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Lifestyle - Religion

Au Brésil, bandits et policiers ont un même patron : saint Georges

Le saint guerrier est vénéré par des millions de catholiques et d’adeptes de cultes afro-brésiliens, sans contradictions.

Des milliers de personnes s’entassent à l’intérieur et à l’extérieur de l’église, sur fond de chants de messe se mêlant aux percussions africaines. Tasso Marcelo/AFP

Il ne fait pas encore jour que Fabiano Menezes a déjà les yeux rougis d’avoir tant pleuré en implorant la protection de saint Georges, le saint guerrier célébré chaque 23 avril par des millions de catholiques et d’adeptes de religions afro-brésiliennes, dont le culte se développe à Rio de Janeiro. Des milliers de personnes vêtues de rouge et de blanc s’entassent à l’intérieur et sur le parvis de l’église baroque Saints-Gonçalo-et-Georges dans le centre de Rio, où les chants de la messe se mêlent aux percussions africaines et aux tirs de feux d’artifice alors que les trottoirs environnants sont lavés à grande eau, dans le respect de la tradition candomblé.
Saint Georges pour les catholiques, Ogum ou Oxossi pour les Afro-Brésiliens : chacun vénère le saint guerrier, généralement en mélangeant tous les cultes, sans la moindre contradiction. « Je suis catholique, umbadiste (un culte afro), rastafari et à moitié bouddhiste », confie ainsi l’avocat Jorge Oliveira, 41 ans, un Afro-Brésilien aux longues tresses, tout en enlaçant dans l’église une statue rouge de saint George sur son cheval. « Saint Georges est un saint populaire des gens de mauvaise vie. Ici, il y a beaucoup de “bicheiros” (patrons de jeux clandestins), beaucoup de joueurs de samba, des gens qui vivent la nuit. La nuit est dangereuse à Rio. Et eux se sentent protégés par un guerrier », explique Sergio Garcia, 63 ans, qui travaille sur un chantier et porte une impeccable tenue rouge et blanche, un panama et une paire de chaussures en cuir blanc. « C’est le saint favori des bandits et des policiers, qu’il protège des dangers, et dans les fêtes, ils sont tous réunis », affirme également Maria Claudia Pitrez, docteure en sciences sociales à l’Université de Rio de Janeiro (UERJ), auteure d’une thèse sur saint Georges. Fabiano Menezes, mécanicien de 33 ans, porte le saint, dont on dit qu’il est né en Cappadoce (Turquie) en 275, tatoué sur son corps, d’une épaule jusqu’au coude, « pour une meilleure protection ». « Je suis un spirite, un adepte de Ogum. Je ne suis pas catholique », assure-t-il quelques secondes avant de réciter à voix haute un Ave Maria, en allusion au mouvement spirituel du Français Allan Kardec, qui compte quelque 3,8 millions de fidèles au Brésil.
Le syncrétisme religieux au Brésil, où plus de la moitié des 194 millions d’habitants sont noirs ou métis, a commencé avec l’arrivée des esclaves africains, au XVIe siècle, qui ont dû cacher leurs croyances traditionnelles, devenant de véritables polyglottes des religions. Saint Georges est fêté dans tout le Brésil, mais le 23 avril n’est férié que dans l’État de Rio – où l’on compte 12 homicides par jour – depuis 2001. Les célébrations courent tout au long de la journée, autour de plats de « feijoada », plat typique brésilien, à base de haricots noirs et de viandes de porc, et mets favori de Ogum, dans les écoles de samba, Elles donnent lieu à des processions en voiture, à moto ou à cheval. « Ça fait une dizaine d’années que la fête de saint Georges se renforce beaucoup, elle est plus visible. Il y a une lutte pour marquer l’identité umbanda, candomblé et catholique face à la poussée des évangéliques et leurs attaques contre les cultes afro-brésiliens », analyse Renata Menezes, coordinatrice du groupe de recherches en anthropologie de la dévotion à l’Université fédérale de Rio de Janeiro (UFRJ). « L’Église catholique, qui perd du terrain, a généralement décidé d’être plus tolérante face au syncrétisme » de cette fête populaire, ajoute-t-elle.
Le saint a été récupéré jusque par la télévision : la nouvelle « telenovela » de la grande chaîne privée Globo à l’heure de grande écoute se nomme « Vive Jorge » et se déroule dans des favelas violentes de Rio ainsi qu’en Turquie, ce qui a encore contribué à sa popularité. Le Brésil est le pays comptant le plus de catholiques au monde (64,4 % de la population), mais ces dernières années, le nombre de fidèles a diminué au profit des cultes évangéliques, qui représentent désormais plus de 22 % des Brésiliens.

(Source : AFP)
Il ne fait pas encore jour que Fabiano Menezes a déjà les yeux rougis d’avoir tant pleuré en implorant la protection de saint Georges, le saint guerrier célébré chaque 23 avril par des millions de catholiques et d’adeptes de religions afro-brésiliennes, dont le culte se développe à Rio de Janeiro. Des milliers de personnes vêtues de rouge et de blanc s’entassent à...

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