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Moyen Orient et Monde - Éclairage

Syrie : les négociations de Genève en trois points

Pourquoi un régime qui n'avait rien cédé dans les moments où il était le plus faible accepterait-il de négocier avec son opposition alors qu'il a repris l'avantage sur le terrain ? Parce qu'il connaît évidemment la réponse à cette question, l'envoyé spécial de l'Onu en Syrie, Staffan de Mistura, se retrouve dans une position extrêmement délicate à l'heure où débutent les négociations entre le régime syrien et une partie de l'opposition à Genève. Retour sur les enjeux de ces négociations en trois points.

1 - L'évolution du rapport de force sur le terrain
Davantage qu'à Genève I et Genève II, le régime de Bachar el-Assad arrive en position de force à ces nouvelles négociations. Les évolutions récentes sur le terrain sont largement à son avantage, grâce au soutien aérien des avions russes. Les troupes loyalistes, et leurs alliés, ont récupéré les villes de Rabia et de Selma, chassant ainsi les rebelles de la province de Lattaquié. Une province-clé pour le régime, qui était particulièrement menacée par les groupes rebelles avant le début de l'intervention russe le 30 septembre dernier. Dans le Sud, le régime a également repris du terrain en s'emparant de la ville stratégique de Cheikh Miskine, dans la province de Deraa.

Interrogé par L'Orient-Le Jour, un diplomate arabe de haut rang, qui a souhaité garder l'anonymat, estime que « Assad n'est pas en position de vouloir négocier », ajoutant que « les Russes lui ont donné de l'espoir ». À l'initiative sur tous les fronts, le régime syrien semble considérer qu'il peut faire la différence sur le terrain. Plus l'opposition recule et moins il sera prêt à faire des compromis durant les négociations. D'autant plus si les formations considérées comme modérées sont évincées au profit des groupes jihadistes comme le Front al-Nosra, branche syrienne d'el-Qaëda, ou l'État islamique (EI).

(Lire aussi : Tensions entre al-Nosra et Ahrar al-Cham après l'échec d'une offre de fusion)

2 - Les présents et les absents
La présence de « l'opposition de Riyad » aura constitué la principale interrogation de ces négociations. Le Haut Comité des négociations (HCN), coalition réunissant des opposants politiques et des groupes armés syriens, formée en décembre en Arabie saoudite dans la perspective des discussions de Genève, avait conditionné sa participation à la mise en place d'un accès humanitaire, la garantie qu'il soit le seul représentant de l'opposition à Genève et la clarification de l'ordre du jour. Parmi les groupes armés les plus puissants de l'opposition, Jaïch el-islam, très présent dans la banlieue de Damas, a une place de premier choix dans le HCN puisque l'un de ses chefs, Mohammad Allouche, a été nommé négociateur en chef de cette délégation. L'EI, le Front al-Nosra et le groupe salafiste Ahrar el-Cham ne participent pas, quant à eux, aux négociations de Genève.

Sous la pression américaine, le HCN a fini par annoncer hier la présence de sa délégation à Genève. Le chef de la délégation du HCN, Assaad al-Zoabi, a expliqué sur la chaîne Sky News Arabia, basée à Abou Dhabi, que l'opposition a décidé de participer aux pourparlers de Genève après avoir reçu des garanties, notamment des États-Unis et de l'Arabie saoudite, sur l'application des mesures humanitaires prévues par la résolution 2254 du Conseil de sécurité de l'Onu. Cette résolution stipule notamment un arrêt des bombardements des zones civiles et un accès aux localités assiégées. « L'opposition de Riyad était dans l'embarras parce qu'elle s'était engagée auprès de De Mistura à participer à ces négociations. Il leur était très difficile de se rétracter, mais il voulait sauver la face », confie le diplomate arabe.

Une autre délégation, « celle des Russes », représente également l'opposition à Genève. Il s'agit de personnalités tolérées par le régime, comme Haytham Manna, qui préside le Conseil démocratique syrien (CDS). Compte tenu des tensions entre les deux délégations représentant l'opposition, elles seront séparées dans deux salles différentes. « De Mistura ne veut pas prendre la responsabilité de mettre en place une seule délégation, alors qu'il a été nommé pour cela. Il a accepté la présence d'une deuxième délégation sous la pression des Russes, et parce qu'il n'y avait pas de contre-pression américaine. Mais mettre les délégations dans trois pièces différentes, ce n'est pas de la négociation », estime le diplomate.

Les grands absents des négociations de Genève sont les Kurdes du PYD (parti de l'Union démocratique), très présents dans le nord de la Syrie et en première ligne dans le combat contre l'EI. Même s'ils ont le soutien de la Russie et des États-Unis, la Turquie s'oppose à leur présence. « Les Américains ont besoin des Turcs. Je ne les vois pas faire pression sur ce point-là », juge le diplomate.

(Lire aussi : « Si on veut être optimiste, la réunion de Genève a de faibles chances de réussir »)

 

3 - Les enjeux
Les négociations devraient durer plusieurs mois et ont peu de chances d'aboutir à des résultats concrets. La résolution 2254 du Conseil de sécurité de l'Onu exigeait, comme préalable aux négociations, la garantie d'un accès humanitaire, la cessation des attaques contre les civils et la mise en place d'un cessez-le-feu concomitant au processus politique. « De Mistura n'a rien dit là-dessus, il n'a fait aucune référence à Genève I. Il sait bien qu'il ne va pas pouvoir mettre en pratique ce qui rend les négociations crédibles. Il insiste sur la mise en place d'un processus davantage que sur de réelles négociations. Et c'est un processus sans vision, comme au Yémen », explique le diplomate.

Selon la feuille de route décidée par les puissances extérieures au conflit, le processus de transition devrait durer 18 mois et aboutir à des élections démocratiques. L'opposition de Riyad souhaite qu'un gouvernement de transition, doté des pleins pouvoirs, soit mis en place pendant cette période. Il souhaite également avoir la garantie que M. Assad ne pourra pas se présenter à l'issue de cette période. Aucun de ces deux souhaits n'est pour l'instant en mesure d'être réalisé. Le secrétaire d'État américain, John Kerry, aurait même fait comprendre à l'opposition que M. Assad pourrait se représenter au terme de cette période de transition.

« On est passé de l'idée d'un gouvernement de transition, doté des pleins pouvoirs, à l'idée d'un gouvernement d'union nationale, selon la volonté des Russes. Mais dans un gouvernement d'union nationale, Assad peut nommer dix ministres de l'opposition de son choix sans ne rien céder de son pouvoir. Le gouvernement d'union nationale peut se créer dans la logique même du système actuel alors que la structure de gouvernance transitoire visait à délégitimer le régime », analyse le diplomate qui admet avoir « peu d'espoir » concernant ces négociations.

 

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Pourquoi un régime qui n'avait rien cédé dans les moments où il était le plus faible accepterait-il de négocier avec son opposition alors qu'il a repris l'avantage sur le terrain ? Parce qu'il connaît évidemment la réponse à cette question, l'envoyé spécial de l'Onu en Syrie, Staffan de Mistura, se retrouve dans une position extrêmement délicate à l'heure où débutent les...

commentaires (5)

Mais le pire pour lui, sera que les Sains Syriens finissent par le choper pour essuyer le Sol syrien Sain avec !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

12 h 39, le 30 janvier 2016

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Commentaires (5)

  • Mais le pire pour lui, sera que les Sains Syriens finissent par le choper pour essuyer le Sol syrien Sain avec !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    12 h 39, le 30 janvier 2016

  • Dans tous les cas il finira, au pire des cas, comme Kadhafi. Au mieux, en Mongolo-sibérie !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    11 h 51, le 30 janvier 2016

  • On peut déjà constater une chose, et je serai le seul à le dire s'il le faut , on est loin très loin des discours des 1er jours du complot, vous savez celui qui disait démocratie, non à Bashar le héros, l'avenir de la Syrie avec Bashar ne sera pas possible, les forces démocratiques vont l'emporter en 2 semaines etc....... On a beau rôle de crier aujourd'hui que de toute façon on verra ceci ou cela pour finir comme le renard et les raisins, toujours est il que ce groupe de comploteurs forme des bensaouds des occicons et d'Israël se retrouve comme gros Jean par devant. Et la leçon qui sera retenue est qu'on ne badine pas avec les résistances, même si on décide de brûler un pays , un peuple , une nation. Après avoir fait la fine bouche , les opposants ( chose qui reste à déterminer ) viendront constater leur échec et ne se contenteront que de ce qu'on voudra bien leur donner comme l'os qu'on jette à un chien .

    FRIK-A-FRAK

    09 h 43, le 30 janvier 2016

  • LES DERNIERS ACQUIS DU REGIME FONT PARTIE DE L,ENTENDEMENT (CONNIVENCE) DES DEUX GRANDS POUR AMENER TOUT LE MONDE A LA TABLE DES NEGOCIATIONS. RIEN QU,A VOIR L,ATTITUDE DE KERRY ON LE COMPREND. CHANGEMENT DEMOCRATIQUE IL Y AURA INEVITABLEMENT QUE CE SOIT AUJOURD,HUI OU DEMAIN... LE JEU VA TOURNER AUTOUR DES POURCENTAGES... RIEN QU,UN PETIT CHANGEMENT VERS LA DEMOCRATIE ET C,EST LE PEUPLE SYRIEN QUI REMPORTE LA VICTOIRE... LES ARMES ET LES ACQUIS TRES LIMITES... ON NE CONTROLE TOUJOURS PAS PLUS QUE MAXIMUM 25% DU TERRITOIRE... N,Y JOUERAIENT QU,UN ROLE TERTIAIRE... LE CHANGEMENT VERS LA DEMOCRATIE MARQUERA LA VICTOIRE DU PEUPLE SYRIEN QUI L,AURA IMPOSE PAR SES SACRIFICES... SINON, C,EST LE SPECTRE DES DIVISIONS QUI PLANERA SUR TOUTE LA REGION !!! ON IGNORE ENCORE LES DETAILS AGREES DANS L,ENTENDEMENT DES DEUX GRANDS SUR LE YALTA SYRIEN... UNION OU DIVISION ?

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 07, le 30 janvier 2016

  • Syrie : les négociations de Genève en trois points SUREMENT DES POINTS NOIRS ET DES LIGNES ROUGES DE .....SANG DESSINEES/TRACEES PAR LE MARQUIS DE MYSTOURA

    Henrik Yowakim

    04 h 51, le 30 janvier 2016

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