pas indispensables à sa survie pour se payer un logement pour elle et sa fille.


"J'ai d'abord mis en vente un rein, maintenant je propose aussi les cornées de mes yeux, un de mes poumons, un morceau de mon foie... Je vends n'importe quel organe de mon corps à qui peut le payer, et je fais cela parce que je suis tout simplement désespérée", a déclaré la quadragénaire dans une interview filmée et diffusée dimanche sur le site Internet du quotidien El Mundo.


"J'ai besoin d'un logement (...) pour y installer mon foyer, dans un endroit digne", a-t-elle déclaré en indiquant être sans travail et souffrir d'une incapacité à 66% à cause des mauvais traitements que lui a fait subir l'homme avec qui elle a vécu pendant 18 ans et qui veut maintenant la faire expulser de la maison où elle vit avec sa fille.
"J'ai reçu un préavis d'expulsion pour ma fille et moi. Nous n'avons pas de famille, nous ne savons pas où aller", a expliqué la quadragénaire.


Selon El Mundo, la femme a publié il y a deux semaines une annonce sur Internet pour proposer ses organes à la vente.
"Je n'ai pas d'autre moyen pour essayer de sauver ma vie et celle de ma fille. Si avec le temps qu'il me reste à vivre je peux ainsi donner à ma fille la force qui lui permette de sortir de cette situation, bien sûr, je vends mes organes", a déclaré la quadragénaire en indiquant ne pas avoir fixé de prix.


Selon El Mundo, la femme n'a pas reçu d'offre pour ses organes, mais a déjà pris contact avec un médecin à Melilla (enclave espagnole sur la côte marocaine) dans la perspective d'un éventuel prélèvement.
"En Espagne, il est pratiquement impossible de faire un prélèvement d'organe suivi d'une transplantation sans que les autorités compétentes ne soient au courant", assure le quotidien espagnol, qui précise que la quadragénaire encourrait dans ce cas une peine de 12 ans de prison pour trafic d'organes.

 

 

"Terrorisme immobilier, non!"

Dans une Espagne plongée dans une crise économique grave, les pages des journaux s'emplissent d'histoires de drames humains. En deux semaines, la vague de milliers d'expulsions de propriétaires endettés a ainsi entraîné deux suicides.

 

Lundi, aux cris de "Assassins", des dizaines de manifestants se sont rassemblés à Madrid sous les fenêtres du parti conservateur au pouvoir en Espagne, dénonçant ces expulsions. "Terrorisme immobilier, non!", "Stop aux expulsions", pouvait-on lire sur les pancartes brandies par les manifestants, pour beaucoup touchés directement, qui tapaient sur des casseroles.

 

Environ 350.000 propriétaires surendettés ont été expulsés depuis l'éclatement de la bulle immobilière en 2008, qui a précipité la crise en Espagne et fait bondir le taux de chômage à 25%.

 

"Nous sommes beaucoup de parents dans cette situation, dont les enfants souffrent psychologiquement", témoignait Victoria Rivera, 40 ans. C'est son fils de 16 ans qui a vu les policiers se déployer sous leurs fenêtres, lorsqu'ils sont venus le 10 septembre saisir l'appartement acheté à crédit en 2005, avec un prêt de 250.000 euros, en banlieue de Madrid.

A l'époque, Victoria et son compagnon avaient une petite entreprise. Ils ont remboursé pendant six ans jusqu'à ce que la crise frappe. Aujourd'hui au chômage, Victoria se bat seule pour ne pas se retrouver à la rue.

Grâce au soutien de militants anti-expulsions ce matin-là, elle a obtenu un répit. Un nouvel ordre d'expulsion a été fixé pour mai 2013.

 

 

La manifestation contre les expulsions, le 12 novembre à Madrid.

PIERRE-PHILIPPE MARCOU/AFP

 

 

Sous la pression sociale, accentuée par le suicide de deux personnes sur le point d'être expulsées, l'octroi de sursis pour les petits propriétaires risquant l'expulsion devrait se généraliser.

Lundi, l'association espagnole des banques (AEB) et celle des Caisses d'épargne (CECA) ont en effet annoncé le gel temporaire des saisies dans les cas les plus graves.

 

"J'espère que nous pourrons parler lundi de l'arrêt temporaire des expulsions qui touchent les familles les plus vulnérables", avait déclaré vendredi le chef du gouvernement, Mariano Rajoy.

 

Les militants de la plate-forme PAH, qui aide les personnes menacées d'expulsion et affirme avoir bloqué 463 saisies depuis 2009, veulent toutefois plus. Ils exigent notamment que toutes les expulsions de domiciles principaux soient paralysées, et que la saisie du logement suffise à solder la dette, contrairement à la législation espagnole en vigueur, amplement dénoncée.

 

Ces militants sont soutenus par un mouvement de protestation sociale croissant, alimenté par un fort sentiment de défiance envers les banques, dont certaines ont été sauvées par des fonds publics. Parmi elles, le géant Bankia, qui fait l'objet d'un sauvetage de près de 24 milliards d'euros.

 

"C'est injuste qu'il faille les aider alors qu'eux refusent de nous aider", dénonçait lundi Maria Vivar, retraitée élégante de 70 ans venue manifester car elle risque d'être expulsée pour s'être portée garante du prêt de son fils, aujourd'hui au chômage.

 

Le malaise s'est même étendu à la police et la justice. Le principal syndicat de policiers, le SUP, a annoncé dimanche qu'il soutiendrait les agents refusant de participer à des expulsions pour "problèmes de conscience".

Dans un rapport écrit en octobre, plusieurs magistrats espagnols ont également dénoncé "des procédures juridiques extrêmement agressives" tandis que des juges sont de plus en plus critiques dans les médias.

 

Saisi par un tribunal de Barcelone, l'avocat général de la Cour de Justice de l'Union européenne, Juliane Kokott, a émis un avis début novembre estimant que la loi régissant les expulsions en Espagne n'offrait pas de protection efficace aux particuliers contre de possibles "clauses abusives" des banques.

 

 

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