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Présidentielle US 2012 - Le point

La foire d’empoigne

La réponse est « oui ». Oui, le président sortant est prêt pour un second mandat. Et, oui, il a affûté ses armes en prévision du jour J. On l’a senti mardi soir dans la grande salle de l’université de Hofstra, à Long Island (État de New York), devant un parterre composé de 82 électeurs qui n’ont pas encore arrêté leur choix. L’homme qui affrontait ce soir-là Mitt Romney n’avait rien en commun avec l’ombre que l’on avait pu voir le 3 octobre à Denver, absent la plupart du temps, vague dans ses explications comme dans ses réponses, préférant l’esquive à l’attaque et les silences aux plaidoyers pro domo. Entré dans l’arène pour une rencontre appelée à faire date dans les annales politiques américaines, le nouvel Obama aura été de bout en bout incisif, arpentant la scène, prenant à témoin l’auditoire, cherchant visiblement la bagarre et y trouvant du plaisir. Ce fut, cette fois, non plus une séance de shadow boxing, mais un match à poings nus, comme aux temps héroïques des John Kelly et des Jonathan Smith, un de ces ultimate fights dont raffolent les Américains, pour qui tout – et la politique surtout – est affaire de show.


Un bémol cependant : ce fut un débat (presque) inutile car les électeurs ont déjà arrêté leur choix et les indécis ne représentent plus qu’une minorité. Mais alors pourquoi cette rencontre, puis celle, la dernière avant le 6 novembre, de lundi prochain à Boca Raton, en Floride ? D’abord pour le show précisément, et la soirée tint ses promesses, au-delà de toute espérance. Ensuite parce que subsistaient des zones d’ombre qu’il importait de dissiper, en même temps que la fâcheuse impression laissée, la fois précédente, par un président comme « désengagé ». Enfin, parce que l’arrivée étant appelée à se jouer dans un mouchoir de poche, même peu nombreux relativement, les hésitants seront les « faiseurs de roi ».


Il a fallu à l’actuel locataire de la Maison-Blanche un peu moins de quarante-cinq secondes pour prendre la direction des opérations et prouver ainsi qu’il était le chef. « Le gouverneur Romney a dit que nous devrions laisser Detroit faire banqueroute », a-t-il lancé d’emblée, dans une allusion à l’opération de sauvetage de l’industrie automobile qui a coûté des dizaines de milliards de dollars au Trésor US. Une volée de droites et de crochets allait suivre, lancée à la face d’un adversaire pantois, ponctuée à chaque fois que celui-ci avait la possibilité de répondre, de petites phrases du genre « C’est faux », « ce que vous dites n’est pas vrai » ou encore, argument autrement plus assassin : « Le candidat républicain prétend posséder un plan en cinq grands points pour créer 12 millions d’emplois. En fait, il n’en a qu’un seul, qui consiste à protéger la classe riche de ce pays. » Autre riposte, particulièrement percutante, au moment où s’est posée la question du commerce mondial : « Vous êtes la dernière personne qui saura résister à la Chine, vous qui avez des intérêts dans plusieurs firmes chinoises. »


Le candidat mormon s’est tiré une balle dans le pied lorsque, cherchant à reprendre l’avantage, il a voulu revenir sur l’attaque contre le consulat américain à Benghazi dans laquelle ont péri, outre l’ambassadeur J. Christopher Stevens, trois fonctionnaires de la chancellerie, et laissé entendre que l’administration avait trompé le peuple en parlant d’abord d’une manifestation qui avait tourné à l’émeute avant de reconnaître, bien plus tard, qu’il s’était agi bel et bien d’une attaque délibérée. Il s’est aussitôt attiré cet acerbe rappel à l’ordre de la part du chef de l’exécutif : « L’allusion à une manœuvre de basse politique de notre part alors que nous venions de perdre quatre des nôtres est offensante. Ce n’est pas ce que je fais en tant que président, en tant que chef des armées. Le lendemain même je me suis adressé à la presse dans le Rose Garden pour affirmer que c’était là un acte terroriste. » Confirmation de la journaliste de CNN, Candy Crowley, qui jouait le rôle de modératrice, suivie de cette invite d’un Obama visiblement aux anges : « Pouvez-vous le répéter un peu plus fort, Candy ? »


Le mot de la fin est venu d’une femme présente dans la salle, profond dans sa candeur : « Le président n’a pas tenu les promesses de son début de mandat mais je crains de voir les républicains revenir à la politique de George W. Bush. » Réponse de Mitt Romney : « Nous sommes différents l’un de l’autre et d’ailleurs l’époque a changé. »
Score final : 44 minutes et 4 secondes pour Obama contre 40 minutes et 50 secondes à son adversaire. En langage de sondeur, cela se traduit par une avance de 3 points du premier. Trois points : c’est le taux d’erreur que s’attribuent les instituts spécialisés.

La réponse est « oui ». Oui, le président sortant est prêt pour un second mandat. Et, oui, il a affûté ses armes en prévision du jour J. On l’a senti mardi soir dans la grande salle de l’université de Hofstra, à Long Island (État de New York), devant un parterre composé de 82 électeurs qui n’ont pas encore arrêté leur choix. L’homme qui affrontait ce soir-là Mitt Romney...