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Liban - Éclairage

Nasrallah donne le signal de la contre-attaque du Hezbollah...

C'est un discours à clés que le secrétaire général du Hezbollah a prononcé vendredi à l'occasion de « la journée du blessé de la résistance ». Chaque mot y est pesé pour délivrer des messages dans plusieurs directions. Depuis quelques semaines déjà, avec les « confidences » filtrant dans les médias sur le probable contenu de l'acte d'accusation du TSL, annoncé pour l'automne, le Hezbollah faisait état d'un vaste plan « américano-israélien » visant à l'incriminer pour l'isoler, le discréditer et provoquer une discorde interne. Il était aussi clair que ce parti ne resterait pas les bras croisés à attendre son « lynchage (au moins) politique » pour avoir, selon les rumeurs autour du TSL, participé à l'assassinat de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri. Selon ses proches, le parti préparait donc une contre-attaque et la question principale consistait à savoir quand elle commencerait.
Le secrétaire général du parti, Hassan Nasrallah, a multiplié la semaine dernière ses contacts avec ses alliés. Il a ainsi rencontré longuement et séparément le chef du CPL, le général Michel Aoun, et le chef du courant des Marada, Sleimane Frangié, pour mettre au point les derniers détails de la riposte ainsi que pour coordonner les positions. Avec le président de la Chambre, Nabih Berry, la concertation est permanente, et il n'était nul besoin d'une rencontre officielle pour peaufiner la coordination.
Comme convenu au cours de ces rencontres, c'est donc Nasrallah qui a pressé le bouton déclenchant la contre-offensive, suivant un plan par étapes, qui va crescendo. Il a ainsi choisi de parler vendredi dans l'après-midi avant une interview en direct accordée par le chef du PSP Walid Joumblatt à la chaîne al-Manar, en principe à l'occasion du quatrième anniversaire de la guerre de juillet 2006. Comme l'homme est loin d'être un amateur, chaque détail dans sa communication compte... Dans une première phase, il s'agit donc de lancer des pistes et d'attendre les réactions, tout en laissant entendre que les doses augmenteront au fur et à mesure, selon l'attitude des autres partenaires au sein du pays. Ce n'est pas ainsi un hasard si Nasrallah a posé des questions, notamment au sujet du « département des informations » au sein des FSI, tout en affirmant détenir les réponses. Ce qui signifie qu'il donne un délai aux protagonistes pour corriger l'erreur (s'il y en a) ou pour agir, mais qu'ils ne peuvent pas se réfugier dans le déni, puisque son parti détient ce qu'il considère être « des informations incontestables ».
En réalité, le dernier discours du « sayyed » est truffé de menaces à peine voilées, même s'il se défend d'utiliser ce genre de procédés, préférant parler de « contrecarrer un plan fomenté par les ennemis du Liban », qui vise le pays tout entier et non seulement le Hezbollah.
Le discours de vendredi s'articule ainsi autour de deux axes : le dossier sécuritaire qu'il a ouvert largement en s'interrogeant sur l'attitude du département des informations des FSI, et le secteur des télécommunications qui, après ce que l'analyste Adel Malek a appelé « l'alfagate », semble grandement infiltré par les renseignements israéliens. En ouvrant le dossier du département des informations des FSI, Nasrallah sait que cette affaire peut prendre une tournure confessionnelle, mais, dans son optique, il a laissé la porte ouverte à un règlement, en ne révélant pas tout ce qu'il sait et en laissant à l'autre partie la possibilité de régler le problème.
De même, en évoquant le secteur des télécommunications, Nasrallah a réclamé pour la première fois que l'on ne se contente pas de juger les petits espions, assurant qu'il faut aller aux têtes. Il est ainsi revenu au 5 mai 2008, lorsque le Conseil des ministres présidé par Fouad Siniora a adopté une décision portant sur le démantèlement du réseau téléphonique interne du Hezbollah, lequel, selon le rapport de la commission israélienne Winograd, avait constitué un des principaux éléments de sa force en juillet 2006. Nasrallah a insisté sur la nécessité d'identifier ceux qui ont poussé le gouvernement à prendre une telle décision qui avait failli, selon lui, entraîner le Liban dans la guerre civile. Jamais encore, auparavant, il n'avait été aussi précis dans sa volonté de démasquer ce qu'il a appelé « les têtes » qui, d'une façon ou d'une autre, travaillaient pour le compte d'Israël. Cette partie du discours s'adresse en particulier au chef du PSP Walid Joumblatt qui avait été, comme le soulignait la presse de l'époque, l'un de ceux qui avaient poussé à l'adoption de la décision gouvernementale. Non pas que Joumblatt soit accusé d'être une de ces têtes. Bien au contraire. Mais il détient probablement les informations nécessaires pour dévoiler celles-ci. Et surtout, il possède une carte maîtresse qui est celle de ses douze députés ainsi que celle de ses trois ministres qui peuvent en une seule décision de sa part faire basculer la majorité et modifier ainsi le paysage politique du pays. On se souvient d'ailleurs que le secrétaire général du Hezbollah avait été le principal médiateur de la réconciliation entre Joumblatt et les autorités de Damas. C'est d'ailleurs, comme l'ont révélé ses proches, sur « une garantie de Nasrallah » que le président syrien Bachar el-Assad avait accepté de recevoir le chef du PSP. Et à ceux, parmi ses alliés, qui lui reprochaient de mettre sa crédibilité au service du leader druze, qui n'a pas toujours fait preuve de constance politique, Nasrallah affirmait que cette fois c'est différent. En termes voilés, il a donc, dans son dernier discours, laissé entendre à Joumblatt que l'heure était venue d'agir et de ne plus se contenter de simples prises de position, aussi importantes soient-elles. Joumblatt a-t-il saisi le message et compte-t-il répondre positivement à la sollicitation discrète du Hezbollah ?
Dans son entretien avec la chaîne al-Manar, vendredi soir, il a adopté des positions en flèche, dans le sens de celles du parti. Et, en réponse à une question, il a qualifié ses relations d' « excellentes » avec les autorités syriennes...
Comme à l'accoutumée, Nasrallah a prononcé son discours et il attend maintenant les réactions en profondeur, qui n'ont souvent rien à voir avec les déclarations à la presse. La phase une de la contre-attaque est donc déclenchée. La suite viendra au fur et à mesure.

C'est un discours à clés que le secrétaire général du Hezbollah a prononcé vendredi à l'occasion de « la journée du blessé de la résistance ». Chaque mot y est pesé pour délivrer des messages dans plusieurs directions. Depuis quelques semaines déjà, avec les...

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