Fethi Belaid/AFP
La victime de 27 ans est repartie du tribunal de première instance de Tunis le visage caché par un foulard et des lunettes de soleil, sans s’exprimer. À son arrivée, elle avait déclaré, des sanglots dans la voix : « Le monde entier me soutient. Je demande votre soutien. » La victime du viol et son fiancé étaient interrogés dans le cadre d’une information judiciaire car, selon l’accusation, le couple a été surpris par les policiers dans une « position immorale » lors de leur interpellation. Deux agents ont alors conduit la jeune femme dans leur véhicule où ils l’ont violée pendant qu’un troisième tentait d’extorquer de l’argent au jeune homme.
La présidente de l’Association tunisienne des femmes démocrates, Ahlem Belhadj, qui représente aussi les intérêts de la victime, a indiqué que cette dernière était dans un état psychologique « très fragile », mais restait décidée à se battre. « C’est une affaire qui fait honte à la Tunisie. Dans notre culture, même au niveau de la loi, on a tendance à rendre les victimes responsables de leur viol », a-t-elle ajouté. Les policiers, incarcérés début septembre, risquent de lourdes sanctions, le viol avec violence étant théoriquement passible de la peine capitale en Tunisie où aucune exécution n’a cependant eu lieu depuis plus de vingt ans.
Plusieurs centaines de personnes ont par ailleurs manifesté hier en soutien à la victime devant le tribunal, brandissant des pancartes proclamant « Révolution volée, femme violée, petite fille voilée » ou encore « Violée ou voilée, faut-il choisir ? » Cette affaire a en effet déclenché un tollé en Tunisie, des opposants, des ONG et des médias considérant que ce dossier illustre la politique à l’égard des femmes menée par les islamistes qui dominent le gouvernement. Le Premier ministre, Hamadi Jebali, a, lui, dénoncé « avec force » le viol, dans un entretien au quotidien belge Le Soir, et promis que les policiers « seront jugés sévèrement ». Il ne s’est par contre pas prononcé sur les déboires judiciaires de la victime, relevant simplement qu’il y avait « peut-être, selon l’autorité judiciaire, un cas d’attentat à la pudeur ».
Depuis l’arrivée au pouvoir des islamistes d’Ennahda après la révolution de 2011, des ONG dénoncent le harcèlement de la police à l’égard des femmes. Les Tunisiennes bénéficient du statut le plus moderne du monde arabe depuis la promulgation du code de statut personnel en 1956 instaurant l’égalité des sexes dans certains domaines. Ennahda avait d’ailleurs déclenché un large mouvement de contestation en août en proposant d’inscrire dans la nouvelle Constitution la « complémentarité » des sexes et non l’égalité, un projet abandonné la semaine dernière.
(Source : AFP)
Et si l'on disait: Révolution violée et femmes et filles voilées!
05 h 41, le 03 octobre 2012