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La loi électorale - Analyse

Un scénario électoral de compromis pour éviter les batailles: 60-60-8 ?

Les prochaines élections législatives restent le principal souci des deux camps politiques. Chaque développement devient ainsi matière à polémique, et les deux camps sont prêts à faire feu de tout bois pour gagner du terrain sur l’autre. La tension ne cesse de monter, et ce ne sont pas les prochaines retrouvailles dans le cadre de la cérémonie officielle pour la fête de l’Indépendance ou autour de la table de dialogue à Baabda qui risquent de modifier cette situation. Même le processus de réconciliation a montré ses limites, la rencontre entre Hassan Nasrallah et Saad Hariri ne les ayant pas empêchés de rester chacun sur ses positions politiques, alors que la rencontre entre Nasrallah et Joumblatt se fait attendre et que la réconciliation interchrétienne a été reportée jusqu’après les élections. C’est comme si chaque partie avait décidé de laisser passer les législatives avant de décider jusqu’où elle peut aller dans les concessions. D’ailleurs, aussi bien Hassan Nasrallah que Saad Hariri ont tenu à préciser à leurs alliés d’abord et au Liban tout entier ensuite que l’apaisement sur le terrain ne sera pas suivi d’une alliance électorale, une sorte d’accord quadripartite bis, le premier ayant permis l’élection de l’actuel Parlement.
À près de six mois des élections, les deux camps sont donc décidés à mener la bataille jusqu’au bout pour aboutir à un vainqueur et à un vaincu, la victoire de l’un des deux camps permettant de définir la politique du pays pour les quatre prochaines années.
Mais ce scénario de l’extrême fait peur à plus d’une partie locale, régionale et internationale. D’abord parce qu’il signifie que la tension ne cessera de monter au cours des prochains mois et que la polémique risque de s’envenimer avec l’approche de l’échéance électorale. Les parties concernées ont beau affirmer avoir tourné la page de la violence sur le terrain, les dérapages sont toujours possibles et des incidents se produisent régulièrement dans différentes régions du pays, montrant que la situation globale reste fragile. Ensuite, l’éventualité d’une victoire de l’actuelle opposition parlementaire déplaît fortement aux Occidentaux et à certains pays arabes, qui estiment qu’une telle victoire serait de nature à renforcer l’influence iranienne au Liban. Le numéro 2 des services de renseignements égyptiens, le général Qannaoui, qui a passé quelques jours récemment au Liban, aurait d’ailleurs axé ses discussions avec ses interlocuteurs de tous les bords politiques et confessionnels sur les moyens de contrer « l’influence iranienne » au Liban, et donc d’empêcher l’alliance Hezbollah-Amal-CPL de « faire la loi » au Parlement.
C’est ainsi que l’idée d’un bloc centriste trouve de plus en plus de partisans. Selon des sources diplomatiques arabes, il serait ainsi question de travailler sur le scénario suivant : soixante députés pour l’actuelle majorité, soixante députés pour l’actuelle opposition et huit députés pour le bloc centriste qui serait rattaché au président de la République. Ce dernier a, de l’avis de ces sources, accompli jusqu’à ce jour un rôle parfait dans la recherche des compromis et dans la volonté de contourner les obstacles qui ne cessent de surgir et de remettre en cause le fragile équilibre actuel. Le projet n’est pas irréalisable. Dans les régions à dominante chiite, les résultats du prochain scrutin sont tranchés d’avance en faveur de l’alliance Hezbollah-Amal, et dans les régions à dominante sunnite et druze, ils sont tranchés en faveur de l’alliance Hariri-Joumblatt. Dans certaines circonscriptions, la tendance est au compromis, notamment dans la seconde circonscription de Beyrouth et à Aley. Finalement, les batailles n’auront lieu que dans quelques circonscriptions à majorité chrétienne comme, par exemple, Batroun, Koura, la première circonscription de Beyrouth et le Kesrouan. Elles portent sur une dizaine de sièges. De plus, certains députés actuels membres officiels de l’alliance du 14 Mars souhaitent effectivement prendre leurs distances avec cette alliance, chacun pour des raisons qui lui sont propres. Le « bloc national » attribué au président de la République leur assurerait ainsi une porte de sortie tout à fait honorable et permettrait d’éviter une victoire de l’un ou l’autre camp. Bref, il serait un compromis commode pour beaucoup de parties. Officiellement, l’opposition considère que les députés qui deviendraient membres de ce bloc seraient arrachés à l’alliance du 14 Mars et ne constitueraient en aucun cas une perte pour l’opposition. Mais officieusement, elle craint qu’il ne s’agisse d’une manœuvre du 14 Mars visant à donner une nouvelle casquette à leurs députés.
De son côté, l’alliance du 14 Mars estime que même s’ils prennent leurs distances avec elle et se rallient au bloc présidentiel, ces députés « indépendants » restent sous son influence. D’autant que le président de la République n’a pas défini une ligne politique sur les grands dossiers qui divisent les Libanais, et le moment venu, les députés du « bloc national » voteront en faveur des convictions qu’ils ont exprimées tout au long des trois dernières années.
C’est dire que l’idée qui paraissait au départ sensée et rationnelle est bien plus complexe qu’on ne le croie et avant même sa formation, les deux camps s’arrachant le « bloc national » du président. Si la décision revient finalement à Michel Sleiman, certaines sources indépendantes pensent qu’il ne fera pas son choix sans avoir bien pesé le pour et le contre, d’autant que l’objectif de la création d’un tel bloc vise à trouver un compromis et à éviter la bataille, non à provoquer une nouvelle crise..
Les prochaines élections législatives restent le principal souci des deux camps politiques. Chaque développement devient ainsi matière à polémique, et les deux camps sont prêts à faire feu de tout bois pour gagner du terrain sur l’autre. La tension ne cesse de monter, et ce ne sont pas les prochaines retrouvailles dans le cadre de la...