Antonio Andari, de la Fondation maronite dans le monde, a retrouvé à San Antonio une de ses lointaines parentes. Photo F. N.
En attendant le grand rendez-vous de Los Angeles (Californie), où il sera en présence de représentants de tous les courants et partis politiques libanais, y compris du courant du Futur, du courant aouniste, des Kataëb et des Forces libanaises, le patriarche Raï a effectué vendredi une brève visite à la communauté maronite de San Antonio (Texas), où il a passé la nuit.
Il y est arrivé de Houston, à bord d’un jet privé mis à sa disposition par Sami el-Khoury, ancien président de l’Union maronite mondiale, une organisation qui a connu ses heures de gloire, avant que la désunion des Libanais ne la mine et ne lui enlève toute sa vitalité.
Encore heureux que le patriarche profite ainsi de ce moyen de déplacement, qui lui ménage quelques heures pour souffler et se reposer, entre deux rencontres. Le rythme de cette tournée pastorale défie en effet le bon sens. Ses organisateurs ainsi que les journalistes qui la couvrent n’ont parfois pas le temps de fermer l’œil, eux qui doivent aussi relever le défi du décalage horaire : dix heures d’écart entre Beyrouth et Los Angeles, qui se lève alors que le Liban est prêt d’achever sa journée.
La rencontre avec les maronites de San Antonio a été, pour le patriarche, une heureuse surprise. Il s’y est senti « chez lui et parmi les siens », pour le citer, comme un villageois se sentirait chez lui à l’ombre d’un vieux chêne. Les maronites de San Antonio sont en effet une communauté pacifiée, bien différente de celle de Houston. Natifs d’une ville de très ancienne émigration, ils n’ont plus rien à prouver : ils sont morts pour les États-Unis durant la Seconde Guerre mondiale ou en Corée. Ce sont des Américains à part entière qui ont perdu le contact avec la langue arabe, ou la parlent avec un accent, mais dont la sensibilité maronite est restée étonnamment jeune et vivante.
L’église Saint-Georges, où la communauté se retrouve, est servie par un pasteur de l’ordre mariamite, le père Ghassan Matar. Jeunes et vieux, y compris les anciennes avec les rubans bleus de l’Immaculée, ont suivi la messe avec ferveur. Une messe animée par une grande musicienne, Deborah Mery Fernandez, dirigeant une admirable chorale. Les chants maronites, servis par une polyphonie savante, ont soulevé l’enthousiasme de tous. Les chants liturgiques étaient, pourtant, prononcés phonétiquement.
Au cours du sobre dîner qui a suivi la messe, le patriarche devait apprendre que San Antonio a déjà reçu la visite de deux de ses prédécesseurs, les patriarches Méouchy et Khoreiche, la visite de ce dernier remontant à 1981. La présence personnelle du patriarche est accueillie avec révérence par ces maronites de vieille souche. Il est plus que touchant de voir certains hommes et femmes se signer aux processions d’entrée et de sortie de la messe, comme s’ils voyaient passer l’Eucharistie.
Le poids que porte sur ses énergiques épaules le patriarche n’en est que plus écrasant, tant les espoirs et attentes placés en lui sont lourds. Conscient des besoins pastoraux qui guettent l’Église de la diaspora, le patriarche n’hésite pas à appeler les jeunes fidèles de ces congrégations à répondre à l’appel de la vocation, si celle-ci se manifeste.
Mais, leitmotiv de ses récentes rencontres, à Cleveland, Houston et San Antonio, le patriarche semble particulièrement soucieux de les encourager aussi à renouer le contact avec le Liban et, si possible, à postuler à la nationalité libanaise.
À cette fin, la Fondation maronite dans le monde, dont le représentant, Antonio Andari, accompagne le patriarche, a encouragé la rédaction d’une proposition de loi accordant la nationalité libanaise à tous les descendants d’émigrés libanais dont les noms figurent encore aux registres de l’état civil libanais. Légalement, ce n’est que leur droit et la proposition de loi est en ce moment à l’examen au service du contentieux du ministère de la Justice. La Fondation maronite dans le monde fait de son mieux pour qu’elle soit passée au plus tôt.
L’objectif ultime de cette démarche, outre les droits politiques et économiques qu’elle offre, est aussi de corriger le déséquilibre démographique qui se creuse entre Libanais chrétiens et musulmans. À terme, estime la fondation, que le patriarche Raï cite à chaque reprise serait la précieuse convivialité islamo-chrétienne qui serait menacée de disparition.
C’est l’un des thèmes majeurs martelés par le patriarche, comme dans une répétition générale, avant les rencontres qui l’attendent à Los Angeles, samedi et dimanche, et puis à New York, ultime étape de sa tournée de trois semaines.