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Moyen Orient et Monde - Le point

La guerre de trop

Après le retrait, dimanche, du dernier GI, Barack Obama entame sa campagne d’Irak, la vraie, face à des républicains qui, à l’instar de Mitt Romney, lui reprochent sa hâte à plier bagage et son refus de laisser sur place un contingent de « 10 000, 20 000, 30 000 soldats chargés d’épauler l’armée locale dans la rude tâche qui l’attend en cette période de transition ». Et cela ne fait que commencer. Demain, les parlementaires commenceront à éplucher les divers bilans et à comptabiliser les pertes en vies humaines, les terribles dégâts causés dans les esprits, les scandales hérités de l’époque pas si lointaine où la pieuvre Blackwater étendait ses tentacules partout et à tous les niveaux.
L’opération « Shock ans Awe » en chiffres, cela donne 4 474 militaires US tués et 32 226 blessés, 113 728 Irakiens abattus dont 180 pour le seul mois en cours, un coût évalué à mille milliards de dollars pour 3 187 jours de présence. Signe des temps : la population locale n’a été informée du départ du dernier contingent US qu’après l’arrivée des 500 hommes qui le composent à la frontière koweïtienne. Auparavant, lors de la cérémonie tenue pour l’occasion à l’aéroport de la capitale, aucun ministre du gouvernement Maliki n’avait daigné se déplacer, tout le monde étant conscient sans doute de la gravité des problèmes demeurés sans solutions, nés de ce qu’il faut bien appeler du vilain nom d’occupation.
Un politicien irakien se souvient aujourd’hui : « Reçu par George W. Bush quelque temps avant le 20 mars 2003, j’avais évoqué la complexité d’une situation née, entre autres, des rapports tendus entre les deux grandes communautés sunnite et chiite. Le président m’a paru étonné d’apprendre ce qui, pour nous, semblait une évidence. » On ne peut oublier à cet égard les propos d’une ahurissante candeur tenus par le secrétaire à la Défense de l’époque, Donald Rumsfeld, convaincu que l’expédition en terre mésopotamienne allait constituer une promenade de santé appelée à être couronnée par l’avènement de la démocratie après des décennies de dictature.
Bon, on arrête la fanfare. Que reste-t-il de tout cela? Un pays exsangue, une population traumatisée, une omniprésence iranienne dont on cherche encore à minimiser les effets sur l’ensemble du Proche-Orient, une exacerbation des sentiments antiaméricains, aggravée de plus par un inconditionnel alignement yankee sur les pires positions israéliennes, la conviction que Washington, par sa seule présence – armée ou « diplomatique » –, et du fait d’une maladresse congénitale, ne fait que compliquer les choses. Enfin, avec l’oubli (bienfaisant ou néfaste, peu importe) des années passées sous la pesante férule baassiste, la conviction qu’« on était mieux avant ». Plus grave, au niveau international, la crédibilité de l’Oncle Sam n’est plus un dogme de foi depuis le fiasco des introuvables armes de destruction massive. Ceci encore, et à titre d’exemple : malgré les efforts déployés, malgré les signes apparents de bonne volonté de la part de presque toutes les parties, il n’a pas été possible à ce jour d’aboutir à un partage équitable des recettes provenant des gisements de Kirkouk entre Kurdes, Turkmènes et Arabes.
À ce propos, que n’a-t-on entendu ce refrain, seriné en point d’orgue des arguments avancés pour expliquer les raisons de l’intervention des États-Unis : « Ils veulent s’approprier l’or noir du pays, à tout le moins contrôler son exploitation... » Rectifions : l’Irak a octroyé jusqu’à présent des permis à une douzaine de firmes chinoises, russes, coréennes, néerlandaises, britanniques et une seule licence à l’américain Exxon Mobil, d’ailleurs aussitôt annulée par le gouvernement de Nouri el-Maliki pour cause d’« illégalité » (absence d’une législation adéquate sur la répartition des richesses pétrolières).
En ce début de semaine, les tensions internes ont été ravivées par la soudaine décision d’al-Irakiya, le bloc parlementaire sunnite, de suspendre ses activités pour protester contre la monopolisation du pouvoir par le Premier ministre. En outre, le vice-président Tarek el-Hachémi, un sunnite, vient de se voir signifier une interdiction de quitter le pays. Motif : trois de ses anciens gardes du corps, récemment arrêtés, auraient fait état de ses liens avec le terrorisme. On le voit, les rapports entre les deux principales composantes de la population n’en finissent pas de subir les bienfaits de la pax americana sur les bords du Tigre.
Dans un récent sondage, les Américains expriment la crainte de voir leur protégé sombrer dans la guerre civile. Avec la brutalité dont il est coutumier, Newt Gingrich vient de lâcher : « Je crois que nous allons découvrir à notre grande tristesse que nos boys sont morts en tentant d’atteindre un objectif irréalisable. Ne soyons pas mauvaise langue. Tout le monde vous dira qu’en la matière, le candidat républicain à l’investiture du Grand Old Party ne représente pas une référence valable. »
Après le retrait, dimanche, du dernier GI, Barack Obama entame sa campagne d’Irak, la vraie, face à des républicains qui, à l’instar de Mitt Romney, lui reprochent sa hâte à plier bagage et son refus de laisser sur place un contingent de « 10 000, 20 000, 30 000 soldats chargés d’épauler l’armée locale dans la rude tâche qui l’attend en cette période de...

commentaires (2)

La pax americana une gifle pour la paix et un engagement pour une guerre civile irakienne ,plus redoutable et plus choquante que les folies de Saddam . Antoine Sabbagha

Sabbagha Antoine

05 h 55, le 20 décembre 2011

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Commentaires (2)

  • La pax americana une gifle pour la paix et un engagement pour une guerre civile irakienne ,plus redoutable et plus choquante que les folies de Saddam . Antoine Sabbagha

    Sabbagha Antoine

    05 h 55, le 20 décembre 2011

  • Ce que nous criions de toute notre âme, vient d'être couché sur le papier par Merville, de façon simple, réaliste et dramatique. Fallait il autant de gachis en vie humaine, en ressources économiques et financières pour aboutir à ce triste résultat, résultat de la connerie d'un président ne sachant différencier entre son stetson et ses santiags. Je suis né chiite,je devrais chanter le louanges de cet abruti,qui adonné du poids à cette communauté dans la région, eh bien non, je refuse de le faire, le résultat escompté n'était pas cette intention de sa part, il venait pour le pétrol et rien d'autres, mais le prix payé est trop élevé, les haines trop exarcerbées entre toutes les communautés, chrétienne incluse, l'onde de choc se fait ressentir chez nous au Liban, et certains ne voulant encore rien voir, ne réaliseront qu'un peu tard que les remous balaieront en premier ceux qui ne s'y étaient pas préparé, trop occupé à croire que l'oncle sam peut encore intervenir à leur secours.Alors que la preuve n'est plus à faire que son intérêt restera, par la force des lobbys rivé sur le renforcement des racistes et destructeurs de la région, n'ayons pas peur de les indexer, les gouvernants israéliens.

    Jaber Kamel

    04 h 49, le 20 décembre 2011

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