Rechercher
Rechercher

À La Une - Portrait

Kadhafi, l'"électron libre" du monde arabe

Un dirigeant hors norme, qui a suscité tour à tour beaucoup d'admiration, d'irritation, puis de haine.

Fils de bédouin, né en 1942 à Syrte, le guide de la révolution est devenu au fil des ans une figure familière de la scène internationale, où son art du contre-pied explique en partie sa longévité.

 

Kadhafi a toujours attaché un soin extrême à son apparence, s'exhibant tantôt en boubou aux couleurs chatoyantes, enturbanné du chèche de l'homme du désert, tantôt en uniforme, casquette et décorations d'officier d'opérette.

Lors de ses apparitions publiques, le colonel s'entourait toujours d'une "claque" de partisans zélés et physiquement protégé de fidèles "amazones" armées de kalachnikovs et vêtues de treillis moulants.

 

Un ascendant "moral"

 

Le jeune Mouammar suit sa scolarité dans l'oasis occidentale de Sebha, fief de sa tribu Kadhafa, la seconde en importance du pays, puis des études de géographie à l'université de Benghazi, qu'il interrompt pour s'engager dans l'armée.

Dix-huit ans après l'indépendance obtenue sous la houlette d'Idriss Ier, un groupe officiers subalternes d'inspiration nassérienne, dont le jeune Kadhafi, alors âgé de 27 ans, déposent le roi sans effusion de sang la faveur de son voyage en Grèce.

Idriss abdique quelques jours plus tard et Kadhafi prend la tête d'un Conseil de commandement de la Révolution (CCR). En 1977, un autre organe, le CGP (Conseil général du peuple), remplace le CCR et Kadhafi en devient secrétaire général. Il en démissionne deux ans plus tard.

Dès lors, il assurera ne plus occuper de fonction officielle mais il revendique le rôle de "guide" suprême d'une Libye sans chef d'Etat, sur laquelle il disait avoir seulement un ascendant "moral".

 

 

Le "parrain du terrorisme"


Durant l'essentiel de son règne, l'ex-capitaine a figuré en bonne place dans la galerie des dirigeants tenus pour des voyous internationaux par l'Occident. Pendant des décennies, Kadhafi est accusé par les Etats-Unis et leurs alliés de "parrainer le terrorisme". On lui reproche pêle-mêle de soutenir des groupes extrémistes palestiniens, les séparatistes basques de l'ETA, les républicains irlandais de l'Ira ou les activités des Brigades rouges en Italie.

 

On l'accuse de plus d'avoir commandité des attentats à la bombe dans une discothèque berlinoise fréquentée par des militaires américains, en 1986, contre un Boeing de la Pan Am au-dessus de la localité écossaise de Lockerbie (270 morts), en 1988, et contre un DC-10 d'UTA entre Brazzaville et Paris, en 1989 (170 morts).

En représailles à l'attentat de Berlin, Ronald Reagan qui le traite de "chien fou" ordonne le 15 avril 1986 des raids aériens contre Benghazi ainsi que la caserne de Bab Azizia, le QG de Kadhafi à Tripoli.

En 1992, le Conseil de sécurité impose des sanctions à la Libye, dont un embargo frappant ses installations pétrolières. Les sanctions internationales produisent progressivement leurs effets. Kadhafi met en sourdine sa rhétorique anti-occidentale.

En 1999, il accepte de livrer deux Libyens soupçonnés d'implication dans l'attentat de Lockerbie. A l'issue d'un procès organisé aux Pays-Bas en vertu du droit écossais, l'un est acquitté et l'autre, Adbelbasset Ali al Megrahi, condamné à la prison à vie.

Le 23 février 2011, l'ancien ministre libyen de la Justice, Moustapha Abdeljalil, qui a lâché Kadhafi, affirme que Megrahi a reçu directement de Kadhafi l'ordre de commettre l'attentat de Lockerbie.

Megrahi sera libéré en 2010 pour raisons humanitaires - il souffrirait d'un cancer en phase terminale. Rapatrié à Tripoli, il est accueilli en héros et survit à sa maladie. Entre-temps, la British Petroleum a repris ses activités en Libye.

Tripoli ayant reconnu le rôle de certains de ses ressortissants dans l'attentat de Lockerbie, le Conseil de sécurité lève ses sanctions à l'unanimité en septembre 2003.

 

C'est à la même période, en décembre 2003, que Kadhafi, toujours soucieux de devenir un acteur international fréquentable, crée la surprise en abandonnant ses programmes d'armes de destruction massive.

Mais lorsque la vague de révoltes populaires qui balaye le Moyen-Orient atteint son pays sept ans plus tard, il promet un bain de sang à ceux qui contestent son pouvoir et retrouve aussitôt son rôle de paria de la communauté internationale.

Horrifié par l'ampleur de la répression, le Conseil de sécurité des Nations unies le bannit une fois de plus de la communauté internationale et le promet au jugement de la Cour pénale de La Haye.

 

 

Déçu par ses "frères arabes"

 

Durant les années 1970, Kadhafi expose les principes de sa "troisième théorie universelle", une voie moyenne entre marxisme et capitalisme, mâtinée d'autogestion, qui feront l'objet des trois tomes de son fameux "livre vert".

Dans la foulée de la "Révolution du 1er septembre", Kadhafi favorise le développement rapide de son pays, investissant fortement dans le secteur pétrolier et relevant le niveau de vie moyen de la population, ce qui lui valut les bonnes grâces des couches défavorisées.

Sur le plan intérieur, il mate toute opposition. Le régime matera dans le sang la rébellion islamiste de l'été 1996 dans la région de Benghazi.

En politique étrangère, il détonne par ses choix et revirements multiples. Admirateur de l'Egyptien Gamal Abdel Nasser et champion autoproclamé du panarabisme, Kadhafi tente dans les années 1970 des unions sans lendemain avec des pays comme la Syrie et l'Egypte, puis avec la Tunisie, voire l'Algérie.

Il lui est arrivé plus d'une fois de surprendre ses "amis arabes". Il soutient ainsi le régime islamique iranien, chiite et non arabe, dans sa guerre de 1980-88 contre le régime de Bagdad, soutenu par l'Occident et la plupart des autres pays arabes.

Farouche adversaire d'Israël et des Arabes composant avec l'Etat juif, il expulse en 1995 de Libye des milliers de Palestiniens, affirmant qu'ils doivent rentrer "chez eux" dans les territoires gérés par l'Autorité autonome.

Frustré par ses échecs successifs avec ses "frères" arabes, c'est vers l'Afrique sub-saharienne qu'il cherchait ces dernières années à assouvir ses rêves unionistes - ou hégémoniques.

 

Fils de bédouin, né en 1942 à Syrte, le guide de la révolution est devenu au fil des ans une figure familière de la scène internationale, où son art du contre-pied explique en partie sa longévité.
 
Kadhafi a toujours attaché un soin extrême à son apparence, s'exhibant tantôt en boubou aux couleurs chatoyantes, enturbanné du chèche de l'homme du désert, tantôt en uniforme,...
commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut