Au bonheur de Yaya, que notre collaborateur Zahi Haddad vient de publier aux éditions Tamyras (et qu'il dédicacera demain mercredi 7 mai, de 17h à 21h, au restaurant Hangout*), est un récit autobiographique dans lequel ce quarantenaire libano-suisse égrène ses souvenirs familiaux, évoque son parcours d'enfant exilé, les déchirements et les richesses de sa double identité, sa recherche de sérénité et son attachement à la terre natale. Tout en retraçant, en parallèle, la saga proche-orientale de ses aïeux depuis le XIXe siècle jusqu'au début du XXe.
Un livre très personnel ! Et en même temps cette quête de racines est commune à toute une génération « d'enfants de la guerre » ayant grandi entre le Liban et l'étranger et qui se retrouvent tiraillés entre deux pays, deux cultures, des souvenirs dispersés...
Né au Liban quelques années avant la guerre, ayant grandi en Suisse, Zahi Haddad a ressenti en 2010 la nécessité d'abandonner sa vie bien réglée sur les calmes rives lémaniques pour se (re)plonger dans les turbulences beyrouthines à la recherche de son passé. Sans doute aussi de son avenir. Car en revenant sur les traces de son enfance, en mettant ses pas dans ceux de ses parents et grands-parents, en entamant cette sorte de pèlerinage familial, le jeune homme inquiet fera aussi un apaisant retour sur soi.
« Je suis au Liban depuis plusieurs semaines et je songe à ce que je suis venu y faire. Prendre du recul et me remettre en question, avant toute chose. Ce qui veut dire renouer avec ma famille et ce qui la constitue, tenter de comprendre ce pays insaisissable », écrit-t-il, avant de poursuivre : « (...) Je me demande d'où je viens et pourquoi j'y reviens avec tant d'acharnement. Pourquoi ne pas juste vivre ma vie dans mon cocon suisse, sans plus de questionnements ? Probablement parce que, à l'instar du Liban, je ne suis ni oriental ni occidental. Je suis hybride. Un individu qui aime ce que son humanité multiple lui apporte et la façon dont elle le perturbe. »
Il en tirera un premier roman biographique, donc, à travers lequel il raconte différentes histoires et se raconte. Construit par alternance de souvenirs d'enfance personnels et de saga familiale, son récit portraiture (sur le mode impressionniste) des destinées individuelles prises dans les rets des événements du Proche-Orient au cours des deux derniers siècles. Et met en scène sa lignée partie du Liban et la Syrie vers la Suisse, en passant par l'Égypte, la Palestine et le Kuwaït.
Émouvant témoignage d'un grand sensible sur la force des liens familiaux et de la transmission des valeurs, son Au bonheur de Yaya rend aussi un hommage, savoureux, à la cuisine libanaise. Car si Zahi Haddad a la mémoire des siens, il a aussi celle – gourmande – de ces plats typiquement libanais que lui concoctait sa mère, sa complice, sa si tendre « Yaya ». Et qui faisaient leur bonheur
partagé !
*Restaurant, rue Nahr Ibrahim, Gemmayzé.