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Liban - Droits de l’homme

Détenus libanais en Syrie : les familles sollicitent l’intervention de qui veut bien les entendre...

Les familles des détenus libanais en Syrie déclarent « envier les familles des pèlerins chiites » pour le dénouement heureux de leur dossier.

Les familles des détenus libanais en Syrie ne sont pas près d’oublier leurs proches, dont il ne reste que des photos jaunies par le temps et une interminable attente.

La libération des pèlerins chiites enlevés à Aazaz et l’accueil populaire et national qui leur a été réservé à l’aéroport de Beyrouth ont laissé un sentiment de bonheur chez les familles des détenus libanais en Syrie, imprégné néanmoins d’une grande amertume. Heureux que le calvaire des neuf familles, autrefois compagnes dans le malheur, ait pris fin, les proches des détenus en Syrie n’ont pas pu pour autant s’empêcher de laisser transparaître un sentiment de désolation face à « la grande injustice dont ils sont victimes depuis plus de trois décennies ».


« Il est grand temps que les responsables se penchent sérieusement sur notre dossier », s’insurge Naheel Chehwane. Son époux, Kozhaya Farid Chehwane, a été enlevé en 1980, à l’âge de 28 ans. Il a laissé derrière lui sa femme et quatre enfants, âgés entre quatorze mois et quatre ans. « Cela fait huit ans que nous observons un sit-in permanent dans le jardin Gebran Khalil Gebran, au centre-ville de Beyrouth, sans qu’un responsable ne se soucie de nous, poursuit-elle. Le président de la République avait promis, dans son discours d’investiture, de suivre le dossier de près. Le comité des parents a sollicité à trois reprises un rendez-vous. Il ne nous a jamais reçus. Nous avons organisé une manifestation sur la route menant au palais présidentiel, mais il nous a envoyé les soldats. Notre supplice n’a que trop duré. Nous ne réclamons que la vérité. Si nos proches sont toujours vivants, qu’ils nous les rendent. S’ils ne sont plus de ce monde, nous voulons que leurs restes nous soient restitués. »


« Si nous savions que le kidnapping nous aurait permis de retrouver nos proches, nous aurions eu recours à ces méthodes depuis longtemps, poursuit d’un ton nerveux Naheel Chehwane. Mais nous avons toujours voulu agir dans le cadre de la loi. De nombreux parents qui fréquentaient la tente du sit-in sont décédés sans avoir des nouvelles de leurs proches. Cela n’a pas pour autant ému les responsables qui n’ont rien à faire de ce dossier. »
Jeannette Youssef ressent la même amertume et déception. Son frère Milad a été enlevé en 1983, alors qu’il accomplissait son devoir de soldat. Il avait 18 ans. « Autant je suis heureuse pour ces familles, autant je les envie pour l’intérêt officiel que leur cause a suscité, déclare-t-elle. Toute la classe politique a appuyé leur cause, au moment où les responsables pratiquent la politique de l’autruche à l’égard de notre dossier. Si mon frère et les autres détenus avaient bénéficié d’une telle couverture, ils ne seraient pas encore en Syrie. Mes parents sont morts en murmurant son nom. Milad s’est enrôlé dans l’armée pour servir son pays, mais son pays l’a abandonné. »
Même son de cloche chez l’Association des anciens détenus en Syrie dont l’un des membres, Raymond Soueidane, appelle le chef de l’État, les responsables et partis politiques à « prendre au sérieux notre souffrance ». Il a en outre affirmé que l’ONG « est en possession de documents qui confirment la détention de plus de 600 personnes en Syrie ».


De son côté, le comité des familles des kidnappés et disparus au Liban a publié un communiqué soulignant que « l’État pouvait libérer les kidnappés, s’il prenait une décision dans ce sens ».

 


L’État libanais essuie le gros échec
Les dossiers des pèlerins chiites et des détenus libanais en Syrie ne peuvent pas être comparés, estime Ghazi Aad, porte-parole de Solide (Soutien aux Libanais en détention et en exil). « Le dossier des pèlerins chiites a été suivi de près par les responsables dès le premier jour de leur enlèvement, au moment où l’État libanais a négligé, voire nié notre dossier pendant de longues années », explique-t-il. « Qui des responsables a vraiment œuvré pour qu’une solution au dossier soit trouvée ? » se demande Ghazi Aad, rappelant que Solide et les familles des détenus n’ont pas lésiné sur les efforts dans le cadre de « notre dynamique pacifique pour la libération des détenus ». « Nous avons même réussi à obtenir des décisions internationales en faveur de notre dossier, mais elles n’ont jamais été appliquées ni prises au sérieux, ajoute-t-il. Nous avons usé de tous les moyens pacifiques pour résoudre cette affaire, mais c’est l’État libanais qui essuie le gros échec, en raison de sa collusion à l’époque de la tutelle syrienne (entre 1990 et 2005) avec l’appareil sécuritaire syrien. »


Ghazi Aad affirme en outre que « d’après nos données, de nombreux Libanais se trouvent toujours en Syrie ». « Dans une déclaration qu’il avait faite au quotidien as-Safir, le directeur de la Sûreté générale, le général Abbas Ibrahim, a assuré qu’il se penchera sur le dossier des détenus en Syrie, suite à une requête du président de la République et du ministre sortant de l’Intérieur, indique le porte-parole de Solide. Si le chef de l’État est sérieux, qu’il œuvre à former une commission nationale indépendante pour les victimes de disparition forcée, d’autant qu’un projet de décret a été proposé dans ce sens, il y a plus d’un an, par le ministre sortant de la Justice Chakib Cortbaoui. La formation de cette commission serait un premier pas vers une solution sérieuse du dossier. »


Rongées par la fatigue et le désespoir, les familles des détenus libanais en Syrie ne sont pas pour autant prêtes à abandonner leur cause. Aujourd’hui, elles se réuniront sur les lieux de leur sit-in permanent dans le jardin Gebran Khalil Gebran pour décider des mesures à prendre, dans l’espoir de tirer au clair le sort des disparus...

 

 

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commentaires (2)

Faut demandé à F. Hollande ....il va surement intervenir sur ce dossier....

M.V.

11 h 42, le 24 octobre 2013

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Commentaires (2)

  • Faut demandé à F. Hollande ....il va surement intervenir sur ce dossier....

    M.V.

    11 h 42, le 24 octobre 2013

  • SI CES DERNIERS AVAIENT AUSSI DES MILICES ARMÉES POUR SUPPORTS, ET LEURS PARENTS PRATIQUAIENT DES ENLÈVEMENTS L'AFFAIRE AURAIT ÉTÉ PRISE AU SÉRIEUX DEPUIS LONGTEMPS ! GÉNÉRALISSIME... WAYNAK ? VOS HOMMES LES UNS SOUS LA TERRE ET LES AUTRES DANS LES PRISONS SYRIENNES... OU INTA KINT BIL TROCADERO BI BÉRIZ !

    SAKR LOUBNAN

    11 h 30, le 24 octobre 2013

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