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À La Une - Liban

Le Liban croule sous le flot des réfugiés syriens

« Le Liban ne pourra pas venir seul à bout de la crise des réfugiés syriens », souligne une source autorisée à la Sûreté générale.

En mars dernier, des réfugiés syriens sont arrivés à dos d’âne et de mulet, à Chebaa, au Liban-Sud. (Reuters, photo d’archives)

« Aujourd’hui, le Liban compte environ un million de réfugiés syriens. Du 1er octobre 2012 jusqu’à la fin du mois de mars, 340 000 réfugiés sont entrés dans le pays. Ils devaient être aux environs de 600 000 avant octobre dernier », précise à L’Orient-Le Jour une source autorisée à la Sûreté générale.
Ce chiffre augmentera inévitablement, surtout que les combats ne se sont pas encore intensifiés à la frontière libanaise et que la crise syrienne sera difficile et longue.


Ces 340 000 ressortissants syriens sont entrés légalement au Liban. Leur nombre est facile à quantifier vu qu’il répond à une équation simple, effectuée en déduisant le nombre total des entrées de celui des sorties, sur les postes frontaliers. Il faut compter également quelque 30 000 réfugiés palestiniens des camps de Syrie, vivant dans les camps du Liban. Ce chiffre n’a pas augmenté depuis les bombardements de l’armée syrienne du camp de Yarmouk, en décembre dernier.


Tous les jours, des tableaux informatisés, en provenance des quatre postes frontaliers entre le Liban et la Syrie, parviennent à la Sûreté générale à Beyrouth, sur le mouvement des personnes qui franchissent la frontière.
Côté libanais, on compte quatre points de passage légaux toujours opérationnels. Celui de Masnaa, qui est le plus fréquenté, de Arida, de Boukaya et de Abboudiyé. Le cinquième point de passage, situé à Mcharih el-Qaa, a été fermé du côté syrien l’été dernier.


La source à la Sûreté générale reconnaît qu’il existe « un certain nombre de ressortissants syriens illégaux au Liban. Les autorités ne peuvent pas intervenir dans ce cadre, ou encore disposer de chiffres relatifs à leur nombre. Ce sont généralement des hommes, des blessés, d’anciens combattants ou des déserteurs de l’armée. Certains d’entre eux entrent au Liban sans papiers d’identité ou encore se débarrassent de leurs papiers une fois arrivés au Liban. S’ils sont arrêtés, nous les relâchons à la condition qu’ils montrent des documents authentifiant leur identité. Généralement, leurs proches ou leurs parents se présentent à la Sûreté générale avec les documents en question ».


En les relâchant, la Sûreté générale leur donne sept jours pour quitter le pays. « Mais nous savons qu’ils restent et nous ne pouvons rien faire. Nous ne les poursuivons pas », souligne cette source, précisant que « ces Syriens, entrés illégalement au Liban, sont arrêtés suite à des vols, ou des contrôles effectués aux barrages de l’armée ou de la police ».

Six mois d’affilée et sortir pour 24 heures
L’entrée et le séjour des ressortissants syriens au Liban sont régis par des accords bilatéraux signés sous le mandat de l’ancien président de la République, Émile Lahoud.


Un ressortissant syrien peut rester au Liban six mois d’affilée, sortir 24 heures du pays au moins et revenir pour six mois, ressortir pour 24 heures au moins, sans visa, sans permis de séjour, sans payer de frais et revenir encore pour six mois... À la douane libanaise, il reçoit une carte portant le tampon de la Sûreté générale.


« Depuis le début de la crise en Syrie, la Sûreté a trouvé une formule permettant aux déplacés de ne pas être obligés de rentrer chez eux tous les six mois. Comme tous les étrangers, ils paient désormais 300 000 livres par an le permis de séjour. Leur carte de séjour doit cependant être tamponnée tous les six mois », souligne la source autorisée, notant que « s’ils ne rentrent pas chez eux au moins durant un jour tous les six mois, c’est que ces réfugiés ont soit perdu leurs maisons, soit qu’ils ne veulent pas rejoindre les rangs de l’armée, soit qu’ils ont tout simplement peur ».
Elle indique également que « les réfugiés enregistrés auprès de l’UNHCR doivent avoir des papiers en règle auprès de la Sûreté générale, sinon ils seront considérés comme illégaux ; ceux qui entrent illégalement via la frontière du Akkar ou de la Békaa ne viennent jamais se faire enregistrer auprès des autorités libanaises ».


Mis à part les quatre postes-frontières légaux et les zones frontalières minées par l’armée syrienne, il existe des points de passage illégaux et sécurisés, dans le Akkar, la Békaa et la Békaa-Ouest. À Ersal par exemple, une frontière de 60 kilomètres s’étend dans une montagne aride où, depuis décembre dernier, il n’y a plus aucun soldat ou garde-frontière syrien. L’armée libanaise n’a jamais mis en place des postes sur cette frontière.
« La troupe libanaise doit être partout, au Sud, au Nord, à l’Est et à l’intérieur du pays pour veiller à la sécurité. Il faut tout un dispositif pour qu’elle puisse contrôler la frontière avec la Syrie, que ce soit sur le plan du nombre d’hommes déployés ou encore du matériel, comme la pose de caméras de surveillance », indique la source, qui exclut l’existence de groupes organisés qui s’entraînent en territoire libanais, notant cependant qu’il « y a quelques Libanais qui se battent en Syrie ».


En ce qui concerne le travail des ressortissants syriens, les journaliers peuvent depuis toujours travailler au Liban sans permis de travail. Ce sont seulement ceux qui travaillent dans des usines, des entreprises et des bureaux, les salariés donc, qui ont besoin d’un permis de travail. Au cours des derniers mois, 25 à 30 % des permis de travail octroyés par la Sûreté générale sont destinés à des ressortissants syriens. Des chiffres comparatifs n’existent pas avec les années précédentes.


Cette source autorisée n’exclut pas la possibilité que des ressortissants syriens travaillent au noir auprès de petites entreprises comme des salons de coiffure ou d’esthétique, ou encore de petits restaurants, les patrons préférant les considérer comme des journaliers.


Cette main-d’œuvre syrienne pourrait prendre la place des Libanais non qualifiés. Cela est déjà visible, selon les ONG travaillant dans les bidonvilles de Beyrouth, dans les zones les plus pauvres du pays.
Cela s’applique également aux loyers dans les quartiers pauvres. Selon diverses ONG, des familles libanaises ont été délogées à Bourj Hammoud et Nabaa pour être remplacées par des locataires syriens qui sont prêts à payer cinquante ou cent dollars de plus de loyer mensuel. C’est plus facile pour eux car plusieurs familles partagent le même petit appartement. Ce qui n’est pas de mise auprès des familles libanaises, même les plus démunies.
« On s’attend que la crise en Syrie soit difficile et longue. Le Liban ne peut pas venir seul à bout du dossier des réfugiés syriens, il faudra que la Ligue arabe et la communauté internationale interviennent pour l’aide », note cette source à la Sûreté générale.


« Nous n’avons pas de solution à ce dossier, nous effectuons certes des prévisions. Contrairement aux autres pays limitrophes de la Syrie, le Liban a décidé de ne pas fermer ses frontières face aux réfugiés. Il faut donc trouver une solution politique », souligne-t-elle en conclusion.

 

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