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À La Une - Table ronde

Au Salon du livre de Paris, perspectives de paix au Liban et voyage au bout... de l’optimisme avec Samir Frangié

Le « voyage au bout de la violence » de Samir Frangié se poursuit.
C’est cette fois le 32e Salon du livre de Paris, à la Porte de Versailles, qui a été la nouvelle étape de cette odyssée.

Au cours de la table ronde au Salon du livre de Paris, de gauche à droite : Ghassan Salamé, Farouk Mardam-Bey, Samir Frangié, Marc Kravetz, Alexandre Najjar et Henry Laurens.

Le dernier ouvrage de Samir Frangié, Voyage au bout de la violence, unanimement salué partout, l’a encore été jeudi, dans le cadre du 32e Salon du livre de Paris, à la faveur d’une table ronde prestigieuse animée par le journaliste de France Culture Marc Kravetz. Ayant pour thème « Les perspectives de paix au Liban », la table ronde a été organisée par les éditions L’Orient des livres et Actes Sud (grâce aux bons soins de Hind Darwish). Elle a regroupé, à la Porte de Versailles – où se tient le Salon du livre de Paris –, l’ancien ministre Ghassan Salamé, l’éditeur et écrivain Farouk Mardam-Bey, l’écrivain Alexandre Najjar et l’historien Henry Laurens.
Devant une salle comble, cosmopolite et enthousiaste, Samir Frangié a été comme d’habitude bref et lapidaire. Il a ainsi rappelé


qu’« il n’y a pas de paix glorieuse ou de paix des braves, mais rien qu’une paix normale, banale, quotidienne », manifestant – c’est son signe distinctif – de l’optimisme quant à la possibilité de la diffusion d’une culture de paix non seulement au plan libanais, mais à l’échelle régionale, par le biais du printemps arabe.
Nettement plus sceptique, Henry Laurens n’a pas été sans exprimer certains doutes quant à « l’optimisme fondamental » de Samir Frangié, en s’appuyant sur « les récentes bagarres autour du manuel d’histoire unifié dans les rues de Beyrouth ».


Pour Alexandre Najjar, l’essai de Samir Frangié est « salutaire » et « doit servir d’exemple à la nouvelle génération afin qu’elle assimile les erreurs commises par les aînés et qu’elle échappe une fois pour toutes à cette spirale de violence qui a détruit le Liban ».


C’est en tant qu’opposant syrien que Farouk Mardam-Bey s’exprime de son côté pour rendre hommage à Samir Kassir et à son équation qui établit un lien de corrélation entre l’indépendance du Liban et la démocratisation de la Syrie. « J’ajouterais aussi que la démocratisation de la Syrie dépend de l’indépendance du Liban », souligne M. Mardam-Bey. Dénonçant l’inachèvement des États-nations dans la région en raison, pêle-mêle, de certaines formes de libanisme, du panarabisme, du pansyrianisme – ou de « l’ambition et du mythe d’une Syrie intégrale qui regrouperait l’ensemble du Bilad el-Cham et qui n’a jamais existé historiquement » – et du panislamisme, Farouk Mardam-Bey insiste sur la nécessité de « l’établissement de territoires nationaux bien définis et acceptés ». « La question des frontières et de leur respect est extrêmement importante pour des relations saines entre la Syrie et le Liban, fondées sur l’égalité et la réciprocité », dit-il. Et d’ajouter que ces relations saines pourraient accélérer une approche arabiste normale, mais aussi accélérer la mise en place d’un ensemble cohérent à l’échelle régionale et méditerranéenne.


Après le splendide hommage de Ghassan Salamé (voir par ailleurs) à l’optimiste invétéré qu’est Samir Frangié, et qui émeut au plus haut point l’auteur, ce dernier répond du tac au tac : « Je suis malheureusement toujours optimiste. Quand on veut, on peut. Je suis même plus optimiste que jamais à l’instant présent, parce que les perspectives que le printemps arabe ouvre sont immenses, malgré les difficultés. »

Le débat
Et puis, c’est le débat, plutôt bref, par manque de temps. Henry Laurens, le plus chevronné des historiens et des spécialistes du monde arabe, reconnaît « la surprise provoquée par le printemps arabe et l’impossibilité de prévoir l’avenir ». Mais entre l’immense espérance et le retour au réel, Henry Laurens souhaite que ces révolutions marquent un retour vers la normalité, c’est-à-dire vers la décence et la dignité de la vie.


Alexandre Najjar reste lui aussi optimiste, comme Samir Frangié. « Ce n’est que le début, dit-il. La chute du tyran n’est que le début de la révolution. Il est impossible de régler d’un coup de baguette magique toutes les contradictions au sein de sociétés qui ont vécu pendant quarante ans sous le joug de tyrannies. Entre la dictature et l’islamisme, c’est-à-dire entre la peste et le choléra, il y a une troisième voie, démocratique », souligne Alexandre Najjar, en souhaitant que les révolutions arabes ne soient pas toutes inachevées, comme le printemps de Beyrouth l’a été.


C’est d’ailleurs sur ce point que revient Farouk Mardam-Bey, qui souhaite savoir comment les Libanais ont pu passer à côté d’un instant comme celui du 14 mars 2005. « Le système politique est totalement bloqué au Liban, et je ne vois pas dans les déclarations et les programmes politiques les indications d’une issue possible », dit-il, citant, pour expliquer les raisons de ce blocage, la théorie du sociologue Ahmad Beydoun sur la surconfessionnalisation du système libanais, qui ne fonctionnait vraiment que lorsqu’il se trouvait des majorités et des minorités parlementaires vraiment transcommunautaires. Or, depuis 2005, soutient Farouk Mardam-Bey, il existe un monopole de la représentation communautaire par une force politique, ce qui a pour résultat que n’importe quel différend politique bloque le système et le menace d’implosion.


Quant à Ghassan Salamé, il enchaîne, lui, sur le printemps arabe, en craignant qu’il ne comporte en fait « quatre saisons en une seule ». « Ce printemps va s’étendre géographiquement et se prolonger », dit-il, estimant que la phase actuelle est une phase de transition, durant laquelle la qualité des intervenants politiques sera essentielle. Il ne faut donc pas s’attendre à des résultats immédiats, mais à des cycles qui s’étaleront sur plusieurs années.


Et Samir Frangié de boucler la boucle en évoquant « le sentiment d’empathie » entre tous ces peuples arabes et le lien entre « celui qui s’est immolé » (Mohammad Bouazizi) et « celui qui a été immolé » (Rafic Hariri), les deux figures qui ont déclenché les deux mouvements.


La question (au Liban) est de savoir comment renouer avec « ce moment fondateur », souligne Samir Frangié. Il s’agit là, à n’en point douter, de la question que se posent nombre de Libanais aujourd’hui, au lendemain de l’anniversaire du 14 Mars au BIEL.
Au terme de la causerie, Samir Frangié et Alexandre Najjar ont signé leurs derniers ouvrages respectifs.

Le dernier ouvrage de Samir Frangié, Voyage au bout de la violence, unanimement salué partout, l’a encore été jeudi, dans le cadre du 32e Salon du livre de Paris, à la faveur d’une table ronde prestigieuse animée par le journaliste de France Culture Marc Kravetz. Ayant pour thème « Les perspectives de paix au Liban », la table ronde a été organisée par les éditions L’Orient...

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