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Moyen Orient et Monde - Anniversaire

11-Septembre : l’Amérique face à ses propres démons

Improbables retournements de situation, remaniements des personnages principaux, scenario rythmé et inventif, dialogues burlesques, caractères excentriques, changement de décor et d'ambiance : à bien des égards, il faut l'admettre, le combat qui oppose les États-Unis à l'islam jihadiste depuis bientôt 30 ans est digne des plus grandes pièces de théâtre de l'histoire. Retour sur les actes décisifs qui ont fait basculer l'intrigue.

Improbables retournements de situations, remaniements des personnages principaux, scénario rythmé et inventif, dialogues burlesques, caractères excentriques, changement de décor et d’ambiance : à bien des égards, il faut l’admettre, le combat qui oppose les États-Unis à l’islam jihadiste depuis bientôt 30 ans est digne des plus grandes pièces de théâtre de l’histoire. Retour sur les actes décisifs qui ont fait basculer l’intrigue. Spencer Platt AFP/Getty Images/Archives/Capture d’écran vidéo James Foley

Acte I : l'Afghanistan

Des moudjahidines triomphants arrivent à Kaboul le 28 avril 1992. AFP/Saeed Khan


L'histoire commence en Afghanistan. Envahi par l'Union soviétique en 1979, le régime d'influence communiste fait face à une rébellion guerrière menée par les moujahidin. En réaction, l'administration Carter, qui craint le nouvel élan d'expansionnisme de son rival, rompt la politique de détente et s'investit indirectement dans ce conflit. Son principal apport ? Une aide secrète accordée aux fondamentalismes islamiques par l'intermédiaire de deux puissances régionales alliées : le Pakistan et l'Arabie saoudite. Une contribution américaine aux fondamentalistes que Reagan ne cherchera même plus à cacher quelques années plus tard. Il ira jusqu'à fournir aux Afghans ces fameux missiles sol-air Stinger, dont la redoutable efficacité scellera définitivement la défaite des Soviétiques. À l'époque, les États-Unis n'ont pas vraiment conscience qu'ils viennent de favoriser la montée en puissance de leur futur ennemi. L'Afghanistan devient un laboratoire mondial pour la pensée extrémiste à tel point qu'en 1987, un certain Ben Laden évoque, pour la première fois, l'idée d'une extension du jihad en direction des États-Unis. Fin de l'acte I.

 

Acte II : 11 septembre 2001

Le World trade Center, à New York, le 11 septembre 2001, après avoir été frappé par deux avions. Craig Allen / Getty Images / AFP

 

La scène la plus symbolique de la pièce se déroule dès l'acte II. Sa principale force : l'effet de surprise. Le 11 septembre 2001, une organisation nommée el-Qaëda, dirigé par Oussama Ben Laden, perpétue, à quelques heures d'intervalles, quatre attentats-suicide en détournant des avions sur des lieux hautement représentatifs. Comment la première puissance mondiale peut-elle être prise à défaut par 19 jihadistes ? Comment ont-ils pu écraser leurs avions sur les tours jumelles du World Trade Center et sur le Pentagone ? Le public n'en croit pas ses yeux. L'Amérique est vulnérable. La fin de l'histoire est un mythe. L'américanisation du monde se heurte à une violente opposition. Résultat : 2 973 personnes mortes, appartenant à quatre-vingt-treize pays différents. Le drame est universel. S'ensuivent les images des pleurs et des cris des familles des victimes, un sentiment général de confusion et d'émotion, de tristesse et de peur. S'ensuivent des discours aux accents manichéens et des surenchères de démonstration d'héroïsme. S'ensuivent la consolidation de la politique sécuritaire américaine, le regain de popularité de Bush fils et sa réélection en 2004. S'ensuivent enfin les deux décisions capitales d'entrer en guerre contre le terrorisme, en Afghanistan, en 2001 et en Irak, en 2003. Fin de l'acte II.

 

Acte III : la guerre contre l'Irak... de Saddam

9 avril 2003, la statue de Saddam Hussein recouverte du drapeau américain par des marines à Bagdad. AFP

Bush père avait décidé d'entrer en guerre contre l'Irak pour briser les velléités de Saddam Hussein d'envahir le Koweït. De cette guerre, le dictateur sort plus affaibli que jamais. Ostracisé par les puissances du Golfe, il apparaît être un moindre danger. C'est pourtant contre lui que les États-Unis, convaincus qu'il détient des armes de destruction massive, et aimantés par l'appât du gain pétrolier, entameront, au nom de la lutte contre « l'axe du mal », la guerre la plus chère et la plus contestée de leur histoire... et la plus médiatisée. Cette fois, le public peut suivre quotidiennement l'invasion US par le biais des nombreuses télévisions. C'est peu dire que la puissance technologique américaine impressionne. Très vite se dégage l'idée, confortée par la chute rapide du régime Saddam, que cette guerre ne peut pas durer. Les images des statues déboulonnées de l'ancien dictateur se multiplient, jusqu'à cette étrange vidéo montrant sa mort par pendaison en 2006. Les États-Unis espéraient être célébrés en libérateur de l'oppression. Certains avaient mêmes de réelles intentions de démocratiser le pays, et par extension, la région. Mais la démocratie par la guerre a naturellement accouché d'une situation de chaos. Fin de l'acte III.

 

Acte IV : en préparant le pire

Barack Obama est élu en 2008 à la présidence des Etats-Unis. AFP


En 2008, un Noir américain est élu pour la première fois à la présidence des États-Unis avec la promesse de mettre fin aux guerres, désastreuses pour le moral et l'économie du pays, entamées par son prédécesseur. Il tient sa promesse : retrait quasi total de l'Irak en 2011, retrait progressif de l'Afghanistan jusqu'en 2014. Mieux encore, grâce à une opération minutieusement préparée par une unité d'élite, Obama annonce fièrement ce qui reste jusqu'alors l'un des grands moments de sa présidence : la mort d'Oussama Ben Laden. Dans le même temps, les images des manifestations de la jeunesse arabe, particulièrement celle de la place Tahrir, rassure l'opinion américaine sur le destin de cette région et entérine la réconciliation avec le monde musulman amorcée par le discours du Caire de 2009. Tout est beau. En apparence. En réalité, la guerre d'Irak a ravivé les tensions communautaires, a permis la fomentation d'un terrorisme chronique incarné par les nombreux attentats-suicide et a laissé la place à un sentiment d'injustice et de vengeance propice à favoriser l'influence des discours extrémistes. Fin de l'acte
IV.

 

Acte V : d'el-Qaëda à l'État islamique

Capture d'écran d'une vidéo de propagande du site jihadiste Welayat Salahuddin, le 11 juin 2014, montrant un militant de l'Etat islamique (EI, ex Daech) posant avec son drapeau. AFP


Pour le dernier acte de la pièce, la mise en scène est un savant mélange de peur, d'attente et d'ironie. En 2004, un mouvement jihadiste irakien, dirigé par le jordanien al-Zarkaoui, prête allégeance à el-Qaëda. L'ancêtre de l'État islamique est né. Pour contrer la montée en puissance de cette organisation, qui prend en 2006 le nom d'État islamique en Irak, les Américains vont armer les tribus sunnites créant les milices de la sahwa. Dans le même temps, les USA vont soutenir le Premier ministre irakien, le chiite Nouri el-Maliki, qui mène une politique de discrimination contre les sunnites. Il ne suffit alors que d'une étincelle pour que le chaos irakien s'exporte aux autres pays de la région. L'organisation ne laisse pas passer l'opportunité que lui offre la guerre syrienne : le jihadisme devient mondial et porteur d'une dimension eschatologique. Les démonstrations de violences se multiplient. Les territoires conquis s'accumulent, jusqu'à l'arrivée de l'EI aux portes d'Erbil. Menacés dans leurs « intérêts vitaux », les États-Unis entament des frappes aériennes sur les positions de l'EI. Et face à ce « nouveau danger », Barack Obama appelle à la formation d'une coalition internationale. Quitte à frapper les positions de l'EI en Syrie, à favoriser de la sorte le régime Assad contre qui il avait pourtant menacé d'intervenir, avant de se rétracter, à l'été 2012. Et à ouvrir encore une fois la boîte de Pandore. Fin de l'acte V...

 

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Acte I : l'Afghanistan

Des moudjahidines triomphants arrivent à Kaboul le 28 avril 1992. AFP/Saeed Khan
L'histoire commence en Afghanistan. Envahi par l'Union soviétique en 1979, le régime d'influence communiste fait face à une rébellion guerrière menée par les moujahidin. En réaction, l'administration Carter, qui craint le nouvel élan d'expansionnisme de son rival, rompt la...

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Obama corrige les erreurs de ses prédécesseurs...

Emmanuel Ramia

16 h 29, le 11 septembre 2014

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Commentaires (1)

  • Obama corrige les erreurs de ses prédécesseurs...

    Emmanuel Ramia

    16 h 29, le 11 septembre 2014

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