Premier – long – morceau en solo. Et d’emblée, Paco de Lucía affirme la puissance de sa guitare. Il est ensuite rejoint par un percussionniste et trois «cantaores». Gilet et pantalon noirs sur chemise blanche pour tous. Voix rocailleuse pour l’un, haute et vibrante pour les deux autres, les trois ont néanmoins cette cassure, cette déchirure particulière au cante gitan.
Dès les premières notes, les premières complaintes, c’est l’âme profonde, nostalgique et passionnée, âpre et sensuelle, de l’Andalousie qui s’exhale sur les rivages millénaires de Byblos.
Rythme de feu et
bailaor incandescent
Soutenu par le cajón (caisse de percussion) et les tocas de palmas (battement des mains), Paco de Lucía enchaîne par une éclatante démonstration de la vélocité de son jeu. Puis ce sera sa sensibilité qui s’exprimera dans une composition mélodieuse et romantique interprétée par l’ensemble des 7 musiciens et chanteurs qui l’accompagnent. Et qui forment autour de lui un cercle de talentueux complices.
Des rythmes saccadés et fougueux aux échappées libres vers les accents jazz et pop-rock, les morceaux se succèdent dans un tourbillon de notes enveloppant tantôt les sonorités aériennes d’un harmonica, tantôt l’expressif dialogue du duo de guitaristes (Paco et son neveu Antonio Sanchez), d’autres fois encore les harmonieuses nappes de basse et de synthé...
Au cours de la soirée, chacun des membres de cette jeune troupe s’exprimera à tour de rôle encouragé par el maestro qui leur cède volontiers la place pour improviser. Mais c’est incontestablement le danseur Antonio Farruco, longue silhouette brune et vibrante, qui, par ses torrides performances de zapateados (claquements de talons caractéristiques du flamenco), enflammera le public... largement composé de femmes !
Un dernier cante (chant) des chanteurs (David de Jacoba et Rubio de Pruno, considéré comme le nouveau Cameron de la Isla) dont les modulations et vibrations semblent pourfendre le ciel pour lancer un appel au duende (cet esprit du flamenco) et à la lune qui dessinait son plein visage au-dessus de la citadelle... Et un dernier air de flamenco fusion, au rythme de feu joué avec une incroyable habileté, attise encore plus l’auditoire.
D’applaudissements frénétiques en sifflements enthousiastes, de standing ovations répétées tout au long du concert en insistant rappel final, le public ce soir-là a manifesté son éclatante admiration envers une assemblée d’artistes qui, sous la férule de Paco le magnifique, ont appris à mixer virtuosité technique et sensibilité droit venue du cœur !
* Référence au titre de l’un de ses CD.
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