C'est dans une atmosphère de fin de règne que la dernière réunion de la conférence nationale de dialogue s'est tenue hier, pour la dernière fois avant la fin du mandat du président Michel Sleiman (24 mai à minuit), à Baabda.
Cela n'a pas empêché certains des ténors présents d'établir un bref bilan du mandat du chef de l'État et de se monter élogieux à son égard. Ainsi, le chef du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt, a vanté l'art de désamorcer les tensions dont M. Sleiman a fait preuve tout au long de son mandat. « L'histoire lui rendra justice, a encore dit M. Joumblatt, et la déclaration de Baabda est tout à l'honneur de son mandat. »
Fouad Siniora et Nagib Mikati ont également été de ceux qui ont rendu hommage au sens de l'État et à l'impartialité de M. Sleiman et à son sang froid dans les grandes crises, notamment en 2009 lors de l'offensive israélienne contre Gaza, ainsi que pendant les élections législatives (2009) et municipales (2010).
Les absents
En l'absence de Michel Aoun, des Forces libanaises et du Hezbollah, il était difficile d'imaginer que l'on parlât de stratégie de défense. Toutefois, l'échéance présidentielle était omniprésente, tandis que Nabih Berry désamorçait publiquement la bombe fumigène lancée la veille par le chef de l'État qui avait mis en garde contre une dérive institutionnelle qui conduirait certains à demander la convocation d'une Constituante. M. Berry a jeté l'ancre, en annonçant que son camp ne reniera pas l'accord de Taëf, ni la fameuse parité islamo-chrétienne ni la convivialité. Cette assurance solennelle devait figurer dans le communiqué final de la séance.
Toutefois, le chef de l'État a lançé un nouveau cri d'alarme, mettant en garde contre les risques inhérents au vide institutionnel et à l'absence d'un chef à la tête de l'État. La veille, il avait indiqué en particulier que les prérogatives présidentielles ne pourront être prises entièrement en charge par un cabinet divisé comme l'est le cabinet d'entente présidé par Tammam Salam et dénoncé l'usage du quorum comme arme politique.
Étaient absents de la dernière séance de dialogue à Baabda : Saad Hariri, Farid Makari, Mohammad Safadi, Michel Aoun, Samir Geagea, Mohammad Raad, Sleimane Frangié, Talal Arslan et Assaad Hardane. Des milieux politiques ont affirmé qu'en s'absentant, M. Aoun entendait protester contre les propos tenus la veille par M. Sleiman à Jbeil.
Mouvement de redressement
Amine Gemayel, l'une des personnalités les plus sensibles à l'absurdité d'un laisser-aller qui conduit droit au vide, ou au mur, a annoncé hier que les Kataëb lanceraient à partir d'aujourd'hui une espèce de mouvement de redressement. En un premier – et dernier? – temps, ce mouvement consisterait en des contacts décomplexés avec toutes les parties prenantes sur la scène locale. Et peut-être quelques diplomates. Objectif : empêcher l'effondrement d'une République gouvernée par des muets qui ne prennent jamais langue les uns avec les autres. De fait, M. Gemayel entamera ses contacts aujourd'hui, après avoir facilement obtenu hier, à Baabda, les rendez-vous correspondants. Pour des raisons de sécurité, le calendrier des contacts n'a pas été divulgué.
Selon Sélim Sayegh, la fameuse phrase de Goethe, « le but c'est le chemin », s'applique à cette démarche de secours visant à sortir la République de sa mortelle léthargie. Il s'agirait d'enclencher une dynamique qui, même si elle revêt un caractère sensiblement béotien, aurait au moins le mérite de réveiller l'imagination endormie de la caste politique. Et ce, indépendamment du fait que M. Gemayel figure parmi le quatuor, quintette ou sextuor de candidats « forts » qui ont peu de chances d'être élus, même si certains d'entre eux osent continuer à l'espérer.
(Lire aussi : Amine Gemayel : La priorité est au sauvetage de la République)
Berry et la loi électorale
La plupart des personnalités présentes à Baabda ont défendu hier l'idée d'une échéance présidentielle réalisée dans les délais constitutionnels. L'intervention la plus significative à cet égard a été celle du président Sleiman, qui a repris les principales idées de son discours de la veille, demandant aux députés de s'interdire d'user du quorum comme d'une arme politique.
Pour sa part, M. Berry a fait part de la possibilité évoquée par certains de procéder à des tours de scrutin successifs, de manière à permettre à une candidature de se dégager plus nettement du lot, selon un scénario imaginé par le patriarche Béchara Raï. Toutefois, conscient que le quorum risque d'être torpillé à nouveau, le président de la Chambre ne s'en est pas tenu là et a soulevé l'importance de l'adoption d'une nouvelle loi électorale susceptible d'empêcher une nouvelle prorogation du mandat de la Chambre, qui expire en novembre 2014.
Poursuite du dialogue
Le pouvoir étant continuité, Michel Sleiman et ses hôtes sont convenus que le dialogue entamé sous le mandat actuel devra se poursuivre, avec les maîtres mots : dialogue, stabilité, modération, pacte d'honneur verbal, sans oublier la déclaration de Baabda.
L'état de la sécurité a également été l'un des sujets abordés en conférence de dialogue, ainsi que le miracle, in extremis, du plan de sécurité qui a réussi à relativement pacifier Tripoli et d'autres régions troublées de la Békaa et de la frontière est. « Le mérite en revient au sang-froid et au sens national du chef de l'État », devait dire à ce propos Walid Joumblatt.
Entre 11 heures et 13 heures, la conférence de dialogue de Baabda s'est tenue sur fond d'incendies de forêt, de fumées et de cendres emportés par le vent chaud. Le feu a même atteint l'un des parkings de la présidence de la République, dont les voitures ont dû être déplacées, mais il a été facilement maîtrisé.
Le communiqué final de la conférence a été considéré comme devant constituer le chantier de travail d'où le nouveau président devra s'élancer. Le texte devait faire figurer le respect et la poursuite de l'application des conclusions du Groupe international d'appui au Liban dans le renforcement de la stabilité et celui de l'armée, sans oublier les bases de l'économie nationale et les efforts pour régler le problème des réfugiés syriens. De même, les présents se sont engagés à respecter les échéances constitutionnelles présidentielle et législative et à les accomplir dans les délais légaux.
La séance de dialogue ne devait pas s'achever sans que le chef de l'État ne marque le coup contre les propos inconscients d'un chef militaire iranien.
commentaires (6)
CORRECTION ! Merci : "Quelques facteurs éhhh Campagnards libanais(h) Niais, expliquent les conduites décevantes de ces Malsains en huit dévergondés...."
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
01 h 24, le 08 mai 2014