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À La Une - Conflit

"Il faut écrire sur la Syrie, et pour cela y être. Sinon sur quoi écrire ?"

Témoignages poignants à Paris pour une soirée de soutien aux journalistes otages.

A Paris, les portraits de Didier Francois, Edouard Elias, Nicolas Henin et Pierre Torres, quatre journalistes français enlevés en Syrie en juin 2013. REUTERS/Benoit Tessier

Plusieurs journalistes ex-otages en Syrie sont venus témoigner de leur terribles conditions de captivité lors d'une soirée de soutien aux journalistes français otages depuis 7 mois en Syrie, Didier François, Edouard Elias, Nicolas Hénin et Pierre Torres.


Risquant leur vie dans ce pays devenu le plus dangereux au monde pour les journalistes, ils ont été kidnappés en juin 2013 dans le nord du pays. La plupart de leur confrères réunis lundi soir à Paris à la Maison de la Radio estimaient qu'ils étaient détenus par le mouvement jihadiste de l'Etat islamique d'Irak et du Levant (EIIL).


D'abord le 6 juin Didier François, grand reporter à Europe 1, et le jeune photographe indépendant Edouard Elias, missionné par la radio, ont été interceptés à un barrage routier sur la route d'Alep. Puis le 22 juin Nicolas Hénin et Pierre Torres, journalistes indépendants, ont été enlevés à Raqqa.
Depuis, le 6 de chaque mois, leur Comité de soutien, présidé par Florence Aubenas, ex-otage en Irak et grand reporter au Monde, organise une manifestation de solidarité.


Lundi soir, lors de la soirée-débat animée par Florence Aubenas, des journalistes français, syriens, polonais, espagnols et italien sont venus témoigner du danger de leur travail en Syrie et pour certains de leurs terribles conditions de captivité.
Beaucoup se disent pourtant prêts à retourner en Syrie, pour témoigner de ce conflit qui a fait plus de 130.000 morts, mais savent que le risque est tel pour les étrangers que tout reportage sur place semble presque impossible.


Domenico Quirico (La Stampa), retenu 5 mois, et le photographe franco-américain Jonathan Alpeyrie, détenu 81 jours, ont notamment raconté leur kidnapping.


"J'ai eu les yeux bandés pendant 3 semaines, des côtes fêlées, ils ont fait semblant de m'exécuter plusieurs fois. Ils avaient une télé, ils me demandaient pourquoi on ne parlait pas de moi, me disait que j'étais un agent américain. Un proche du régime d'Assad a payé ma rançon, car il avait des problèmes avec l'Union européenne et voulait pouvoir voyager", a relaté Jonathan Alpeyrie. "Couvrir la guerre là-bas n'a plus grand sens, il y a tellement de journalistes qui ont disparu", estime-t-il.


"Je peux y retourner demain", a répondu au contraire son confrère Domenico Quirico. "Il faut écrire sur la Syrie, et pour cela y être. Sinon sur quoi écrire ?" D'autres journalistes soulignaient que les journaux achètent moins d'articles sur ce conflit qui s'éternise.


L'enseignant belge Pierre Piccinin, détenu 5 mois, a raconté comment il a été battu puis torturé après une tentative d'évasion. "Ils nous ont entaillé le bout de la langue avec des ciseaux"a-t-il raconté dans un message vidéo.


Depuis mars 2011, au moins 27 journalistes et 94 citoyens-journalistes ont perdu la vie en Syrie, selon RSF, et une trentaine d'autres sont retenus en otages.


Le père de Nicolas, Pierre-Yves Hénin, a expliqué avoir rompu le silence sur l'enlèvement de son fils après plusieurs mois, "car il nous est apparu qu'il fallait rappeler son statut de journaliste et éviter que le silence soit l'aveu d'un autre statut".
Evoquant sans le citer EIIL, M. Hénin y a vu une preuve d'espoir. "Nous pensons que ce groupe est plus organisé que d'autres, sans doute très dur dans ses convictions mais n'a pas de raison de pratiquer des violences gratuites".


Florence Aubenas s'est aussi interrogée sur le fait que 3 des 4 journalistes français otages sont des pigistes, comme si les rédactions n'osaient plus envoyer leurs propre staff mais acceptent que des free-lance prennent les risques de se rendre sur place.


"Je dis aux journalistes de ne pas aller dans le nord de la Syrie. Si vous êtes pris par ISIS votre avenir est très incertain", a lancé dans un message vidéo enregistré Peter Bouckaert, directeur de Human Rights Watch, organisation basée à New York. "C'est la pire crise des otages depuis la guerre civile au Liban. Il y a plus de journalistes otages en Syrie qu'au Liban. Nous voulons éviter qu'il y en ait d'autres. ", a-t-il conclu.

 

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Risquant leur vie dans ce pays devenu le plus dangereux au monde pour les journalistes, ils ont été kidnappés en juin 2013 dans le...

commentaires (1)

Mieux vaut ne rien écrire sur la Syrie si la situation semble si dangereuse et attendre que la situation se calme au moins .

Sabbagha Antoine

14 h 49, le 07 janvier 2014

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Commentaires (1)

  • Mieux vaut ne rien écrire sur la Syrie si la situation semble si dangereuse et attendre que la situation se calme au moins .

    Sabbagha Antoine

    14 h 49, le 07 janvier 2014

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