Quand on croit à la paix, à l'équilibre des forces, au dialogue, au respect des uns envers les autres et réciproquement, on ne peut pas déployer ses armes et ses hommes, montrer ses biceps et autres pectoraux, et en même temps tenir des propos qui se veulent rassurants. Il y a dans ce mélange toute une hypocrisie aussi bien politique que militaire et qui, à terme, ne peut que mener à une catastrophe. L'Otan est en train de se déployer encore plus vers l'est et en nombre, comme si le conflit russo-ukrainien, toujours en cours, ne suffisait pas pour que la leçon soit apprise.
La Pologne et les pays baltes, la Lituanie, l'Estonie et la Lettonie, dont les armées sont, certes, très faibles, ouvrent grandes leurs portes à l'Otan et ses troupes, qui s'y engouffrent allègrement, au mépris des risques malheureusement très probables qui pourraient en découler. On peut comprendre que ces pays aient toujours eu une grande méfiance envers le grand méchant loup ou plutôt envers l'ours russe, souvent à juste titre, mais ont-ils été bien conseillés ? Leur a-t-on dit que la surenchère était très mauvaise conseillère ? Que l'Otan n'était pas une association d'enfants de chœur ? N'ont-ils pas eu vent du dicton libanais mondialement connu « Hadane bi jibe el-deb la karmo ? » (Fait-on entrer le loup dans la bergerie ?).
Ces pays doivent gagner le respect que leur doit la Russie autrement que par la confrontation, et en même temps, la Russie doit lâcher du lest vis-à-vis de ses anciens satellites ; faire appel à l'Otan aux portes de l'ancienne grande et sainte Russie est une grave erreur qui pourrait coûter des vies.
Ce n'était pas anodin qu'en 1966 le général de Gaulle, l'un des plus grands patriotes français, ait tenu à ce que la France sorte de l'Otan, et non moins anodin que Nicolas Sarkozy, l'un des plus grand atlantistes français, l'ait fait réintégrer en 2007. Nous vivons des temps incertains, nous sommes témoins de tellement de chaos – d'une montée de l'intégrisme et de l'extrémisme, d'une Europe qui se cherche encore quand elle pensait avoir trouvé le bon chemin, d'une Amérique qui pourrait basculer dans une autarcie autant économique que politique, et témoins encore d'une Russie qui est à la recherche de sa grandeur et de sa sainteté perdues mais qu'elle ne retrouvera pas par la seule force de son Armée rouge – qu'une Otan belliqueuse ne ferait qu'accentuer ce climat guerrier.
Il ne faut surtout pas, pour autant, fermer les yeux sur les actions russes, non moins guerrières et souvent plus discrètes ; mais dresser un bloc contre un autre bloc ne pourra, à terme, qu'envenimer les relations Est-Ouest et nous mener à des situations extrêmes dans lesquelles l'irrécupérable ne sera plus récupérable. Autant une troisième voix qui prône le dialogue et la paix est nécessaire, voire impérieuse pour le Liban, autant des troisièmes voix sont indispensables de par le monde pour atténuer les dissensions, apaiser les rancœurs et privilégier le bon sens.
Serge SCHOULIKA
Cofondateur et ex-président de « La Troisième Voix pour le Liban »
Bel article qui prône plus la 3eme voie plutôt que la 3eme Guerre. Et aussi cet article nous explique comment comprendre ce que le mot CONNIVENCE veut dire . À recommander aux limités du langage .
10 h 42, le 22 juillet 2016