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Moyen Orient et Monde - Le point

Du beurre et des canons

Devant les représentants de plus de 150 pays convoqués en juillet dernier à New York pour plancher un mois durant sur la question, l’honorable Ban Ki-moon a réclamé un accord international qui permettrait de lutter contre le marché noir des armes et d’en interdire la vente à des régimes répressifs ou empêtrés dans des guerres. L’ennui, c’est que le projet onusien nécessite pour sa ratification la signature de 65 États au moins. Amnesty International, de son côté, a jugé que l’absence de tout contrôle fait chaque jour non moins de 1 500 tués, le chiffre pouvant monter à 750 000 par an.
Au Palais de Verre, nul ne se fait d’illusion. Régenter les ventes, oui, mais de manière à laisser à l’acheteur autant qu’au vendeur la liberté d’opérer un tri entrer les « bons » et les « mauvais », selon une logique propre à chacun des deux camps. Ainsi sera-t-il possible aux USA et à la Russie d’armer les premiers Israël, les seconds la Syrie, à condition que le bénéficiaire ne viole pas les droits de l’homme, ne commette pas de génocide, d’acte terroriste ou tout autre crime de guerre. À condition aussi que la transaction ne représente pas un danger pour la paix, ne soit pas de nature à prolonger un conflit et ne soit entachée de corruption. Voilà pour les bonnes consciences.
Place maintenant à un nouveau décor. La presse mondiale a fait état la semaine dernière d’un rapport élaboré par le service de recherche du Congrès US, un organisme non partisan, relevant du législatif américain. Ses auteurs sont Richard F. Grimmett, spécialiste de la sécurité internationale, et Paul K. Kerr, expert en non-prolifération. Les détails contenus dans leur étude donnent le vertige. L’an dernier, les ventes d’armes par les États-Unis ont triplé, atteignant le chiffre jusqu’alors inégalé de 66,3 milliards de dollars (21,4 milliards en 2010), soit 78 pour cent du total mondial qui est de 85,3 milliards. Et pour l’année en cours, prévoit-on, elles devraient augmenter dans une proportion de 70 pour cent.
Au cours de la précédente décennie, les transactions n’avaient cessé de décliner, en raison de la conjoncture économique, avant que la courbe n’entreprenne une rapide remontée, grâce notamment à l’appétit de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis et du sultanat d’Oman pour le matériel militaire « made in the United States » dû au danger représenté par l’Iran. Les emplettes du royaume wahhabite incluent 84 chasseurs ultrasophistiqués F-15, le rééquipement de 70 autres F-15 relativement anciens, des munitions, des missiles, un système de soutien logistique, ainsi que des douzaines d’hélicoptères Apache et Blackhawk. Total général : 33,4 milliards. Avec cela, l’administration démocrate peut s’enorgueillir d’avoir créé 75 000 emplois. La revue Foreign Policy note à cet égard, citant le très respecté Sipri (Stockholm International Peace Research Institute), que l’ensemble des dépenses militaires saoudiennes a représenté l’an dernier un peu moins de 48,5 milliards de dollars, bien plus que le budget du ministère iranien de la Défense.
Les Émirats ne font pas trop mauvaise figure dans le tableau avec l’acquisition d’un système de défense à haute altitude et d’un parapluie antimissile (valeur : 3,49 milliards) ainsi que de 16 hélicoptères Chinook (939 millions), suivis d’Oman (18 F-16 d’une valeur de 1,4 milliard).
Les fabricants d’armes, craignant il y a sept semaines des coupes dans le budget du département de la Défense, avaient mobilisé leurs lobbies pour plaider leur cause et agité la menace de licenciements massifs dans le secteur. L’argument des cinq « majors » – Boeing, Raytheon, Lockheed Martin Corp., Northrop Grumman, General Dynamics – était que le moindre tour de vis coûterait deux millions d’emplois et une chute de 215 milliards de dollars du produit intérieur brut. Dans le même temps, le groupe augmentait de 11,5 pour cent le budget alloué au lobbying, qui avait atteint 15,9 millions pour le premier trimestre de l’année en cours, dans une tentative, sans doute appelée à être couronnée der succès, d’obtenir un allègement des coupes prévues dans le budget du Pentagone, qui sont de l’ordre de 55 milliards étalés sur une période se terminant en 2021.
Un bémol demeure toutefois nécessaire, représenté par le fait que les emplettes des pays concernés s’étalent sur plusieurs années, et même plusieurs décennies dans le cas de l’Arabie saoudite.
Pour relativement exagéré qu’il soit, le danger représenté par la République islamique n’en est pas moins réel. On ne peut s’empêcher toutefois de penser qu’il fait l’affaire de nombre de parties, à commencer par les Iraniens eux-mêmes qui espèrent en tirer profit, les États-Unis ensuite dont il booste l’économie en cette année électorale, les régimes du Golfe enfin qui y voient un moyen de consolider leurs assises. À condition qu’Israël ne se mêle pas de déranger ce bel agencement.
Devant les représentants de plus de 150 pays convoqués en juillet dernier à New York pour plancher un mois durant sur la question, l’honorable Ban Ki-moon a réclamé un accord international qui permettrait de lutter contre le marché noir des armes et d’en interdire la vente à des régimes répressifs ou empêtrés dans des guerres. L’ennui, c’est que le projet onusien nécessite...
commentaires (2)

Dans le même et "Pur" style que l'Irangate. Pauvre Saddam !

Antoine-Serge KARAMAOUN

02 h 35, le 05 septembre 2012

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Commentaires (2)

  • Dans le même et "Pur" style que l'Irangate. Pauvre Saddam !

    Antoine-Serge KARAMAOUN

    02 h 35, le 05 septembre 2012

  • Les yanky qui pronent paix et démocratie sont en fait les fossoyeurs des peuples en quête de celles ci. Ils détiennent le record de vente d'armes et leurs 1ers clients ne sont rien de moins que les bensaoud devant lesquels on agite l'épouvantail, hier saddam aujourd'hui l'Iran. Qui sera t'il demain ? Le cynisme est que cela fait marcher leur marché et réajuster leur emploi, avec une balance commerciale qui se nourrie de ces exportations funestes. Un cycle infernal , que nous subissons , nous autres les bernés des grandes idées véhiculées par ces monstres froids. hylari, condi et autres du même acabit ne sont en fait que des VRP du commerce honteux de cette nation aux abois.

    Jaber Kamel

    11 h 54, le 04 septembre 2012

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