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Économie - Interview

« Les femmes sont de très bonnes clientes pour les banques »

Directrice générale adjointe à la BLC Bank et présidente du conseil d'administration de l'Alliance bancaire mondiale pour les femmes en septembre, Tania Moussallem expose à « L'Orient-Le Jour » le potentiel que peut représenter la cible féminine pour le marché bancaire.

Photo DR

Vous avez été nommée à la tête du conseil d'administration de l'Alliance bancaire mondiale pour les femmes (GBA en anglais) en septembre dernier. Quel est le rôle de cette organisation et quels sont les principaux axes de votre politique ?
La GBA regroupe 46 banques à travers le globe, qui opèrent dans 135 pays et souhaitent participer à l'émancipation financière des femmes. Ces banques ont accès à 26 millions de femmes dans le monde à qui elles peuvent faire des prêts ou faire fructifier leur richesse. L'économie a tout à gagner en encourageant l'égalité économique entre les hommes et les femmes. Par exemple, un rapport publié en septembre dernier par le cabinet de conseil McKinsey a calculé que si les femmes étaient aussi actives économiquement que les hommes dans le monde, cela représenterait un gain de 28 mille milliards de dollars, soit l'équivalent de 26 % d'augmentation du PIB mondial.
Depuis que je suis en charge du conseil d'administration de GBA, nous avons décidé d'élargir le nombre de services pour les femmes, en encourageant activement les compagnies d'assurances par exemple à en devenir membres. Les candidats doivent déjà avoir un programme dédié aux femmes, ou l'intention d'en développer un dans l'année qui suit. Nous partageons ensuite notre savoir, à travers des études de cas, des mentorats, ou encore lors de notre sommet annuel.

 

(Lire aussi : Les microentreprises, un vecteur d'émancipation des femmes rurales au Liban)

 

Pourquoi la BLC Bank a-t-elle décidé d'intégrer la GBA ?
Lors de notre intégration à la GBA en 2011, nous avons commencé à élaborer un programme spécifique pour les femmes. Cela nous permettait de nous différencier dans un secteur très concurrentiel et d'avoir accès à un marché à fort potentiel que les autres banques libanaises n'avaient pas encore exploité.
En effet, les femmes constituent de très bonnes clientes pour les banques. Elles s'endettent moins et prennent moins de risques. Au sein des banques membres de l'association, les montants des prêts accordés aux PME sont inférieurs de 40 % en moyenne lorsque les sociétés sont dirigées par des femmes. De même, les taux de défaut sur les prêts accordés sont supérieurs d'environ 30 % chez les hommes par rapport aux femmes. Au Liban, l'institut des finances Basil Fuleihan a publié une étude, « Les Libanais et l'argent », qui montre que les femmes planifient mieux leurs finances. Par exemple, à la question : « Avez-vous l'habitude d'établir un budget ? » 58 % des femmes répondent « oui » contre 46 % d'hommes. Et 54 % de femmes répondent positivement à la question : « Savez-vous combien vous avez dépensé au cours de la semaine écoulée ? » contre seulement 43 % d'hommes.


(Lire aussi : Un programme permet à trente entrepreneuses de s'émanciper en développant leur société)

 

Dans quelle mesure votre offre de produits permet-elle d'améliorer l'accès aux financements pour les femmes ?
Notre programme Women Empowerement Initiative (WE Initiative) débuté en 2012 a deux volets, l'un financier, l'autre non, car, pour réussir, les femmes ont besoin d'un vrai écosystème.
Côté financier, il existe un déficit dans la loi libanaise : une femme ne peut pas ouvrir un compte pour ses enfants mineurs, seul son mari peut le faire. Nous sommes une des rares banques qui leur permet d'ouvrir un compte fiduciaire pour leurs enfants mineurs auquel elles ont accès comme un dépôt classique, via des dispositions mises en place il y a quelques années. Autre exemple : il est traditionnellement difficile pour les femmes entrepreneurs d'accéder au crédit car leur banquier leur demande souvent un bien immobilier en garantie. Or, les femmes ont peu accès à la propriété du fait de lois liées à l'héritage qui les désavantagent par rapport aux hommes. Nous leur proposons donc des prêts axés sur la performance de leur entreprise sur les deux dernières années, et non sur leur parc foncier. Résultat, depuis 2012, les prêts octroyés aux femmes de manière individuelle ou professionnelle (si elles sont à la tête d'une PME) ainsi que les dépôts bancaires féminins ont une croissance sensiblement supérieure à celle des hommes dans le portefeuille de la BLC. Nous nous rapprochons de notre but initial lors du lancement de la WE Initiative, qui était d'arriver à 15 % de prêts accordés aux femmes au total.
Concernant le volet non financier, nous avons mis en place des sessions de formation spécifiques pour les femmes entrepreneurs. Et, sur le plan managérial, nous encourageons également l'accès des femmes aux postes de gestion, et leur proposons par exemple de prendre deux mois supplémentaires de congé maternité à temps réduit, option qu'elles choisissent toutes.

 

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