« Historique », « miraculeux » ou simple « sursis », la presse belge soulignait hier l’importance de l’accord arraché de haute main par le Premier ministre pressenti Elio Di Rupo dans la nuit de mercredi à jeudi. Les négociateurs se sont entendus sur la délicate question des droits des francophones de la banlieue flamande de Bruxelles, un dossier qui empoisonne la vie politique belge depuis un demi-siècle. Après 10 heures de négociations sous une tension maximale et une dramatisation sans précédent – le roi Albert II est rentré précipitamment de vacances –, les huit partis flamands et francophones sont parvenus à un compromis sur l’épineux dossier de l’arrondissement électoral de Bruxelles-Hal-Vilvorde, dit « BHV ». Ce dernier arrondissement électoral bilingue du royaume, qui réunit Bruxelles et 35 communes de sa périphérie flamande, sera bien « scindé », comme l’exigeaient unanimement les partis néerlandophones. Mais les francophones vivant dans six communes flamandes jouxtant directement Bruxelles, où ils sont majoritaires, pourront, lors des élections législatives et européennes, choisir de voter pour des candidats francophones se présentant dans la capitale.
Cette avancée doit d’abord être validée par les huit partis engagés dans les négociations, alors qu’elle fait déjà l’objet d’un tir de barrage des indépendantistes flamands de la N-VA exclus, il est vrai, des pourparlers. Elle pourrait aussi être rejetée par les Fédéralistes francophones (FDF), une branche du parti libéral MR, qui ne devraient toutefois pas être en mesure de la faire échouer. Surtout, Elio Di Rupo va à présent devoir boucler d’autres dossiers ardus : le transfert de nouvelles compétences vers les régions, notamment dans les domaines de l’emploi, et celui du financement de celles-ci, une question qui risque de donner lieu à de nouvelles crispations puisqu’elle touche aux portefeuilles des citoyens. Ensuite, les négociateurs devront s’entendre sur le programme socio-économique de la future coalition, probablement marqué par la rigueur budgétaire. Un défi puisque les huit partis – socialistes, libéraux, écologistes et centristes, flamands et francophones – défendent des programmes a priori peu compatibles.
Le journal le plus populaire en Flandre, Het Laatste Nieuws, a salué hier l’habileté d’Elio Di Rupo qui pourrait devenir, à 60 ans, le premier francophone à occuper le poste de Premier ministre depuis les années 1970.
Elio Di Rupo, désireux de surfer sur ce premier succès en plus de 450 jours de crise, devait entamer ce nouveau chapitre des négociations dès hier. L’enjeu est lourd puisqu’en cas d’échec de ces discussions, l’accord de mercredi soir serait caduc. Mais, en tout état de cause, la journée de mercredi est déjà entrée dans les annales de l’histoire politique du royaume.
(Source : AFP)