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Cinema- - Exposition

Abboudi Abou Jaoudé, en haut de l’affiche

Le collectionneur offre à voir plus de 200 anciens posters du cinéma libanais lors d'une exposition au Yacht Club et propose 50 ans d'archives dans un livre sublime mais peu explicatif.

L’affiche de « Safar Barlik » « (« La mobilisation forcée »), film réalisé par Henry Barakat en 1967.

Sa collection est inestimable. Près de 900 affiches, dont 500 du cinéma égyptien et 250 du cinéma libanais. L'addiction d'Abboudi Abou Jaoudé, libraire depuis plus de 20 ans à Hamra et passionné de cinéma, a un coût, mais il ne préfère pas trop y penser. « J'ai déjà pris des avions seulement pour aller chercher une dizaine d'affiches au Maghreb, j'ai parcouru le Moyen-Orient pour ça. Mais c'est devenu comme un puzzle pour moi, quand vous le commencez, vous voulez le finir », se justifie l'homme au crâne dégarni. Après quatre décennies de recherches, il a accumulé des affiches et des photos en provenance de Syrie, d'Irak, de Tunisie, d'Algérie ou encore du Maroc.

À l'occasion de la sortie de son ouvrage Tonight, Cinema in Lebanon : 1929-1979, Abboudi Abou Jaoudé présente 200 de ses affiches libanaises à la galerie du Yacht Club (Zaituna Bay), aidé par la Fondation Liban Cinéma et en collaboration avec BankMed. Son exposition baptisée Haza el-Masa' plonge le spectateur dans des temps oubliés, à l'époque fameuse du cinéma local. Les visages familiers de Sabah, de Fayrouz, de Samira Toufic et de tous les autres illuminent les affiches conservées dans la plus grande rigueur. Parmi celles exposées, ses deux préférées sont immenses et font la promotion de Biyya'el Khawatem (« Le vendeur de bagues ») en 1964 et Safar Barlik (« La mobilisation forcée ») en 1967, toutes deux fabriquées en Italie.
Le libraire stocke quelque 20 000 ressources cinématographiques consciencieusement dans un entrepôt attitré plongé à 16 ou 17 degrés Celsius afin de les préserver de la chaleur. Lorsqu'il les nettoie – en les frottant doucement avec un autre papier – il enfile calmement un masque et des gants. Aussi, les affiches et images sont disposées à plat, hors de question de les plier.

Remuer ciel et terre pour la perle rare
L'homme de 57 ans a choisi de consigner tout cela dans un ouvrage afin de tenter d'apporter un éclairage chronologique exact sur les films du Liban des années 30 jusqu'aux années 70. « Beaucoup se trompent à propos des dates des films libanais, donc j'ai essayé d'y voir plus clair grâce à mes archives. » Il ne s'agit pas d'un « ouvrage encyclopédique » précis sur chacun des films qui ont traversé le siècle, mais de mettre en forme un immense travail d'archivage. Affiches, photos, magazine, journaux, rassemblés autour de dizaines de films méthodiquement et patiemment, l'ouvrage de près de 500 pages est le résultat d'un passionné capable de remuer ciel et terre afin de trouver la perle rare.

Le livre s'ouvre avec les photos en noir et blanc, des premiers films tournés au Liban, Les Aventures d'Élias Mabrouk et Les Aventures d'Abou Abed, réalisés en 1929 et en 1931, sur la place des Martyrs et sur la corniche. Il court jusqu'au début de la guerre, avec les films des Égyptiens Henry Barakat et de Atif Salim. C'est aussi à ce moment-là qu'Abboudi Abou Jaoudé commence à collectionner les affiches. La première qu'il met de côté est étonnamment un poster italien : celui du western spaghetti For a few dollars more (Pour quelques dollars de plus) avec Clint Eastwood.
Sa passion pour le cinéma est encore plus lointaine. « Je devais avoir six ans lorsque j'ai vu mon premier film. J'habitais à Bourj Hammoud, où il y avait plusieurs cinémas populaires qui fonctionnaient très bien. Après avoir été exploités dans la capitale, les films étaient diffusés en périphérie de Beyrouth dans laquelle habitaient nombre de familles qui venaient de la montagne comme la mienne », se rappelle le libraire.

Rêver l'humanité
Aujourd'hui encore, il se déplace toujours dans les salles obscures, mais n'éprouve plus le même plaisir. « Les rebondissements et les fusillades s'enchaînent tellement vite que je n'ai plus le temps de m'intéresser à l'humanité issue des personnages », déplore-t-il, tout en signalant qu'il apprécie l'inventivité de la saga Star Wars.
« Les films permettaient de rêver, d'avoir l'impression d'être à la place des personnages à l'écran, de ressentir leurs joies et leurs histoires d'amour. On pouvait se projeter dans le futur ou plus simplement penser à des histoires positives », raconte-t-il. Abboudi Abou Jaoudé aimerait recevoir des fonds publics afin que le large pan du cinéma libanais – et du Moyen-Orient – qu'il a conservé jusqu'ici soit exposé et entretenu dans un institut ouvert au public. « Les générations futures ne doivent pas oublier comme nous avons été heureux grâce à ces films qui font partie de notre histoire », ajoute-t-il encore. Son ouvrage Cinema in Lebanon participe aussi à garder une trace de ce patrimoine irremplaçable.

Exposition à la galerie du Yacht Club, Zaituna Bay, jusqu'au 22 décembre, de 16h à 21h. L'ouvrage « Cinema in Lebanon : 1929-1979» (100 dollars) est disponible à la galerie et à la bibliothèque du Metropolis.

 

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