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À La Une - Éclairage

Entre 1975 et 2012, cherchez les différences...

En dépit du calme (précaire) retrouvé à Tripoli et du soudain regain de dynamisme du gouvernement, certains milieux politiques au Liban-Nord ne se sentent pas encore rassurés. Pour eux, la situation reste extrêmement complexe et elle ressemble de plus en plus à celle qui prévalait en 1975, au début de la guerre libanaise. Un notable de Tripoli explique ainsi qu’il a de plus en plus le sentiment de vivre une réédition de la période de 1975. À cette époque, la cause palestinienne divisait les Libanais en deux camps : d’une part, ceux qui considéraient les Palestiniens comme une force de soutien pour leurs revendications et, d’autre part, ceux qui, au contraire, les voyaient comme un facteur de déstabilisation parce qu’ils avaient pour objectif de construire un État à l’intérieur de l’État. C’est ainsi que la guerre civile a commencé et s’est prolongée sous diverses formes jusqu’en 1990, alors que les institutions de l’État avaient perdu toute crédibilité et étaient quasiment paralysées.


Aujourd’hui, selon ce notable, le même scénario est en train de se répéter, mais les Syriens ont remplacé les Palestiniens. La crise syrienne divise ainsi les Libanais en deux camps : d’une part, ceux qui appuient l’opposition et voient dans sa victoire une amélioration de leur position interne et, d’autre part, ceux qui appuient le régime et voient en sa victoire un renforcement de leur pouvoir interne. Face à cette division de plus en plus perceptible, notamment au Nord, les institutions de l’État sont en train de perdre leur prestige et leur autorité, avec notamment les campagnes contre l’armée et la confessionnalisation des services de sécurité, sans parler de la quasi-paralysie de la justice. Ce notable ne cache donc pas sa crainte d’une nouvelle déstabilisation au Nord d’abord puis dans tout le pays, en se basant sur le fait que les ingrédients sont là, notamment l’exacerbation des sensibilités confessionnelles. Selon lui, même en 1975, ce sont des minorités dans chaque camp qui ont fait la guerre et la population a subi les événements, parfois avec une certaine sympathie et parfois malgré elle.


À ce scénario pessimiste, une source haut placée répond par une minimisation des risques. Selon elle, en dépit des indices annonciateurs de catastrophes, les situations de 1975 et de 2012 sont bien différentes. D’abord, il existe aujourd’hui un grand éveil au sein de la population qui refuse sous n’importe quel prétexte d’être entraînée dans un nouveau cycle de violences. Preuve en est, ajoute la source haut placée, qu’au plus fort de la campagne confessionnelle contre l’armée, les soldats et les officiers sunnites n’ont pas bougé ni songé à se désolidariser de la troupe, pour ne pas la faire éclater comme cela avait été le cas en 1975. Au contraire, les incidents de Tripoli ont renforcé l’appui populaire à l’armée dont l’intervention est pratiquement réclamée par toutes les parties. L’armée continue donc de représenter pour la grande majorité des Libanais un recours et une garantie, et le dernier discours du commandant en chef de la troupe est aussi le reflet de cet appui populaire renouvelé. Le général Kahwagi a affirmé solennellement que l’armée continuera à assumer ses responsabilités dans la protection du pays et le maintien de la stabilité, et ces propos ont eu un écho très positif au sein de la population.


De plus, les grandes formations au Liban, notamment celles qui sont en mesure de provoquer une déstabilisation généralisée, sont conscientes de la gravité de la situation et ne veulent pas, en dépit des déclarations pompeuses visant à la consommation locale, se laisser entraîner dans une guerre civile. Le Hezbollah a répété à plusieurs reprises ses appels au calme, allant même jusqu’à promettre de sévir contre ceux qui bloquent les routes et annonçant qu’il ne se laissera pas entraîner vers la discorde. Que la décision ferme d’interdire tout blocage de la route de l’aéroport soit dictée par la crainte que le gouvernement songe à ouvrir l’aéroport de Kleiate, comme l’affirme le 14 Mars, importe finalement peu puisque le résultat va dans le sens de la stabilité. De son côté, le courant du Futur a désavoué ceux qui, dans son camp, s’en sont pris à l’armée. Au moment où certains députés de ce courant attaquaient l’institution militaire, leurs supérieurs contactaient le commandement de l’armée pour l’assurer de leur soutien. Et, en définitive, la troupe a augmenté sa présence au Nord et assume autant que faire se peut ses responsabilités le long des frontières. De même, lorsque le courant du Futur a senti que le sit-in de cheikh Ahmad el-Assir à Saïda devenait très impopulaire auprès des habitants de la ville, Ahmad Hariri s’est rendu auprès du cheikh et l’a convaincu de mettre un terme à son action. C’est dire que ce courant ne veut pas d’affrontements directs, préférant miser sur l’issue de la guerre en Syrie pour améliorer sa position interne, sans pour autant entraîner le Liban dans le chaos.

 

Dans le même contexte, il faut aussi signaler que les réfugiés syriens au Nord commencent à déranger la population de la région, qui se sent négligée, alors que toutes les ONG et des parties internationales et régionales multiplient les aides aux réfugiés, laissant les habitants locaux à leur misère. Au fil des jours, les réfugiés syriens sont en train de devenir un poids économique dans certains villages du Nord, ce qui rend plus improbable la possibilité de se laisser entraîner dans une guerre pour les aider.


Enfin, la source haut placée estime que la communauté internationale a clairement exprimé ces dernières semaines son attachement à la stabilité du Liban, et même l’ayatollah Khamenei l’a répété hier au président Michel Sleiman, sans parler des déclarations des responsables américains et européens.


Pour toutes ces raisons, la source haut placée estime qu’il n’y a pas lieu de craindre une réédition du scénario de 1975, mais elle ajoute qu’il faut sans cesse travailler à renforcer les éléments qui rassemblent les Libanais. L’idéal serait donc que les Libanais comprennent que leur appui à l’opposition syrienne ou au régime ne sert pas les intérêts de leur pays.

En dépit du calme (précaire) retrouvé à Tripoli et du soudain regain de dynamisme du gouvernement, certains milieux politiques au Liban-Nord ne se sentent pas encore rassurés. Pour eux, la situation reste extrêmement complexe et elle ressemble de plus en plus à celle qui prévalait en 1975, au début de la guerre libanaise. Un notable de Tripoli explique ainsi qu’il a de plus en plus le sentiment de vivre une réédition de la période de 1975. À cette époque, la cause palestinienne divisait les Libanais en deux camps : d’une part, ceux qui considéraient les Palestiniens comme une force de soutien pour leurs revendications et, d’autre part, ceux qui, au contraire, les voyaient comme un facteur de déstabilisation parce qu’ils avaient pour objectif de construire un État à l’intérieur de l’État. C’est ainsi que...
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