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Liban - Liban

A la Chambre, une formalité simple

« Nous ne promettons pas de miracles mais nous ferons de notre mieux pour parer au plus urgent », a dit le PM Salam à l’issue du vote hier. Photo Ibrahim Tawil

Comme prévu, le gouvernement de Tammam Salam a obtenu hier soir la confiance du Parlement : sur les 101 députés qui se sont rendus à la séance en début de soirée (la quatrième du débat de confiance), 96 ont accordé leur confiance au cabinet, contre quatre et une abstention (déjà annoncée, celle du député de la Jamaa islamiya, Imad el-Hout).
La confiance accordée par les blocs représentés au sein du gouvernement Salam a toutefois été assortie de réserves, qui rappellent les principes fondamentaux que chacun s'acharne à défendre et dont la déclaration ministérielle n'a pas réussi à gommer les contradictions.


Ces contradictions se sont exacerbées lors de la séance matinale, au cours de laquelle ont pris la parole tour à tour les députés Khaled Daher, Ahmad Fatfat, Samy Gemayel, Georges Adwan et Hassan Fadlallah.
Les cinq députés, dont seul Georges Adwan, du bloc des Forces libanaises, n'a pas accordé la confiance, ont reflété les faces d'une même réalité qui résume la situation actuelle : les divergences artificiellement contenues sont désormais liées explicitement à l'essence du pacte national.
Marquant la séance matinale par sa présence, le chef du Parti socialiste progressiste Walid Joumblatt a suivi les échanges, la face presque figée, comme accablé par « la décadence politique » qu'il avait décrite dans son dernier éditorial. Il s'était déjà retiré de la séance lorsque le député du Hezbollah Hassan Fadlallah a pris la parole.
« La résistance telle que reconnue par la déclaration ministérielle est au cœur du pacte national et de tous les documents ayant fondé le travail des gouvernements depuis Taëf. » Cette approche a été relayée lors de la dernière séance par le chef du bloc du Hezbollah, le député Mohammad Raad, qui a laissé entendre en soirée que le triptyque armée-peuple-résistance est toujours de mise, puisque « la résistance demeure et notre devoir est de la protéger et de la préserver ».

 

(Lire aussi : Salam : Nous ne promettons pas de miracles, mais nous ferons de notre mieux pour parer au plus urgent)

 

Samy Gemayel et le « droit à la résistance »
« Même si nous n'avons pas la prétention d'occulter l'existence d'avis contraires sur la résistance, nous ne nous fatiguerons pas à convaincre ceux qui peinent à voir le danger israélien », a lancé de son côté Hassan Fadlallah. Il a estimé que l'image de l'État « ancrée dans la mémoire collective est celle d'une autorité faible et émiettée, livrée aux agressions israéliennes (....). Les failles de l'État existent depuis sa naissance, c'est-à-dire bien avant le Hezbollah. »
Au député Kataëb Samy Gemayel, qui a insisté dans son discours sur « la gravité » de la clause consacrant le droit de tous les Libanais à la résistance contre l'occupation israélienne, en ce qu'elle risque de légitimer le port d'armes par quiconque sous le prétexte d'aller combattre l'ennemi, Hassan Fadlallah a lancé une réponse claire : « Quiconque souhaite combattre Israël est le bienvenu sur la scène. Personne ne peut le lui interdire. Le Hezbollah est prêt à le soutenir, mais il doit savoir que combattre Israël ferait de lui une cible potentielle de l'ennemi. »


Interrogé par L'Orient-Le Jour sur la portée de ces propos, le député Kataëb Samer Saadé a repris la position exprimée par son parti et développée par Samy Gemayel : « Nous nous engageons en faveur de l'interprétation donnée à la déclaration ministérielle par le président de la République et le Premier ministre, et toute dérogation à cette explication nous conduira à nous défaire du principe de la solidarité ministérielle. »
Une source ministérielle du 14 Mars, interrogée par L'OLJ, tend toutefois à minimiser la portée de la clause relative au droit à la résistance de tous les Libanais et recadre la mise en garde des Kataëb à ce niveau. La source écarte toute valeur constitutionnelle au principe de solidarité ministérielle, « puisque rien n'empêche un ministre de démissionner quand il le souhaite ». « Sauf qu'une démission des Kataëb laisserait seuls les ministres du Futur au sein du cabinet », ajoute la source, laissant entendre que le discours du parti viserait plutôt le courant du Futur. En effet, la clause controversée serait « sujette à plusieurs interprétations, toutes sans effet direct sur le terrain, puisque quiconque décide – à Dieu ne plaise – de porter des armes le fera, avec ou sans texte ».

 

(Lire aussi : Fatfat rappelle à l'adresse du Hezbollah toutes les clauses de la 1701 qui interdisent les armes illégales)

 

Les FL préconisent une feuille de route
D'ailleurs, le député du Futur Ahmad Fatfat était loin de dissimuler hier son scepticisme quant à l'aboutissement d'un dialogue avec le Hezbollah, quand bien même il a accordé sa confiance au gouvernement. Interrompu plus d'une fois par des députés du 8 Mars, la virulence de ses propos a conduit le président de la Chambre Nabih Berry à lui lancer : « Laisse quand même une marge aux Forces libanaises (qui refusent d'accorder la confiance au gouvernement). » Ce qui n'a manqué de faire rire le député Antoine Zahra, qui se trouvait assis à droite de Nabih Berry.


L'intervention de Georges Adwan a suivi la même méthode adoptée par la députée Sethrida Geagea la veille, consistant à s'adresser directement au Hezbollah, avec à la fois une ouverture et un attachement aux principes ayant motivé le refus des FL de prendre part au gouvernement. Il a préconisé l'élaboration d'une feuille de route commune qui traiterait de « l'approche du conflit arabo-israélien, d'une part et des armes du Hezbollah dans l'équation interne, d'autre part ». « Personne ne peut prétendre être seul à avoir raison, mais ce qui compte c'est de ne pas détenir le monopole des prises de décision », a-t-il ajouté, réitérant la position des FL concernant « l'interdiction à tout Libanais, quelle que soit son appartenance ou sa motivation, à partir combattre en Syrie ».
Pourtant, le député Fadlallah a pris soin de revenir sur l'insertion récente par l'Arabie saoudite d'al-Nosra et de Daech sur sa liste de parties terroristes, afin de justifier, non sans une pointe d'ironie, « le combat du Hezbollah contre les terroristes sur ordre du roi ».

 

(Lire aussi : Siniora : Ce gouvernement est à la fois une chance et un défi)

 

Divergence sur l'armée
Un autre point de divergence a rejailli hier, indicateur de possibles entraves à la marche efficace du prochain cabinet. Alors que Samy Gemayel a posé la question délibérément simpliste et teintée de sarcasme de savoir ce qui empêche « de déployer 200 soldats sur les frontières, à raison d'un soldat par km, équipé de jumelles et d'un talkie-walkie », le député Hasan Fadlallah a relevé pour sa part que « l'armée se trouve parfois dans l'incapacité d'arrêter une personne poursuivie en justice ».
Le député Khaled Daher a critiqué l'attitude « injuste » de l'armée envers les sunnites, à Tripoli et dans le Nord, ce qui lui a valu la réponse quelque peu solennelle de Nabih Berry, applaudie par les députés : « Ton armée a raison, même si elle a été injuste. » L'atmosphère s'est tendue lorsque Khaled Daher a été interrompu par les députés aounistes Ibrahim Kanaan et Hikmat Dib. « Les seules armes légales sont celles mises sous l'autorité de l'État », leur a répondu le député du Nord, pour clore le débat.

 

(Lire aussi : Pharaon : Un gouvernement « de nécessité » et non « de compromis »)

 

L'échéance présidentielle
Un autre point de divergence, qui a également ouvert la voie à une discussion franche, a été en soirée la question de la gestion du dossier des réfugiés syriens. Alors que le député Nicolas Fattouche a refusé d'accorder sa confiance au gouvernement, « faute d'une définition claire de sa politique », il a estimé que « le gouvernement syrien se soucie de l'unité et de la sécurité du Liban et devrait se charger lui-même de ses citoyens au Liban ». Cette approche a été soutenue par le député Ali Ammar, conduisant l'ancien ministre des Affaires sociales Waël Abou Faour à prendre la parole : « Soyons rationnels. Comment aurions-nous pu coordonner avec l'ambassadeur de Syrie sur la question alors qu'il représente le régime responsable du déplacement de 70 % des Syriens au Liban ? »

 

(Lire aussi : Geagea : Nous ferons tout pour empêcher l'élection d'un président du 8 Mars)


Face à ces arguments et leur contraire, le Premier ministre a sagement choisi ses propos à la fin des débats de confiance : « Nous ne promettrons rien dont nous nous savons incapables. »
Le président de la Chambre s'est toutefois engagé, pour sa part, à entamer les contacts nécessaires dès aujourd'hui en vue de réunir le quorum des deux tiers nécessaire à la tenue de la première séance visant à élire le président de la République et à laquelle il peut appeler à partir du 25 mars.

 

Pour mémoire, le bilan de la première séance

 

Lire aussi

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Comme prévu, le gouvernement de Tammam Salam a obtenu hier soir la confiance du Parlement : sur les 101 députés qui se sont rendus à la séance en début de soirée (la quatrième du débat de confiance), 96 ont accordé leur confiance au cabinet, contre quatre et une abstention (déjà annoncée, celle du député de la Jamaa islamiya, Imad el-Hout).La confiance accordée par les blocs...

commentaires (5)

En moutons de Panurge vous avez donné chers parlementaires soumis votre confiance .Applaudissons pour ce gouvernement fiction .

Sabbagha Antoine

14 h 43, le 21 mars 2014

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Commentaires (5)

  • En moutons de Panurge vous avez donné chers parlementaires soumis votre confiance .Applaudissons pour ce gouvernement fiction .

    Sabbagha Antoine

    14 h 43, le 21 mars 2014

  • ESPÉRONS AU VRAI DIALOGUE ET À L'ENTENTE EN COMMENçANT PAR L'ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 05, le 21 mars 2014

  • Le hezbollah est en fait ... la bombe à retardement qui menace cette confiance de façade...

    M.V.

    12 h 45, le 21 mars 2014

  • C'est le Hezbollah qui devrait prendre en charge les réfugiés syriens, lui qui a contribué à leur afflux en milliers et milliers au Liban.

    Halim Abou Chacra

    04 h 55, le 21 mars 2014

  • "Fattouche soutenu par Äléh Ämmâr : Le gouvernement syrien se soucie de l'unité et de la sécurité du Liban et devrait se charger lui-même de ses citoyens au Liban." ! COLLABORATION, quand tu les tiens !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    04 h 16, le 21 mars 2014

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