Le général Aoun recevant Adnane Kassar et Nicolas Chammas, respectivement présidents des organismes économiques et de l’Association des commerçants.
La campagne alarmante et sans précédent des organismes économiques contre l’adoption d’une nouvelle grille de salaires dans le secteur public se poursuit, et la perspective d’un choc frontal entre ces organismes et le comité représentatif des employés du secteur public se précise.
La délégation des organismes économiques présidée par M. Adnane Kassar, qui mène campagne, a rencontré hier le président de la Chambre, Nabih Berry, ainsi que Michel Aoun et Samir Geagea. Jeudi soir, elle avait rencontré Walid Joumblatt.
À l’issue de sa rencontre avec le chef du Courant patriotique libre, M. Kassar a été très explicite. Selon lui, l’adoption de la nouvelle grille des salaires par le gouvernement conduira le Liban « droit vers la catastrophe ».
« Nous ne sommes pas contre le fait d’accorder leurs droits aux employés et ouvriers, a-t-il redit. Mais rien ne m’oblige aujourd’hui à accorder des acquis fictifs qui se répercuteront négativement sur l’économie. À mon avis, la nouvelle grille n’a pas été suffisamment étudiée ; son financement ne doit pas avoir pour conséquences d’imposer de nouvelles taxes à 4 millions de Libanais. Dans le monde entier, les salaires sont à la baisse. L’entrée en vigueur de la nouvelle grille aggravera l’endettement de l’État de près de 2,2 milliards de dollars par an. Si la nouvelle grille est adoptée, le pays court droit à la catastrophe économique. »
Selon M. Kassar, le général Michel Aoun a « parfaitement compris » l’enjeu.
On sait que deux mémorandums en ce sens ont été soumis par les organismes économiques aux ministres de l’Économie et des Finances, ainsi qu’à la présidence de la commission parlementaire de l’Économie et du Commerce.
M. Kassar y met en garde, en particulier, contre « le choc fiscal » qu’entraînera l’adoption par le gouvernement du plan de financement de la grille des salaires, puisqu’il est question de lever quelque 4 milliards de dollars de nouvelles recettes pour financer une grille de salaires dont l’application sera échelonnée sur trois ans. Au nombre des mesures fiscales prévues figure une augmentation de 10 à 12 % de la TVA.
Berry acquis à la cause ?
Dans son communiqué, la délégation des organismes économiques affirme qu’elle « apprécie le rôle unificateur » joué en ce moment par le président de la Chambre. M. Berry serait-il acquis à leur cause ?
Toujours est-il que le communiqué rend hommage au chef du législatif pour son refus de toute augmentation que s’octroieraient, si la grille des salaires venait à être adoptée, les présidents, députés et ministres.
En fait, les organismes comptent sur une « compréhension » de M. Berry pour faire face au comité représentatif des ouvriers et employés du secteur public, dont les chefs ont accordé un ultimatum au gouvernement qui expire fin septembre.
Pour les organismes économiques, le gouvernement fait fausse route « à un moment où un marasme sans précédent frappe l’économie ».
En lieu et place de cette catastrophe annoncée, ils proposent « la rationalisation des dépenses, la lutte contre un gaspillage à une large échelle dans la plupart des administrations publiques, la lutte contre la corruption et la concussion, sans compter une stratégie économique et sociale qui conduirait l’État à investir dans des secteurs rentables ».
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