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Moyen Orient et Monde - Éclairage

À Vienne, Moscou et Téhéran devront passer à la caisse

Ayant adouci leurs positions concernant les modalités du départ d'Assad, les opposants au régime, les Occidentaux en tête, attendent désormais que les Russes, et dans une moindre mesure les Iraniens, leur offrent des garanties en retour.

Après une première réunion à Vienne, vendredi dernier, rassemblant la Turquie, la Russie, l’Arabie saoudite et les États-Unis, une seconde session de pourparlers, plus large, est prévue vendredi, toujours dans la capitale autrichienne. Carlo Allegri/AFP

« Je crains que le moment ne soit donc venu de boire le calice jusqu'à la lie et de nous asseoir à Genève à la table de négociation avec Bachar. Peut-être trouvera-t-on le moyen de sauver la face. Mais la vérité est bien celle-ci : Poutine a gagné. »
L'auteur de ces lignes sait de quoi il parle. Ayant occupé le poste de ministre français des Affaires étrangères au début de la crise syrienne, Alain Juppé est bien placé pour constater que l'intervention russe a changé la donne diplomatique. Si Vladimir Poutine n'a pas (encore) gagné, il a redistribué les cartes et ouvert la voie à un accord inédit entre Washington et Moscou. La position des États les plus ouvertement hostiles à Bachar el-Assad s'en est trouvée fragilisée : Turcs et Saoudiens ont finalement consenti à ce que M. Assad puisse jouer un rôle, pour une courte durée, dans une période de transition. N'ayant pas été invité aux discussions de Vienne vendredi dernier, Paris a essayé de revenir à la table des négociations en organisant un « dîner de travail », mardi soir, réunissant les représentants des États opposés au régime syrien. L'objectif était d'accorder les positions de chacun des acteurs afin de former un front uni avant les négociations avec Moscou et Téhéran. Mais l'absence du secrétaire d'État américain, John Kerry, représenté par son adjoint, Tony Blinken, témoigne des limites de l'initiative française.

Si la France participera, cette fois-ci, à la réunion qui aura lieu demain à Vienne, sa voix portera probablement moins que celles de Moscou, Washington, Riyad, Ankara, et... Téhéran. Les quatre premiers se réunissent dès ce soir pour préparer la réunion de demain, selon une source diplomatique russe. L'Iran a, pour sa part, été invité pour la première fois à participer à des pourparlers sur la Syrie. Signe que, malgré les déclarations bellicistes de certains dirigeants iraniens, dont le guide suprême Ali Khamenei, à l'égard des États-Unis, l'accord sur le nucléaire a effectivement concrétisé le retour de l'Iran dans le concert des nations. Seront donc présents à Vienne : la Russie, les États-Unis, l'Arabie saoudite, la Turquie, l'Iran, la France, l'Allemagne, le Royaume-Uni, l'Union européenne, l'Égypte, l'Irak et le Liban. La participation de tous ces États fait de cette réunion un sommet inédit depuis le début de la crise syrienne. Contrairement aux conférences de Genève, d'où l'Iran avait été écarté, tous les protagonistes vont cette fois-ci s'asseoir à la même table. Cela n'offre aucune garantie de résultats, loin s'en faut, mais témoigne d'une démarche positive : le retour de la diplomatie.

 

(Repère : Qui sont les participants annoncés à la réunion de Vienne sur la Syrie ?)

 

« Perdre du temps »
Ayant adouci leurs positions concernant les modalités du départ de M. Assad, les opposants au régime attendent désormais que les Russes, et dans une moindre mesure les Iraniens, leur offrent des garanties en retour. « On doit avoir la certitude que Bachar el-Assad quittera le pouvoir », a déclaré à ce propos, hier, le chef de la diplomatie saoudienne, Adel al-Jubeir.
Bien que le vice-ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir Abdollahian, ait pour sa part assuré que l'Iran « ne travaille pas à maintenir Assad au pouvoir pour toujours », Moscou et Téhéran veulent imposer leur propre cadence : combattre les organisations terroristes, puis discuter du sort du régime. Ils souhaitent ainsi que le président syrien soit maintenu dans ses fonctions tout au long de la période de transition avant que des élections ne décident de son avenir.
Moscou et Téhéran sont-ils prêts à infléchir leur position ?
S'ils veulent trouver un terrain d'entente avec les autres acteurs, ils n'auront sans doute pas le choix. « S'ils sont sérieux, nous le saurons. S'ils ne le sont pas, nous le saurons aussi, et nous arrêtons de perdre du temps avec eux », a prévenu M. Jubeir.


(Lire aussi : Paris et ses alliés veulent négocier un « calendrier précis » de départ d’Assad)

Ils n'ont plus le luxe...
Dans le meilleur des cas, les « vendredi de Vienne » permettront d'établir un plan de sortie de crise, concernant d'une part les modalités d'une transition et d'autre part les contours de la lutte contre le terrorisme. Pour se faire, les protagonistes devront apporter des réponses à de nombreuses problématiques parmi lesquelles : comment intégrer l'opposition au gouvernement de transition compte tenu de son animosité à l'égard du régime ? Comment écarter Bachar el-Assad du pouvoir alors que, même acculé, il n'a jamais été prêt à négocier ? Enfin, comment combattre des organisations jihadistes sunnites en s'appuyant sur la structure du régime syrien, alors que ces organisations survivent justement grâce à leurs antagonismes à son égard ?
Une tâche d'autant plus compliquée qu'en attendant que les tractations se poursuivent, les protagonistes continuent de s'affronter indirectement sur le terrain. L'offensive des alliés du régime s'enlise, et Washington et Riyad ont annoncé leur intention d'accroître leur aide à l'opposition. Autant dire qu'à l'instar des négociations sur le nucléaire iranien, les choses peuvent prendre beaucoup de temps. Mais contrairement aux négociations sur le nucléaire, les principaux concernés n'ont plus le luxe d'avoir le temps. D'autant moins que les Syriens, eux, n'ont pas été invités à la table des négociations...

 

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commentaires (6)

Ils passeront à la caisse... dans un certain sens oui, mais juste pour acheter les timbres fiscaux.

Ali Farhat

11 h 57, le 30 octobre 2015

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Commentaires (6)

  • Ils passeront à la caisse... dans un certain sens oui, mais juste pour acheter les timbres fiscaux.

    Ali Farhat

    11 h 57, le 30 octobre 2015

  • "Le calice jusqu' la lie " fait penser a un episode historique ou celui qui l'a pronounce s'etait suicide etc .. on est pas la pour eduquer les jeunes perdreaux en politique , mais etant donne que les exigences du depart dont juppe lui meme etait un acteur pendant un certain temps , et la donne d'aujourd'hui cad 4 ans et demi plus tard , voir le heros Bashar El Assad Et ses allies , excusez de preciser cela parce que seraient la bensaoudie ou la turquie sans leur yankypatron , allons un peu de bonne foi , donc Le Heros des resistants a deja gagne le guerre , pour la simple et bonne raison qu'il n'a pas eu a souffrir le meme sort que saddam et Kaddafi , qui etaient eux allies des occicons , pourtant . Et l'histoire ne dit pas comment Bashar sera sorti vainqueur après des nego qui , si elles s'eternisaient confirmeraient son statu tant que Dieu lui pretera vie . Cela fait penser aux 20 ans de guerilla ou on a vu detaler honteusement une soit disant puissance dans la region en 2000 et la repetition en 2006 après 33 jours d'infructueuses velleites de revenir chez nous . Seules les resistances armees etc...etc...

    FRIK-A-FRAK

    10 h 36, le 29 octobre 2015

  • ILS DEVRONT PASSER À LA CAISSE POUR DÉPOSER CE QUI EST CONVENU ET ENCAISSER LES PRIX DE LEUR LACHÂGE(S)... CAR ILS SONT AU PLURIEL... !!! ET RIRONT BIEN QUI RIRONT LES DERNIERS...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 59, le 29 octobre 2015

  • C'est assez triste , qu'a force de lire l'OLJ ,en novlangue AFP, l'on éprouve le vague sentiment ...que ce journal soit devenu le service après vente... de la politique moyenne orientale décadente , de la France de Normal 1er....

    M.V.

    08 h 30, le 29 octobre 2015

  • C'est l'éternelle diplomatie des sottises des grandes puissances au Moyen-Orient. Leurs antagonismes, alliés au cynisme du régime super criminel de Damas, donnent naissance au monstre Daesh qui les menace toutes maintenant, et elles ne savent pas comment s'en débarrasser. Le chef du régime en question, lui, leur dit cyniquement : abattez ce monstre d'abord et après on examinera mon sort.

    Halim Abou Chacra

    03 h 48, le 29 octobre 2015

  • qu'elle gain amere pour assad, voir d'autre pays forces dans la region decider de son sort lecomble je dirais c'est que les USA y sont inviter !! Jolie revers, dommage pour lui

    Bery tus

    03 h 19, le 29 octobre 2015

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