La première réunion du Conseil des ministres après la vacance au niveau de la présidence de la République a montré l'existence d'un nouveau problème à ajouter aux nombreux autres qui existent déjà au Liban. Ce problème se résume ainsi : comment va se faire l'exercice du pouvoir et qui va bénéficier des prérogatives déjà limitées du chef de l'État ?
Des sources ministérielles ont ainsi confié que les débats au sein du Conseil des ministres étaient assez mouvementés, les ministres du Courant patriotique libre estimant que l'on ne peut pas faire comme si de rien n'était et ignorer la vacance à la tête de la République, comme cela s'est passé entre novembre 2007 et mai 2008, lorsque le gouvernement de Fouad Siniora, amputé d'une des composantes essentielles de la société libanaise (la communauté chiite) a pris seul des décisions dont le Liban continue à pâtir jusqu'à présent. Pour les ministres du CPL, prendre des décisions importantes en l'absence d'un président de la République et sans prendre en considération l'opinion des ministres chrétiens est contraire à l'esprit du pacte national et au partage des pouvoirs consacré par l'accord de Taëf.
Il s'agit donc désormais de trouver un processus qui respecte l'esprit du pacte et ne donne pas aux chrétiens l'impression d'être marginalisés tout en ne compliquant pas la procédure. L'idée par exemple d'obtenir la signature des 24 ministres formant l'actuel gouvernement pour chaque décision paraît assez difficile dans le sens où elle ralentit le processus de prise des décisions. Certains ministres rejettent ces formules et rappellent que selon la Constitution, trois signatures sont exigées pour une décision ministérielle, celles du chef de l'État, du Premier ministre et du ministre concerné, en plus de celle du ministre des Finances, lorsqu'il est question de dépenses publiques. Ce processus ne prévoit pas le cas d'une vacance à la tête de la République et si, en général, les Conseils des ministres ont tenu jusqu'à présent à éviter de prendre des décisions importantes en l'absence du président, rien ne les empêche théoriquement de le faire. Le Premier ministre Tammam Salam cherche de son côté à trouver un compromis. Tout en comprenant les appréhensions des chrétiens et surtout celles du patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, de voir le pays fonctionner normalement en l'absence d'un président, il veut éviter une paralysie du gouvernement. Ses proches évoquent la possibilité d'accorder à chacun des 24 ministres un droit de veto, tout en adoptant le processus normal des trois signatures. Le débat devrait en tout cas se poursuivre à la prochaine réunion du gouvernement, demain.
Mais au-delà de la dimension juridique et constitutionnelle de ce débat, le véritable enjeu porte une fois de plus sur le partage des pouvoirs et le rôle des chrétiens au sein de l'État libanais. Certaines parties politiques sont ainsi convaincues que les camps politiques chrétiens en font trop, parce qu'ils ne pensent qu'à faire de la surenchère chrétienne, mais, en même temps, en remuant les équilibres actuels, ils jouent avec le feu. Selon ces parties, dans une période aussi sensible et instable dans la région notamment, il est risqué de réveiller les démons du passé et de rouvrir ainsi le dossier des pouvoirs de chaque communauté au sein de l'État. Pour ces parties, au lieu de chercher à récupérer des pouvoirs par le biais du blocage du Conseil des ministres, les chrétiens feraient mieux de se rendre au Parlement et d'élire un nouveau président de la République. Ce qui réglerait de facto ce faux problème.
Mais les sources du CPL considèrent qu'il s'agit là d'une fausse approche. Le Liban se trouverait, selon ces sources, face à une chance unique d'améliorer la position des chrétiens au sein de l'État à un moment où il est important de rassurer les chrétiens de la région. De plus, toujours selon ces sources, les chiites et les sunnites du Liban sont aujourd'hui convaincus de l'importance du rôle des chrétiens, à la fois comme force tampon entre eux, mais aussi comme catalyseurs et pont de dialogue entre ces deux communautés actuellement en conflit larvé. Il serait donc dommage de laisser passer cette occasion et d'élire un président qui n'a pas les outils politiques et parlementaires nécessaires pour être à la hauteur de cette étape, juste par souci de préserver les apparences et de régler le problème dans la forme et non dans le fond.
Les positions restent donc éloignées et les approches divergentes, mais l'élément positif, c'est que les groupes concernés tiennent à maintenir le dialogue entre eux, au point que le chef du courant du Futur ne cache pas, devant ses visiteurs, sa satisfaction de la coopération entre son courant et le CPL...
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La première réunion du Conseil des ministres après la vacance au niveau de la présidence de la République a montré l'existence d'un nouveau problème à ajouter aux nombreux autres qui existent déjà au Liban. Ce problème se résume ainsi : comment va se faire l'exercice du pouvoir et qui va bénéficier des prérogatives déjà limitées du chef de l'État ?
Des sources...
commentaires (5)
CHRÉTIENS, DÉBARRASSEZ-VOUS DE VOS....VAURIENS !!!
LA LIBRE EXPRESSION
12 h 19, le 04 juin 2014