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À La Une - Liban

Taha, Tripolitain : " L’un de mes amis est blessé, je n’ai pas de nouvelles des autres"

Deux jeunes Tripolitains témoignent.

Deux voitures piégées ont plongé Tripoli, capitale du Liban-Nord, dans l'horreur, vendredi 23 août 2013. AFP/STR

Taha Naji peu s'estimer chanceux. Quand la voiture piégée placée devant la mosquée al-Salam, à Tripoli, a explosé, il ne se trouvait qu'à quelque 200 mètres.

 

"J’ai très bien entendu l'explosion. Je suis tout de suite rentré chez moi pour me mettre à l’abri et rassurer ma famille", raconte ce jeune Tripolitain de 28 ans.

 

Travaillant au Qatar, Taha est actuellement en vacances à Tripoli, capitale du Liban-Nord, où deux voitures piégées ont explosé près des mosquées al-Salam et al-Taqwa vendredi peu avant 14h, à quelques minutes d'intervalles. Le bilan de ce double attentat est lourd, 42 morts selon un nouveau bilan avancé en soirée par des sources de sécurité, et des centaines de blessés. Il s'agit de l'attentat le plus meurtrier perpétré au Liban depuis la fin de la guerre civile en 1990.

 

"Mes premières pensées sont allées à mes amis qui fréquentent la mosquée al-Salam et à mon oncle qui vit juste en face", confie-t-il à Lorientlejour.com. "L’appartement de mon oncle a été touché par l’explosion, les vitres ont été soufflées. L’épouse de mon oncle est blessée à la main mais heureusement rien de grave. L’un de mes amis, qui sortait de la mosquée al-Salam, est lui aussi blessé à la main. Je n’ai pas de nouvelles des autres", poursuit-il inquiet.

 

Dès qu'il est remis du choc de l'explosion, Taha se rend à l’hôpital Monla pour donner son sang. Mais comme la file de donateurs est déjà longue, Taha va voir du côté de l’hôpital Islami. "Les infirmières m’ont dit que pour le moment elles n’en avaient pas besoin", explique Taha.

 

De retour chez lui, il décide de mettre en contact les Tripolitains qui cherchent un parent ou des amis via la page Facebook de son association "We love Tripoli". Fondée il y a deux ans, cette association œuvre au rapprochement des communautés et lutte contre la montée de l’extrémisme qui gangrène Tripoli. "Je mets aussi à jour une liste des centres de soins qui manquent de certains types de sang", précise-t-il.

 

Sur la suite des événéments, Taha Naji n'est pas optimiste, voyant le Liban sombrer dans un scénario à l'irakienne.  "Comme en Irak, nous vivons en ce moment une explosion par semaine. La semaine dernière, les chiites étaient attaqués. Aujourd’hui, ce sont les sunnites. Et ainsi de suite. J’espère seulement qu’on n'atteindra pas le même niveau de violence qu’en Irak", confie-t-il. Le 15 août dernier, un attentat à la voiture piégée a été perpétré à Roueiss, dans la banlieue sud de Beyrouth, bastion du Hezbollah chiite.

 

Malgré cette escalade de la violence au Liban, Taha Naji ne souhaite pas écourter son séjour à Tripoli. "J’ai prévu de rentrer fin août. Je ne vais pas avancer la date de mon départ à cause de cet attentat. Je ne vais pas abandonner maintenant ma famille et mes amis", explique-t-il.

 

 

"Je me sens en danger, mais surtout perdu"

Taha Baba était en route vers la Chambre de commerce de Tripoli, où il travaille en tant que "web developer", quand il a entendu, quasiment coup sur coup, les deux explosions.

 

"Je conduisais. Je me trouvais au niveau de la place el-Nour quand la première voiture a explosé. Je n’y ai pas vraiment prêté attention. C’est quand j'ai entendu la deuxième explosion que j’ai été surpris. Le bruit était beaucoup plus fort et impressionnant", raconte à Lorientlejour.com ce résident de Tripoli, ville à majorité sunnite.

 

Rapidement, la rue devient le théâtre de scènes de panique. "Après la deuxième déflagration, j’ai commencé à voir des gens courir dans tous les sens. Ils fuyaient les lieux des explosions", poursuit Taha, 25 ans, qui préfère faire demi-tour et regagner son domicile, dans le quartier de Abou Samra. "Je me sens plus en sécurité ici", explique-t-il au téléphone. Sur le chemin, il remarque que les chars et les soldats habituellement déployés sur la place el-Nour, n’y sont plus.

 

Confus, Taha dit avoir du mal à réaliser ce qui vient de se produire. C’est la première fois qu’il est témoin de telles attaques. "Je me sens en danger, mais surtout perdu. Je ne sais pas quoi penser de tout ça", confie-t-il. Depuis 14h, il essaye en vain de joindre ses proches qui vivent à proximité des lieux des deux attentats. "Les lignes sont surchargées", explique-t-il. C'est sur Facebook et Twitter que Taha a vu les premières images des attentats . "Ça ressemble à ce qui s’est passé dans la banlieue sud de Beyrouth", estime-t-il.

 

Ces attentats interviennent alors que le Liban est de plus en plus contaminé par la crise qui sévit chez son voisin syrien. Le Liban est profondément divisé sur le conflit en Syrie, qui a exacerbé les dissensions confessionnelles. Les sunnites sont en effet en majorité partisans de la rébellion qui veut renverser le régime, tandis que les chiites, emmenés par le Hezbollah, sont en majorité en faveur du président Assad.

 

Aujourd'hui, Taha est inquiet, il craint des représailles entre les différentes communautés. Depuis le début de la guerre en Syrie, Tripoli est le théâtre d'affrontements réguliers et souvent meurtriers, entre les quartiers historiquement rivaux de Jabal Mohsen, à majorité alaouite et pro-Assad, et Bab el-Tebbaneh, à majorité sunnite et anti-régime syrien. "Il pourrait y avoir un regain de tensions entre les sunnites et les alaouites", craint-il aujourd'hui.

 

 

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