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À La Une - syrie

Des rebelles syriens constituent une force islamique

L’opposition se scinde définitivement ; les experts de l’ONU de nouveau à Damas.

Un rebelle de l’Armée syrienne libre arrose les plantes ornant la tombe d’un compagnon d’armes tombé sous les balles. Bassam Khabieh/Reuters

Plusieurs influents groupes d’insurgés syriens ont constitué hier une nouvelle force islamique, refusant l’autorité de la Coalition nationale syrienne (CNS) que les Occidentaux et les pays du Golfe soutiennent comme solution de remplacement au régime de Bachar el-Assad.

 

Dans une vidéo publiée sur des réseaux sociaux, le chef politique de la brigade al-Tawhid, considérée comme modérée, affirme que cette nouvelle entité regroupe des milliers de combattants de treize organisations armées, dont trois appartenaient auparavant à l’Armée syrienne libre (ASL).  

« Ces forces estiment que tous les groupes constitués à l’étranger sans être revenus dans le pays ne les représentent pas et elles ne les reconnaissent pas », a expliqué Abdoulaziz Salameh. « De fait, la Coalition nationale et son gouvernement de transition dirigé par Ahmad Toameh ne les représentent pas et ne seront pas reconnus », a-t-il ajouté. « Ces forces appellent toutes les forces militaires et civiles à s’unir dans un cadre islamique clair fondé sur la charia (la loi coranique) qui doit être la seule source du droit », a-t-il encore dit.

 

(Pour mémoire: Ahmad Toameh face au « défi » d’el-Qaëda en Syrie)


Cette annonce constitue un revers pour les puissances étrangères et surtout pour l’Arabie saoudite, qui entendaient marginaliser les factions religieuses et favoriser les organisations laïques en soutenant financièrement la CNS. Le président de la CNS, Ahmad Jarba, présent à New York pour l’Assemblée générale de l’ONU, a fait savoir qu’il se rendrait aujourd’hui en Syrie pour offrir une réponse aux rebelles dissidents. « Nous n’allons pas négocier avec des groupes en particulier. Nous allons proposer une meilleure structure pour l’organisation des forces combattantes », a déclaré son porte-parole, Louaï Safi. Pour les Occidentaux en outre, cette alliance va gêner grandement leur volonté affichée de fournir des armes aux rebelles.

 

(Lire aussi: Le Qatar perd son rôle de pivot de la diplomatie arabe)

 

De plus, la décision de ces groupes de rompre avec l’opposition va rendre très difficile une solution négociée au conflit, car la Coalition ne représente plus la majorité de l’opposition.
Le coordinateur politique et de communication de l’état-major de l’ASL, Louaï Moqdad, a fait assumer à la communauté internationale la responsabilité de cette nouvelle donne, annonçant qu’il s’agit d’un geste de « désespoir » des rebelles déçus par le manque d’armement de l’étranger mais aussi par l’opposition jugée déconnectée de la réalité. 


Le nombre exact de rebelles ainsi coalisés demeure inconnu, de même que la manière dont leurs actions vont être coordonnées dans la lutte contre les forces pro-Assad. Khaled Khoja, délégué de la CNS en Turquie, avance le chiffre de 20 000 combattants, principalement installés dans le nord du pays. Les signataires de la déclaration constituent un mélange hétérogène allant des radicaux du Front al-Nosra, lié à el-Qaëda, ou du bataillon islamiste Ahrar al-Cham jusqu’aux modérés de la brigade al-Tawhid et de la brigade al-Islam. Pour M. Khoja, la rupture a peut-être été consommée par le manque de consultation ayant entouré au début du mois la formation du gouvernement de transition. « Nous les avons ignorés pendant deux ans et demi alors qu’ils sont les groupes les plus efficaces », reconnaît-il. « Cette situation peut être résolue en accordant à ces brigades une reconnaissance, en les associant aux prises de décision et en leur fournissant une aide », juge-t-il.

 

(Reportage: « La guerre est un très bon business »...)


La fracture n’est pas seulement politique, mais aussi territoriale. La plupart des brigades signataires de cette force sont celles qui contrôlent une grande partie du nord de la Syrie, principal bastion de la rébellion. Aucun groupe basé dans le sud ou l’est du pays ne semble avoir rejoint les dissidents. À Deraa par exemple, à la frontière jordanienne, principal point de passage de l’aide des pays occidentaux et du Golfe, les brigades islamistes radicales sont faiblement représentées. Depuis le début de la rébellion en mars 2011, l’opposition syrienne est traversée par d’importantes divisions et n’a jamais pu ériger un front commun face au régime de M. Assad.

Bonne et mauvaise nouvelle
Pour Bachar el-Assad, il s’agit à la fois d’une mauvaise et d’une bonne nouvelle. Une structure rebelle plus puissante et mieux organisée risque de menacer la progression récente de ses troupes sur le terrain. Mais le président syrien pourra désormais faire valoir qu’il n’y a pas de solution de rechange à son gouvernement et agiter la menace d’un pouvoir syrien livré à el-Qaëda en cas de chute du régime, ce malgré la présence de modérés dans ce nouveau front d’opposition.


Sur un autre plan, les experts de l’ONU sont retournés hier en Syrie pour enquêter sur de nombreuses attaques présumées aux armes chimiques, au moment où Occidentaux et Russes négocient une résolution sur le désarmement chimique syrien. Dirigée par Aake Sellström, l’équipe d’experts est arrivée à Damas dans un convoi de trois véhicules de l’ONU. Elle doit vérifier « 13 ou 14 » allégations des deux camps. M. Sellström avait indiqué récemment que son équipe espérait pouvoir présenter un rapport final sur les accusations « peut-être à la fin octobre ».


Mardi devant l’Assemblée générale de l’ONU, le président américain Barack Obama a réclamé une résolution « ferme » du Conseil de sécurité assortie de « conséquences » pour le régime de M. Assad s’il ne tenait pas sa promesse de détruire ses armes chimiques. Mais Moscou a réaffirmé qu’il n’était « pas question » d’adopter une telle résolution, « ni d’application automatique de sanctions ou encore moins de recours à la force ».

 

(Lire aussi: Sur le papier, Obama et Hollande restent intransigeants sur la Syrie)

 

De son côté hier, le secrétaire général Ban Ki-moon a rassemblé à New York les grandes puissances pour tenter de sortir de l’impasse sur le dossier syrien. M. Ban a ainsi organisé un déjeuner au siège de l’ONU avec les chefs de la diplomatie des cinq membres permanents du Conseil de sécurité (États-Unis, France, Royaume-Uni, Russie, Chine).
Dans ce contexte, plus de 100 officiers supérieurs de l’ASL ont appelé hier à « boycotter » toute conférence à laquelle participerait l’Iran, un allié du régime Assad, après des propos du président français François Hollande en faveur d’une telle participation.

 

 

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