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À La Une - Révolte

Syrie : de l’aspirine contre les massacres

L’Assemblée générale de l’ONU condamne symboliquement la répression; plus de 71 morts hier.

Pendant que l’armée de Damas s’acharnait sur Hama et Homs, laquelle rendait hommage ces dernières heures aux Hariri père et fils, la diplomatie syrienne s’égosillait à New York pour essayer d’empêcher un vote de l’Assemblée générale de l’ONU. Photos AFP / Reuters / Andrew Kelly (Reuters)

L’Assemblée générale de l’ONU a adopté hier à une large majorité, malgré l’opposition notable, entre autres, de la Chine et de la Russie, une résolution condamnant la répression en Syrie. La résolution, adoptée par 137 voix pour, 12 contre et 17 abstentions, exige du gouvernement syrien qu’il mette fin à ses attaques contre la population civile, soutient les efforts de la Ligue arabe pour assurer une transition démocratique à Damas et recommande la nomination d’un envoyé spécial de l’ONU pour la Syrie. Un texte qui n’aura qu’une portée essentiellement symbolique, l’Assemblée générale n’étant qu’un organe consultatif.

Plusieurs ambassadeurs se sont exprimés hier au Palais de Verre, notamment l’ambassadeur égyptien Maged Abdelaziz qui a « demandé aux pays membres d’envoyer un message clair au peuple syrien en votant en faveur de cette résolution ». L’ambassadeur syrien Bachar Jaafari a naturellement qualifié la résolution de « tendancieuse et déséquilibrée ». Il a ainsi demandé aux membres de l’Assemblée « d’encourager l’opposition syrienne à prendre part à ce dialogue et à se démarquer des groupes terroristes », terme utilisé par Damas pour désigner l’opposition armée.

Même au niveau européen, les divergences se faisaient aussi sentir.

 

Juppé vs Lavrov

Toujours sur le plan diplomatique, le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a relevé hier à Vienne que l’arrêt des massacres en Syrie pourrait permettre à la communauté internationale de s’accorder, alors qu’une rencontre avec son homologue russe, Sergueï Lavrov, n’a pas apporté d’avancée. « Nous pouvons peut-être nous retrouver sur un objectif de très court terme, sur l’arrêt des massacres », a-t-il déclaré. Plus tôt dans la matinée, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, également présent à Vienne, a lui aussi dénoncé les violences en Syrie, demandant à Damas d’ « arrêter de tuer ses propres citoyens » et à l’opposition de « mettre un terme aux violences », pendant que Pékin annonçait l’envoi aujourd’hui en Syrie d’un vice-ministre des Affaires étrangères.

En attendant, la commission des Affaires étrangères du Sénat américain a adopté une résolution condamnant l’usage « brutal et injustifiable » de la force contre les civils par le régime syrien, demandant l’étude de tous les moyens légaux pour juger les responsables de ces actes et appelant la communauté internationale à « étudier les moyens légaux disponibles pour que les responsables du gouvernement syrien rendent des comptes pour les crimes contre l’humanité et les lourdes violations des droits de l’homme » perpétrés en Syrie. Quant à l’UE, elle pourrait aussi revoir à la baisse ses ambitions de durcir ses sanctions contre le régime syrien, certains pays ayant soulevé des réserves en rapport avec leurs intérêts commerciaux avec la Syrie, selon des sources diplomatiques. Enfin, l’Iran a encore une fois mis en garde contre « toute intervention militaire en Syrie, un danger pour la sécurité et la stabilité de la région ».

 

Darwiche et Ghazzawi arrêtés à Damas

Pendant ce temps, deux figures-clés de la révolte contre le régime d’Assad, le journaliste Mazen Darwiche et la blogueuse Razzan Ghazzawi, ont été arrêtées hier par les forces gouvernementales.

« Vers 14h00 heure locale, des membres des services de sécurité ont fait irruption dans le Centre syrien pour les médias et la liberté d’expression à Damas et arrêté Mazen Darwiche (directeur du centre), sa femme et un employé », a annoncé l’opposant Louai Hussein. Treize autres personnes qui se trouvaient dans les locaux de cette association ont été interpellées, dont Mme Ghazzawi, selon l’avocat Anouar el-Bounni. Razzan Ghazzawi, une Américano-Syrienne de 31 ans qui anime un blog sous son vrai nom, avait déjà été incarcérée deux semaines en décembre. Reporters sans frontières a aussitôt demandé leur libération « immédiate », disant craindre « pour (leur) sort et (leur) intégrité physique ».

 

Rejet du projet de Constitution

Parallèlement, les militants prodémocratie ont appelé les Syriens à manifester en masse aujourd’hui, parlant d’une « nouvelle étape » face à la répression de la révolte contre le régime du président Bachar el-Assad, débutée en mars 2011. « Nous ne resterons pas les bras croisés face aux attaques des gangs de la sécurité et des chabbiha (milices fidèles au régime). Dès aujourd’hui, nous allons leur rendre la pareille », ont-ils écrit sur leur page Facebook “Syrian Revolution 2011”. En outre, les opposants syriens ont rejeté en bloc le projet de Constitution proposé par Bachar el-Assad, appelant à boycotter le référendum prévu le 26 février. Pour le Comité de coordination pour le changement national et démocratique (CCCND) basé en Syrie, « il est absolument impossible que l’on participe à un référendum avant l’arrêt des violences et des assassinats ».

 

Homs et Hama : l’acharnement

Sur le terrain, les violences ont fait 41 morts hier, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), alors que la chaîne al-Jazeera parlait de 70 morts, citant des militants prodémocratie. La plupart sont morts lors d’un « massacre » qui a coûté la vie à 19 personnes, dont 11 membres d’une même famille élargie, dans un assaut des forces de sécurité sur la vallée de Sahl Errouj, dans la province d’Idleb, a rapporté l’OSDH, une organisation basée au Royaume-Uni.

De même, les forces du régime ont continué de pilonner Homs, cible d’une offensive particulièrement violente depuis le 4 février. Elles ont aussi attaqué, selon l’OSDH, Hama à la roquette, où quatre civils et 10 militaires dissidents ont été tués dans un bombardement et quatre soldats ont péri dans une attaque d’insoumis. À Deraa, où l’armée a renforcé sa présence, un civil a trouvé la mort tandis que trois soldats ont été tués lors d’affrontements avec des militaires insoumis, selon la même source. Des militants ont en outre fait état d’un assaut de l’armée sur la ville de Deir ez-Zor, ainsi que de tirs nourris dans les rues de la ville.

Quant aux sept ingénieurs iraniens qui avaient été enlevés fin décembre près de Homs, dans le centre de la Syrie, et dont l’Iran avait annoncé la libération le 10 février, ils sont toujours détenus par des groupes armés en Syrie, selon le ministère iranien des Affaires étrangères. Les sept ingénieurs travaillaient dans la construction d’une centrale électrique à Jandar, près de la ville de Homs. Mais selon l’Armée syrienne libre (ASL), ces Iraniens étaient en fait des militaires.

Enfin, le patron du renseignement américain, James Clapper, a déclaré que les récents attentats commis à Damas et Alep avaient vraisemblablement été commis par la branche irakienne d’el-Qaëda, qui a, selon lui, infiltré les forces de l’opposition.

 

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