Le "Boucher de Kaboul" appelle à la paix en Afghanistan

Le seigneur de guerre afghan Gulbuddin Hekmatyar a appelé à la paix jeudi dans une apparition par vidéo à l'occasion de la ratification d'un accord entre le gouvernement afghan et ce chef insurgé surnommé le "Boucher de Kaboul".

Cet accord garantit l'immunité au dirigeant du mouvement armé Hezb-i-Islami, largement inactif dernièrement, et ouvre la voie à son possible retour en politique en dépit de son passé de criminel de guerre notoire.

"J'appelle tous les éléments anti-gouvernementaux à participer au dialogue inter-afghan avec le gouvernement afghan, et à continuer à poursuivre vos objectifs de façon pacifique", a déclaré M. Hekmatyar, qui vit caché depuis des années.

Le gouvernement en a profité pour renouveler son offre de négociations avec les talibans, au point mort alors que l'insurrection bat son plein à travers le pays. "C'est le moment pour les talibans de décider s'ils veulent continuer la guerre ou nous rejoindre pour la paix", a déclaré le président Ashraf Ghani après avoir ratifié le document.

L'accord avec Hekmatyar est contesté notamment en raison des bombardements aveugles qu'il a ordonnés sur Kaboul lorsqu'il était Premier ministre au début des années 1990, semant la mort et la destruction.
Mais pour des observateurs, sceller la paix avec le deuxième principal réseau insurgé du pays constitue une avancée pour le gouvernement soutenu par l'Occident, qui tente de négocier la paix avec les insurgés depuis quinze ans. C'est une victoire symbolique pour M. Ghani à quelques jours d'une conférence de donateurs sur l'Afghanistan à Bruxelles.

La sécurité avait été renforcée dans la capitale à l'occasion de cette cérémonie, qui s'est déroulée au palais présidentiel en présence du chef de l'exécutif Abdallah Abdallah, de l'ancien président Hamid Karzaï, et de représentants du Hezb-e-Islami, dont un fils d'Hekmatyar.
Ce dernier, qui a ratifié le texte par vidéo interposée, est considéré comme vivant en exil au Pakistan, mais son groupe affirme qu'il se trouve en Afghanistan.

L'accord annoncé jeudi dernier ne devait s'appliquer qu'un fois ratifié par MM. Ghani et Hekmatyar.
Il prévoit l'immunité pour le vétéran du jihad anti-soviétique aujourd'hui âgé de 67 ans, et la libération de prisonniers du Hezb-i-Islami en échange de son renoncement à toute activité militaire.

D'autres seigneurs de guerre ont signé des accords avec Kaboul, dont le général Abdul Rachid Dostum, devenu le vice-président du pays.

Le texte est dénoncé par les organisations de défense des droits de l'Homme, d'autant qu'il ne devrait entraîner aucune amélioration immédiate de la situation sécuritaire en Afghanistan, principalement troublée par les talibans et l'organisation Etat islamique.

Pour l'organisation de défense des droits Human Rights Watch, ce rapprochement risque de "conforter la culture d'impunité" dans le pays.