Il y a moins d’un mois, « Beirut Digital District » est né. La nouvelle a été accueillie avec l’importance qu’elle mérite dans les milieux économiques, mais le commun des mortels n’a pas bien compris de quoi il s’agit. L’initiateur du projet, Me Karim Kobeïssy, a expliqué à L’Orient-Le Jour que l’idée de départ était de créer un écosystème susceptible d’attirer les investisseurs dans les domaines de l’information, de la communication et de la technologie (ICT), des secteurs en développement, qui ont toutefois besoin d’un environnement efficace.
Au début, le projet paraissait ambitieux, voire irréalisable. D’autant qu’il fallait trouver l’espace géographique et le doter d’une infrastructure performante avec des coûts au plus bas pour attirer le maximum d’investisseurs.
Avec le ministre des Télécoms Nicolas Sehnaoui, véritable père du projet, ils ont passé en revue toutes les possibilités. Le plus simple aurait été de suivre le modèle américain. C’est-à-dire d’attirer une grande compagnie comme Microsoft ou Google et de la pousser ensuite à créer un centre au Liban, qui servirait d’aimant à d’autres compagnies spécialisées dans le même domaine. Si ce centre est proche de grandes institutions universitaires, c’est encore mieux pour pouvoir développer la recherche et recruter les étudiants en leur fournissant des opportunités de travail. C’est un peu ce qui s’est passé dans ce qui est devenu Silicon Valley.
Mais les grandes compagnies n’ont pas été convaincues ou s’étaient déjà installées au Moyen-Orient.
L’autre alternative était de faire appel à l’État qui offrirait un terrain et construirait l’infrastructure, avant de la louer à bas prix. Cette idée exige un grand investissement de la part de l’État. Or, dans les circonstances actuelles, celui-ci n’est pas vraiment en mesure de se lancer dans de nouvelles dépenses. Il est au contraire en pleine phase de restriction budgétaire.
La troisième possibilité – et c’est là qu’une fois de plus le savoir-faire libanais est intervenu – c’était de faire appel au secteur privé. Des compagnies ont été sollicitées et Berytech a accepté de remplir le rôle d’incubateur et d’accélérateur pour créer « cette zone digitale » (où la qualité des services est élevée et les prix bas, grâce à une politique d’appâts fournis par l’État dans le domaine des impôts notamment.
Il restait à trouver le lieu pour commencer l’exécution. C’est ainsi qu’avec la société ZRE, un vaste terrain à Bachoura a été repéré. Le grand avantage de ce lieu est qu’il est situé au cœur de Beyrouth (l’ancien Beyrouth était connu grâce à trois principaux quartiers Bachoura, Basta et Achrafieh). De plus, il s’agit d’une région qui a longtemps été négligée et qui porte encore les stigmates de la guerre. Or c’est l’occasion de la développer, sans porter atteinte aux intérêts des habitants. Un terrain de 2 500m2 a déjà été trouvé et les travaux devraient commencer au début de 2013 et se poursuivre jusqu’en 2016. Le terrain pourrait être élargi jusqu’à atteindre 40 000m2.
Me Kobeïssy confie que l’idée a été lancée en janvier 2012 et un mois plus tard, le ministre des Télécommunications Nicolas Sehnaoui l’a transmise au Premier ministre Nagib Mikati qui l’a immédiatement approuvée et même s’est enthousiasmé pour elle. Elle a été soumise au Conseil des ministres qui l’a aussi adoptée et il a fallu tous ces mois pour qu’elle prenne forme. Le 3 septembre dernier, elle a été lancée officiellement et l’exécution a commencé. L’avantage de ce projet est de créer de larges opportunités d’emplois et de mettre le Liban sur la carte numérique en attirant toutes les industries et les compagnies qui gravitent autour de ce secteur. Kobeïssy révèle aussi que son objectif est de créer une zone numérique dans chaque mohafazat. Mais en attendant, c’est à Bachoura que commence le défi.