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À La Une - Affaire Hariri

Roux : « Pour moi, le procès a déjà commencé au TSL »

En visite à Beyrouth quelques jours avant la tenue de l’audience relative à la légalité du Tribunal spécial pour le Liban (les 13 et 14 juin), le chef du bureau de la défense au sein du TSL, François Roux, fait le point avec « L’Orient-Le Jour » de l’avancement de la procédure et du procès à proprement parler.

Roux : Il ne faut jamais préjuger de la décision des juges.

« Pour moi, le procès a déjà commencé depuis un certain temps, depuis le 2 février pratiquement, date à laquelle j’ai désigné les avocats de la défense. » C’est ce qu’affirme le chef du bureau de la défense au sein du Tribunal spécial pour le Liban, François Roux. En effet, estime le juriste, l’échange de documents qui a lieu depuis un certain temps entre la défense et l’accusation est significatif de l’ampleur et de l’intensité du travail réalisé au sein du TSL. Depuis plusieurs mois, explique M. Roux, les deux parties échangent requêtes, motions et conclusions par milliers de pages avec le procureur.


« Ils en sont aujourd’hui à 13 000 pages d’arguments dont une partie est gardée confidentielle en plus de 64 décisions rendues par la Chambre dont certaines sont des décisions de simple procédure », explique l’avocat qui précise que le tribunal « est une véritable ruche depuis quelque temps. Tout le monde travaille assidument et cela va aller en s’accroissant surtout depuis qu’il y a les avocats des représentants des victimes qui prennent désormais part à la procédure. Jusque-là, la défense et l’accusation échangeaient des arguments à deux parties, maintenant l’échange s’élargira à trois parties », dit-il.


« Certes, nous ne sommes pas à la phase où le procureur pourra présenter ses éléments de preuve, une phase qui prendra beaucoup de temps et qui n’est pas pour demain », dit M. Roux qui tient à rappeler que le procureur a mis 6 ans pour présenter son premier acte d’accusation.


D’ailleurs, le juge de la mise en état tiendra le 12 juin une audience à huis clos à laquelle prendront part le procureur et les avocats de la défense pour faire le point avec eux de l’avancement de la procédure. Cette audience vient s’ajouter à une autre qui a eu lieu il y a quelques semaines et à une troisième qui aura lieu dans les semaines qui suivront. « Ce qui veut dire que le juge de la mise en état joue son rôle pour vérifier que le procès ne prend aucun retard », assure le juriste.


Entre-temps, les avocats de la défense ne chôment pas puisqu’ils s’occupent, dès leur désignation, de deux activités majeures : les questions relatives à la procédure et à l’examen, puis l’analyse des 28 000 pièces justificatives de l’acte d’accusation qui leur ont été remises par le procureur.
Prié de dire s’il y a du neuf au niveau des personnes recherchées et si le bureau de la défense a tenté de les relancer d’une manière ou d’une autre, M. Roux répond qu’il n’a pas besoin de le faire et qu’il avait déjà dit ce qu’il avait à dire à ce niveau. Et de réitérer que le meilleur conseil qu’il peut leur donner est de consulter un avocat.
À la question de savoir si le débat des 13 et 14 juin sur la légalité du TSL va enfin replacer les discussions qui ont eu lieu, publiquement, sur ce thème dans le contexte juridique, il répond :
« Beaucoup de questions ont été soulevées soit dans la presse, soit dans des colloques, soit lors de débats politiques sur la légalité ou non du TSL. J’ai toujours dit que ces questions devaient être traitées devant le tribunal et au bout du compte ce sont les juges qui devraient donner des réponses, après un débat contradictoire, qui est la base de toute procédure. »


« Ce n’est plus un débat politique mais juridique », s’empresse d’ajouter M. Roux qui rappelle que les avocats de la défense ont déjà déposé des mémoires « extrêmement construits avec des arguments très pertinents », soulignant que l’accusation et les représentants des victimes devaient le faire mercredi soir.
« Ainsi, nous aurons deux versions opposées. C’est cela la justice. La seule chose que je peux dire c’est que l’on parle enfin de façon contradictoire devant les juges et je m’en réjouis d’avance », commente M. Roux qui se contente de souligner que les avocats de la défense ont développé tout un argumentaire sur la façon dont la création du tribunal s’est faite et sur la question de l’intervention du chapitre VII de la Charte de l’ONU dans la création de l’institution judiciaire.


Il rappelle pour l’occasion que le bureau de la défense n’interviendra pas dans le débat qui se déroulera entre les avocats de la défense et le procureur, même si les représentants du bureau de la défense seront présents à l’audience « au cas où la Chambre souhaite nous poser des questions et que nous devions intervenir ».


M. Roux rappelle que le bureau de la défense a un rôle subsidiaire qui consiste à apporter aux équipes de défense le soutien juridique et logistique. L’assistance juridique consistait notamment, au cours des trois dernières années, à préparer en amont les études juridiques en vue de l’arrivée des équipes de la défense.
« Nous avons travaillé sur un certain nombre de points, dont la légalité du tribunal. C’est ensuite à eux de décider de s’en servir totalement ou partiellement et de fixer leur propre stratégie », dit-il.


Prié de préciser quel est le véritable intérêt d’une audience dont on connaît généralement d’avance les conclusions, les juges ne pouvant statuer sur leur propre incompétence en déclarant le TSL illégal, le chef du bureau de la défense répond :
« Il ne faut jamais subodorer ce que peut être la position d’un juge. Quels que soient les supputations, pronostics, voire même le cynisme que l’on peut parfois avoir, je ne préjuge jamais de la décision des juges. Ce serait d’ailleurs leur faire injure et je n’ai pas l’habitude de le faire », dit-il.
« Certes, reconnaît le juriste, l’audience en elle-même est classique dans les tribunaux internationaux parce que la défense soulève toujours au départ la question de la compétence du tribunal, exception faite pour le tribunal du Cambodge. À l’issue du débat, les juges peuvent soit faire droit à la requête de la défense en déclarant que le tribunal a été effectivement mis en place illégalement, une décision qui peut, bien entendu, faire l’objet d’un appel, soit ils peuvent rejeter les arguments des requêtes de la défense à condition de motiver leur rejet, déclare M. Roux. Là aussi, il peut y avoir des surprises » dit-il, en conseillant d’attendre l’audience pour juger.


M. Roux ne manque pas d’évoquer, à juste titre, l’objection dont font part plusieurs juristes, notamment le fait de savoir s’il est normal que ce soit les juges eux-mêmes qui jugent de leur propre compétence. Cette problématique, dit-il, se pose puisque « dans l’état actuel des choses, il n’existe pas de cour constitutionnelle universelle – et je fais partie de ceux qui le regrettent ». Et de conclure : « On peut espérer que dans quelques années, les Nations unies réfléchiront à l’idée de donner cette compétence à la Cour internationale de justice, par exemple. »


Notons au passage que M. Roux a rendu visite lors de son séjour à l’ancien chef de gouvernement, Fouad Siniora, au chef du parti des Forces libanaises, Samir Geagea, au chef du courant patriotique libre, Michel Aoun, et au leader du PSP, Walid Joumblatt.

« Pour moi, le procès a déjà commencé depuis un certain temps, depuis le 2 février pratiquement, date à laquelle j’ai désigné les avocats de la défense. » C’est ce qu’affirme le chef du bureau de la défense au sein du Tribunal spécial pour le Liban, François Roux. En effet, estime le juriste, l’échange de documents qui a lieu depuis un certain temps entre la défense et...

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