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Liban - Archéologie

Hegra, la Pétra d’Arabie saoudite, dévoile ses secrets

Pétra, la fascinante capitale des Nabatéens, avait étendu son emprise jusque dans le nord du Hijaz, à Hegra. Là, des tombeaux et des sanctuaires creusés dans des massifs gréseux, des habitations, des puits et des carrières offrent un parc archéologique de 1450 hectares. Sous la houlette d’une mission franco-saoudienne, la belle cité endormie se réveille et livre ses vestiges. Et quels vestiges !

Façades de tombeaux du massif Qasr el-Bint.

Située au nord-ouest de l’Arabie saoudite, « Madâïn Sâlih », l’ancienne Hegra, a fait partie pendant au moins deux siècles du royaume nabatéen, dont elle marquait à peu près la frontière sud. « C’est le site nabatéen le plus important après la capitale du royaume, Pétra, en Jordanie, célèbre pour ses monuments taillés dans le grès rose. C’est aussi le premier site saoudien à avoir été inscrit en 2008 sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco », a indiqué François Villeneuve au cours d’une conférence donnée au musée de l’AUB où il a présenté les travaux menés par une équipe franco-saoudienne sur le site de Madâïn Sâlih.


L’ancien directeur de l’IFPO à Beyrouth, actuellement directeur de l’École doctorale d’archéologie à l’Université Paris 1 et codirecteur des fouilles archéologiques de Hegra, signale que la cité antique, nommée Hegra en grec et Haegra en latin, est évoquée par Strabon, Pline et Ptolémée. Elle correspond aussi à al-Hijr, « souvent mentionnée dans le Coran, dont la sourate 115 porte le nom ». Mais cette ville est surtout connue pour être le lieu où un prophète, nommé Sâlih, a tenté sans succès de convertir les habitants, membres de la tribu de Thamûd, au culte du dieu unique, d’où le nom de Madâïn Sâlih, « les villes de Sâlih », qui lui a été donné. Des historiens et géographes arabes la décrivent comme « un village fortifié riche en puits et en terrains agricoles ».


Hegra a ensuite fait partie de l’Empire romain. « Des contingents de la troisième légion romaine y ont d’ailleurs été stationnés au moins jusqu’à la fin du IIe siècle après J.-C. », souligne Villeneuve, tout en faisant observer qu’une inscription datant du milieu du IVe siècle, écrite en caractères nabatéens, atteste la présence jusqu’à cette époque d’un « chef de Hegra », peut-être un prince local.

 

Qasr el Farid, le plus grand tombeau de Hegra.

 


Description
Le site dominé par un massif rocheux, Jabal Ithlib, s’inscrit dans une large vallée alluviale, ponctuée de reliefs de grès. Une grosse opération de fouilles a permis de révéler un bon nombre d’inscriptions et un impressionnant ensemble de vestiges rupestres, comprenant des nécropoles abritant plus de cent monuments funéraires, dont quatre-vingt-quatorze tombeaux à façade décorée de chapiteaux et de tambours de colonnes taillés dans la pierre, auxquels s’ajoutent près de deux mille tombes ordinaires, construites pour les habitants les plus modestes. Une inscription de nature juridique, conservée dans le temple de la ville, indique qui avait le droit de se faire inhumer à l’intérieur des tombeaux et quelles amendes encouraient les contrevenants.
Un secteur religieux est installé dans Jabal Ithlib. On y pénètre par « un défilé de 40 m de long qui rappelle le Sîq de Pétra, à l’entrée duquel a été creusée la grande salle de banquet ». Dans ce massif ont été creusées de nombreuses niches à bétyles consacrées à des divinités nabatéennes.


Enfin, une zone d’habitations – dont les structures en brique crue et les fondations en pierre n’ont pas été entièrement dégagées – s’étend sur une cinquantaine d’hectares, dans la plaine centrale. La prospection géophysique réalisée par la mission a fait apparaître une ville qui se serait développée progressivement au sein d’une oasis dotée de 132 puits, dont certains de 7 m de diamètre et 20 m de profondeur évoquent un point essentiel de la civilisation nabatéenne : la maîtrise de l’eau, dans un environnement le plus souvent subdésertique.
L’étude archéobotanique sur les restes végétaux trouvés dans les fouilles a permis de reconstituer « trois étages de végétations » : palmier et dattier ; arbres fruitiers (orange, grenade, olive, prune, etc.) et une culture de céréales et de lentilles. Quant à l’archéozoologie, elle a relevé les traces de chèvres, de dromadaires, de bovins et de volailles. En revanche, ni chiens, ni chevaux, ni ânes n’ont été domestiqués.
Le matériel céramique collecté est décoré de motifs géométriques ou de palmes. De même, trois groupes de monnaies en bronze – locales, grecques et romaines – ont été exhumés.

 

 

Un autre tombeau typique aussi de Hegra.

 


Grand Prix d’archéologie
Les travaux, toujours en cours, sont menés depuis 2008 par une mission franco-saoudienne dirigée, côté français, par François Villeneuve et Laila Nehmé (chercheur au CNRS, UMR Orient & Méditerranée), tous deux arabophones ; et, côté saoudien, par Daifallah al-Talhi (professeur à l’université de Hâil). Une vingtaine de chantiers ont été ouverts en quatre ans, dont « les résultats sont très prometteurs », relève Villeneuve. Il précise que ces fouilles sont réalisées sous l’égide de la Saudi Commission for Tourism and Antiquities (SCTA), dont le directeur général est le prince Sultan bin Salman et le secrétaire général le Dr Ali al-Ghabban, auteur d’une thèse soutenue à Aix-en-Provence en 1988 et parfait francophone. La mission française, principalement financée par le ministère des Affaires étrangères, avait été sponsorisée dans le passé par Total et le Sénat, et a remporté le Premier prix Clio de la recherche archéologique et le Grand Prix d’archéologie de la Fondation Simone et Cino del Duca, décerné par l’Institut de France.


Un siècle après les expéditions scientifiques menées entre 1907 et 1910 par Antonin Jaussen et Raphaël Savignac, pères dominicains de l’École biblique et archéologique française de Jérusalem, « Madâïn Sâlihe » est devenu l’un des sites les plus visités d’Arabie saoudite. Un aéroport inauguré en 2012 dessert, deux fois par semaine, la ville la plus proche, Al-‘Ula, située à une vingtaine de kilomètres de la cité nabatéenne... Laquelle n’a pas fini de dévoiler ses dessous.

Située au nord-ouest de l’Arabie saoudite, « Madâïn Sâlih », l’ancienne Hegra, a fait partie pendant au moins deux siècles du royaume nabatéen, dont elle marquait à peu près la frontière sud. « C’est le site nabatéen le plus important après la capitale du royaume, Pétra, en Jordanie, célèbre pour ses monuments taillés dans le grès rose. C’est aussi le premier site...

commentaires (3)

Ce sites sont connus depuis toujours...quelle arnaque médiatique! Lawrence d'Arabie en parlait déjà!

GEDEON Christian

17 h 56, le 04 juin 2013

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Commentaires (3)

  • Ce sites sont connus depuis toujours...quelle arnaque médiatique! Lawrence d'Arabie en parlait déjà!

    GEDEON Christian

    17 h 56, le 04 juin 2013

  • Etonnant qu'elles n'ont pas été détruites, c'est dans l'idéologie wahabite de détruire les vestiges du passé, comme en Afghanistan et à Tombouctou..

    Jaber Kamel

    13 h 47, le 04 juin 2013

  • Dommage que les noms d'origines de l'époque prés islamique ..., ne sont pas retranscrit ...et que l'origine des nabatéens n'est pas mieux explicité.....

    M.V.

    10 h 29, le 04 juin 2013

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