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Santé - Pneumologie

Lorsque l’obésité affecte les fonctions respiratoires

L'obésité et la surcharge pondérale ne cessent de gagner du terrain, avec près de deux milliards de personnes dans le monde qui en souffrent, selon l'Organisation mondiale de la santé. Au-delà de la question esthétique, l'obésité présente un sérieux risque pour la santé. Elle affecte non seulement le cœur, mais les poumons aussi.

La perte de poids est le moyen le plus efficace pour lutter contre les complications de l’obésité sur le cœur et les poumons. Photo Bigstock

Essoufflement, difficulté à respirer... l'obésité n'affecte pas uniquement les fonctions cardiaques, mais celles respiratoires aussi : la personne affichant une importante surcharge pondérale doit fournir des efforts supplémentaires pour respirer. À long terme, certains patients vont devoir même recevoir de l'oxygène à domicile. Comment l'obésité affecte-t-elle les poumons ? Le Dr Mohammad Ridha Charfi, chef du service de pneumo-allergologie à l'hôpital des FSI de La Marsa, en Tunisie, et professeur à la faculté de médecine de Tunis, répond aux questions de L'Orient-Le Jour, en marge des travaux du congrès annuel de la Société libanaise de pneumologie et ceux de la première triennale de l'Espace francophone de pneumologie tenus récemment à Beyrouth.

« Nous distinguons deux formes d'obésité, explique le spécialiste. Celle localisée dans le bas du corps notamment au niveau des fesses et des hanches, appelée gynoïde, et celle installée dans le haut du corps, dite androïde, et caractérisée par une distribution de la graisse au niveau des parois thoracique et abdominale, ainsi qu'au niveau des organes abdominaux. La première forme d'obésité a moins d'effets sur la respiration. Dans l'obésité androïde, par contre, l'accumulation de la graisse empêche les mouvements des côtes et des poumons. De ce fait, le sujet ne peut plus inspirer facilement. »
Selon les standards internationaux, la surcharge pondérale et l'obésité sont définies suivant l'IMC (Index de masse corporelle ou BMI-Body Mass Index). Celui-ci est obtenu en divisant le poids de l'individu par sa taille en mètre carré. On parle de surpoids ou de préobésité, lorsque l'IMC est compris entre 25 et 29,9. Sont obèses les personnes dont l'IMC est supérieur ou égal à 30, sachant que les spécialistes distinguent trois classes d'obésité : classe I ou obésité modérée pour un IMC compris entre 30 et 34,9, classe II ou obésité sévère lorsque l'IMC varie entre 35 et 39,9, et classe III ou obésité morbide lorsque l'IMC est supérieur ou égal à 40.
« Les troubles sur les volumes respiratoires sont observés même avec une simple surcharge pondérale, précise le Dr Charfi. Toutefois, plus l'obésité est importante, plus les conséquences sont sévères. »
Le spécialiste explique ainsi qu'à la respiration, une personne obèse va devoir développer un effort important, en raison de « la masse graisseuse qui empêche les mouvements normaux de la paroi et des poumons ». « Cet effort supplémentaire est efficace puisqu'il permet de garder dans le sang une quantité d'oxygène suffisante et une quantité de gaz carbonique inférieure à la limite de la normale, indique-t-il. Lorsque l'obésité devient importante toutefois, tous ces phénomènes sont plus ou moins débordés, dans le sens où les muscles ne peuvent plus survenir à cette augmentation du travail ventilatoire. Cela entraîne une diminution de la quantité d'oxygène dans le sang, ou hypoxémie, ainsi qu'une augmentation de la quantité de gaz carbonique, ou hypercapnie. »

Ventilation non invasive
Il n'existe pas de traitements médicamenteux pour lutter contre les problèmes respiratoires dus à l'obésité. « La chose la plus simple et la plus directe reste la perte du poids, insiste le Dr Charfi. Celle-ci permet aussi d'améliorer d'une manière évidente toutes les anomalies qu'on observe chez les personnes obèses. »
Chez certaines personnes affichant une obésité sévère toutefois, la diminution du taux d'oxygène dans le sang est tellement importante qu'il va falloir « leur administrer de l'oxygène à domicile », note le Dr Charfi. « Chez certaines personnes, on a même recours à la ventilation non invasive à domicile, ajoute-t-il. Dans ces cas, l'hypoxémie et l'hypercapnie sont tellement sévères que l'appareil ventilatoire n'est plus efficace. La ventilation consiste à couvrir le nez et la bouche par un masque relié à une machine qui va insuffler de l'air et aider le patient à ventiler. »
Le Dr Charfi indique dans ce cadre qu'en cas d'insuffisance respiratoire, l'hypoxémie s'installe en premier. « L'hypercapnie est une étape supplémentaire qui est plus grave, poursuit-il. Généralement, en cas d'hypoxémie, la personne arrive souvent à dégager le gaz carbonique (CO2). Lorsqu'elle atteint un stade où l'hypoxémie devient importante et qu'elle n'arrive plus à dégager le CO2, on se trouve devant une défaillance ventilatoire. Dans certains cas, le patient est ventilé jour et nuit. On lui accorde juste quelques heures de répit pour qu'il ait un minimum d'activités sociales et de mouvements. »

Cure d'amaigrissement
La perte du poids permet-elle de reverser la pathologie ?
« Il faut distinguer entre le syndrome de l'apnée de sommeil, qui est lié à l'obésité, et les effets de l'obésité sur la fonction ventilatoire, répond le Dr Charfi. Lorsqu'on perd du poids, on améliore tout. Il existe toutefois des formes d'apnée du sommeil qui s'améliorent, mais qui ne guérissent pas, malgré la perte du poids. »
L'apnée de sommeil se caractérise par une obstruction partielle ou complète des voies aériennes supérieures au cours du sommeil, causant des épisodes d'interruption de la respiration pendant quelques secondes et cela plusieurs fois au cours d'une même nuit. Ces personnes ne peuvent pas dormir sans être ventilées.
« Donc, dans le cas d'apnée de sommeil, les personnes pourront avoir toujours besoin de ventilation, même après une cure d'amaigrissement, fait remarquer le Dr Charfi. Pour ce qui est de l'hypoxémie et de l'hypercapnie, l'amaigrissement est très efficace. La personne peut guérir. »
Quid des enfants ? « Les mêmes problèmes d'hypoxémie et d'hypercapnie sont observés chez eux, puisque la cause mécanique est là, avance le Dr Charfi. L'accumulation de graisse va gêner les mouvements que ce soit chez l'adulte ou chez l'enfant. Aujourd'hui, on sait que quelque 1,9 milliard d'adultes dans le monde (soit près de 40 % de la population adulte) affichent une surcharge pondérale, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Parmi eux, 600 000 sont obèses. Selon l'OMS également, près de 40 000 millions d'enfants de moins de 5 ans sont obèses. »
Et le Dr Charfi de conclure : « Les complications pulmonaires commencent avec la surcharge pondérale, mais le patient ne viendra pas consulter puisqu'il n'est pas gêné. Plus l'obésité s'aggrave et dure dans le temps, plus les conséquences sur l'appareil respiratoire vont s'aggraver. Il est important donc de ne pas attendre le stade où on aura besoin de la machine. Il faut vraiment perdre du poids, d'autant que certains phénomènes pourront être irréversibles. »

 

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