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À La Une - Éclairage

De la banlieue au Nord, la même main destructrice...

Y a-t-il encore moyen de sauver le Liban de la violence aveugle de type irakien ? L’explosion de la voiture piégée jeudi 15 août à Roueiss dans la banlieue sud n’a pas suffi aux tueurs qui ont récidivé hier à Tripoli avec deux charges explosives placées devant deux mosquées à la sortie de la prière du vendredi. Le bilan est terrible et le choc immense. 

 

Après deux ans d’une relative stabilité, les événements semblent soudain se précipiter et le Liban bascule dans une guerre barbare contre laquelle il se croyait immunisé grâce aux déclarations rassurantes de la communauté internationale qui affirmait ne pas vouloir d’une explosion au Liban. Elle ne mentait sans doute pas et elle continue probablement à ne pas vouloir d’une guerre au Liban. Mais dans l’état où sont les choses, la situation peut échapper à tout contrôle et plus que jamais elle est liée aux développements en Syrie. Ce qui se disait au début de l’éclatement du conflit chez le voisin syrien, en ce sens qu’il il ne peut que s’étendre aux pays voisins, le Liban en tête, est en train de se vérifier.

 

S’il avait pu être réglé en quelques mois, selon le modèle égyptien (avant le nouveau round qui se joue actuellement) ou tunisien ou encore libyen et yéménite, le Liban aurait pu s’en sortir d’une façon ou d’une autre. Mais, aujourd’hui, deux ans et demi après le début de la crise syrienne, et avec l’afflux de réfugiés syriens et palestiniens au Liban, ce dossier divise profondément les Libanais, au lieu de les pousser à resserrer leurs rangs. Les deux camps sont, chacun à sa manière, tellement impliqués dans le conflit syrien que celui-ci est devenu leur priorité. C’est au Liban que l’on trouve en effet les plus fervents défenseurs du régime syrien et de l’opposition, au point que le débat sur l’utilisation d’armes chimiques par l’un ou l’autre des camps syriens est devenu un débat presque national au Liban.


Mais, aujourd’hui, tout ce débat est dépassé, le Liban étant désormais directement dans la tempête. Selon une source du 8 Mars, les explosions de Tripoli et celle de Roueiss ont la même origine et le même objectif. Elles donnent en quelque sorte raison au secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, qui disait, dans son dernier discours du 16 août, qu’il existe un projet pour plonger le Liban dans la discorde entre sunnites et chiites. La voiture piégée de Roueiss avait pour but de pousser les chiites à s’en prendre aux sunnites et à avoir des réactions violentes de représailles contre eux. Les chiites n’ayant pas réagi – en raison notamment des appels au calme de leurs leaders –, il y a eu les explosions de Tripoli, pour pousser cette fois les sunnites à accuser les chiites et à se soulever contre eux. 

Sayyed Nasrallah avait ainsi mis en garde contre le projet destructeur des takfiristes qui peut frapper aussi bien les chiites que les chrétiens et les sunnites, leur objectif étant de provoquer le chaos et la discorde, en exacerbant les tensions communautaires. Il avait même appelé ceux qui se croyaient à l’abri de la violence aveugle, sous prétexte qu’elle n’est dirigée que contre les chiites pour les pousser à se soulever contre le Hezbollah, à faire preuve de vigilance, car ce mal-là peut frapper tout le monde.

 

La source du 8 Mars affirme, dans ce même contexte, que la théorie du 14 Mars après l’attentat de Roueiss selon laquelle il s’agit d’un moyen de pression sur le Hezbollah pour le pousser à retirer ses troupes de Syrie est aussi tombée, puisque la violence aveugle a frappé hier les fidèles sunnites à la sortie de la mosquée dans une volonté évidente de les pousser à s’en prendre aux chiites ou aux alaouites de Baal Mohsen. Le plan est donc clair, selon la source du 8 Mars, et il faut avoir le courage de le dénoncer en se plaçant au-dessus des considérations purement confessionnelles. C’est dans ce sens que Nasrallah avait invité les différents protagonistes à ne pas assurer de couverture politique ni d’environnement social favorable aux takfiristes, qui seraient donc, selon la source du 8 Mars, derrière le double attentat d’hier.

 

Cette thèse n’est pas partagée par certains courants de Tripoli, notamment par Daiya Chahhal, qui a refusé de porter une accusation contre les takfiristes, se demandant même comment ils pourraient se faire sauter eux-mêmes, dans une allusion au fait que la première charge a explosé devant la mosquée al-Taqwa dont l’imam est le cheikh salafiste Salem Rafei connu pour ses positions hostiles au régime syrien. Cheikh Chahhal n’a donc pas lancé d’accusations précises, mais il a repris la théorie de la communauté sunnite (Ahl al-Sounna) prise pour cible... 

 

Ce qui signifie que le sang qui coule dans la banlieue sud de Beyrouth et à Tripoli ne parvient pas à unifier les Libanais qui sont pourtant à bord du même bateau en train de se noyer. La solution pour éviter le naufrage ? La source du 8 Mars pense que même avec la plus grande fermeté et vigilance du monde, l’armée et les services de sécurité ne peuvent pas totalement enrayer le terrorisme s’ils ne sont pas soutenus par une initiative politique. Le sauvetage passe donc forcément par la formation d’un gouvernement rassembleur qui regrouperait toutes les parties, pour leur permettre de s’entendre sur les questions vitales, en laissant de côté les dossiers conflictuels liés à la crise syrienne. Mais comment y arriver avec le refus du 14 Mars de la participation du Hezbollah au gouvernement ?

 

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Après deux ans d’une...

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