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Moyen Orient et Monde - Le point

La guerre, les biffins et les pékins

Ils disent : « On a gagné toutes les batailles mais on a perdu la guerre » (Ami Ayalon). Ou encore : « Quand vous quittez le Shin Beth, vous devenez gauchiste » (Yaakov Peri). L’un d’eux va jusqu’à comparer l’armée israélienne à celle de l’Allemagne nazie tandis qu’un autre reconnaît que les responsables politiques n’ont jamais voulu la paix. De six fois dix heures d’entretiens, le cinéaste israélien Dror Moreh a tiré un documentaire de 95 minutes : The Gatekeepers (en hébreu : Shomrei Hasaf), une succession d’interviews de six anciens chefs du Shabak, ou Shin Beth, le service général de sécurité de l’État hébreu. Une œuvre capitale, accueillie avec tiédeur dans le pays lors de sa première diffusion, en pleine campagne de législatives que Benjamin Netanyahu n’est pas parvenu à gagner.
Le sextuple récit est celui de trente ans d’affrontements avec les Palestiniens des territoires occupés. D’une gestion catastrophique aussi, qui a débouché, d’un côté comme de l’autre, sur une haine féroce qui, en quarante-six années d’occupation, loin de perdre de son intensité, n’a fait que croître, nourrie de tortures dans les prisons, d’humiliations qui rabaissent leurs auteurs, de dérapages pas toujours contrôlés. Les révélations sont étonnantes de précision et d’une remarquable liberté de ton, qui trahissent les incertitudes d’hommes déchirés par le doute et qui, malgré les prouesses des agents qu’ils dirigent, constatent que, chaque jour un peu plus, ils sont condamnés à perdre la partie.
Au nom de ses camarades – outre les deux cités plus haut, il y a Carmi Gillon, Avi Dchter et Yuvlal Diskin –, Avraham Shalom se dit presque soulagé d’avoir enfin du travail à accomplir quand, au lendemain de la guerre de juin 1967, il commence à découvrir l’énormité des problèmes : du million d’Arabes des territoires désormais occupés dont il faut suivre le quotidien, à la résistance (il parle, comme les autres, de terrorisme) alors balbutiante mais qui inquiète déjà. Moins tout de même que l’absence de vision stratégique des responsables, exception faite de Yitzhak Rabin, lequel sera assassiné, victime d’une campagne de haine sans précédent dans l’histoire d’Israël.
Faux pas, absence de vision d’avenir, incapacité à comprendre la population du pays que l’on prétend libérer : le constat est le même s’agissant, pour les États-Unis, de l’Irak et de l’Afghanistan. À une différence près : ici, ce ne sont pas les langues des « combattants de l’ombre » qui se délient mais les journalistes qui ont la parole, des organisations diverses, des blogueurs ou encore des auteurs de rapports appelés à paraître bientôt et qui prennent un malin plaisir à organiser des fuites.
Mai 2012 : l’opinion publique découvre avec stupeur la première partie (le reste est à venir...) d’un rapport intitulé : « Décennie de guerre » (« Decade of War »), portant sur les dix dernières années du conflit irakien. Révélé sur le Web par le site « Inside the Pentagon », le document est destiné à ceux qui auront « la charge de développer à l’avenir les forces américaines », affirmait à l’époque Cindy Fields, porte-parole du commandement conjoint. Dire qu’ils en ont grandement besoin constituerait un plaisant euphémisme.
À Bagdad aussi bien qu’à Kaboul, écrivent les auteurs de cette analyse, nos troupes n’étaient pas préparées à une mission de maintien de la paix; en conséquence, l’entraînement militaire, la doctrine, l’équipement étaient inadéquats. Serait-il inconvenant de souligner que les deux guerres en question ont coûté au contribuable yankee la coquette somme de mille milliards de dollars et que pour la seule reconstruction de l’Irak, soixante milliards ont déjà été engloutis, avec les résultats que l’on connaît ?
La première leçon qui doit être tirée de l’aventure mésopotamienne, écrivait le 15 décembre 2011 la revue Forbes, est celle-ci : la raison pour laquelle nous avons envahi ce pays – la présence d’un programme nucléaire – n’existait pas, tout comme ces éléments d’el-Qaëda qui pullulaient aux quatre coins du pays. On pourrait ajouter à cela l’importance de l’armée de Saddam Hussein, supposée représenter pour Tel-Aviv une menace existentielle, et l’impérieuse nécessité de remplacer un tyran par un régime démocratique dont on subit encore les résultats. Une erreur plus grande encore que celle qu’avait constituée la guerre du Vietnam, écrit le magazine dans un article intitulé : « The Biggest Mistake in American Military History ».
Ce que l’on est prié de déduire de tout cela, c’est que les gouvernements, autant sinon davantage que les castes militaires, ne sont pas faits pour la guerre. Pour la paix non plus, ajouteraient certains qui ne seraient pas trop éloignés de la vérité.
Ils disent : « On a gagné toutes les batailles mais on a perdu la guerre » (Ami Ayalon). Ou encore : « Quand vous quittez le Shin Beth, vous devenez gauchiste » (Yaakov Peri). L’un d’eux va jusqu’à comparer l’armée israélienne à celle de l’Allemagne nazie tandis qu’un autre reconnaît que les responsables politiques n’ont jamais voulu la paix. De six fois dix heures...
commentaires (2)

Du Vietnam à l'Iraq et l'Afganistan, de l'Iran à la Syrie, et des Tyrans aux printemps hivernaux, les CONNERIES continuent...

SAKR LEBNAN

11 h 53, le 07 mars 2013

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Commentaires (2)

  • Du Vietnam à l'Iraq et l'Afganistan, de l'Iran à la Syrie, et des Tyrans aux printemps hivernaux, les CONNERIES continuent...

    SAKR LEBNAN

    11 h 53, le 07 mars 2013

  • L'unique raison pour laquelle l'administration George W. Bush a engagé les Etats-Unis dans la guerre d'Irak, selon le désir et sous la pression du puissant lobby juif à Washington, c'est exactement "la supposition que l'armée de Saddam Hussein représente pour Tel Aviv une menace existentielle". Seul résultat de cette guerre, la plus stupide de tous les temps : al-Qaeda en Irak (et maintenant en Syrie) et ce pays sous la tutelle et la domination directes de l'Iran des mollahs. C'est absolument incroyable que dans le système de la plus grande démocratie du monde, le président et son équipe puissent commettre de telles erreurs monstrueuses sans avoir à rendre des comptes à qui que ce soit. C'est ce qui arrive avec l'appui permanent, inconditionnel et désastreux des gouvernements américains à Israel, un pays à ce jour gouverné par des fascistes, ennemis jusqu'à la mort de la paix et dont la politique nuit incroyablement aux Etats-Unis.

    Halim Abou Chacra

    05 h 18, le 07 mars 2013

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