Toujours diplomate, Nagib Mikati maintient avec le concours d’amis communs de larges passerelles de communication avec le Hezb. Dans l’espoir de lui faire accepter un arrangement consacrant, au prix sans doute de quelques jongleries lexiques, la poursuite du financement libanais (49 %) du TSL. En base du principe de respect des obligations internationales du Liban, surtout à l’égard de l’ONU.
Selon des sources informées, plusieurs motivations animent le chef du cabinet. Tout d’abord, il se considère comme personnellement engagé dans la quête de la vérité, donc dans la persistance du tribunal. Il tient à ce que tout soit mis en œuvre pour que justice soit rendue dans l’assassinat du président Rafic Hariri. Et que la communauté sunnite, la sienne propre, obtienne donc justice.
À ce propos même, ses proches affirment qu’il est soucieux de bien servir les intérêts de sa collectivité. Et qu’il rejette dès lors la vindicte du 8 Mars, son partenaire, ciblant des symboles tels que le général Achraf Rifi, directeur général des FSI, le chef du service d’informations de ce corps, le colonel Wissam el-Hassan, le président d’Ogero, Abdel Menhem Youssef, le procureur de la République, Saïd Mirza, et d’autres encore. Tous accusés, notamment par le CPL, d’être des haririens.
Le général Michel Aoun, devant le bouclier Mikati, soutient que ce dernier enfreint la loi. Mais l’intéressé fait la sourde oreille : il ne veut polémiquer avec personne.
Retour au financement. Mikati estime que le Liban ne peut pas désobéir à la légalité internationale, à ses résolutions, car il serait privé d’assistance. Il risquerait en outre des sanctions que son économie, déjà exsangue, ne pourrait pas supporter, et le pays courrait à la ruine, à la famine.
Quoi qu’il en soit, avec ou sans effet Mikati sur lui, le Hezbollah est en phase de temporisation au sujet du financement du TSL qu’il combat. Il ne veut pas proclamer de position trop vite, car il lui faut éviter tout faux pas avant d’avoir bien saisi dans quel sens vont les développements en cours. Aussi bien sur le plan régional qu’à l’intérieur. Tout comme il pense préférable d’en référer, avant toute décision, à ses alliés, ainsi qu’à ses partenaires de pouvoir.
On sait, à ce propos, que Walid Joumblatt a fait savoir sans tarder son soutien au financement. Et que Aoun, lui, a de suite répliqué qu’il est contre.
Par ailleurs, le Hezbollah préfère s’épargner la bourde inverse de celle qu’à son avis (actuel) il aurait commise en 2006. Lorsqu’il avait approuvé, en comité de dialogue national, la création du TSL.
Frustration
Certaines composantes de l’exécutif expriment le sentiment que le président Michel Sleiman, le président Nagib Mikati et le député Walid Joumblatt, le centre en somme, serrent fortement les rênes entre leurs mains. En faisant barrage à la majorité. Alors qu’à leur avis la couleur grise, ni noire ni blanche, qu’adoptent les centristes doit être prohibée. Ce qui a porté Michel Aoun à déclarer que Nagib Mikati et Walid Joumblatt agissent avec la mentalité du 14 Mars.
Les attaques des radicaux du 8 Mars visent particulièrement Joumblatt. Dans la perspective de la bataille des nominations qui s’annonce. Par rapport à cet important dossier, il s’agit pour cette fraction de porter Mikati à se détacher du leader politique de la Montagne.
Un opposant observe que devenus experts de l’art du blocage gouvernemental sous Saad Hariri, les prosyriens ne comptent pas permettre aux centristes d’en user à leur propre encontre.
En tout cas, une fois encore, la nouvelle majorité affiche son déficit total de cohésion. Selon un parlementaire souverainiste, il est largement démontré que c’est là une majorité préfabriquée, imposée du dehors comme par le Hezb, et qui n’a aucune consistance. À preuve les prises de position de Joumblatt, qui s’éloigne du 8 Mars pour se déclarer fondamentalement centriste, mû par ses convictions et non par l’attraction magnétique d’un camp déterminé. Il reste que son souci d’objectivité le rend proche des thèses que défend le 14 Mars. De sorte qu’il aurait prié les responsables du PSP d’accepter de participer à des activités organisées par l’opposition (conférences, colloques, etc.), s’ils y sont conviés.
Pour ce qui est du Hezbollah, des diplomates estiment qu’il développe une assez mauvaise lecture des développements régionaux. Pour ce qui est de la Syrie, bien sûr. Mais également plus haut : selon eux, il y aurait présentement des concertations intensifiées et un rapprochement, entre les Américains et les Iraniens, au sujet de l’Irak. Ils ajoutent que le Hezb doit prendre conscience de la gravité de toute escalade sécuritaire ou politique inconsidérée.
Précisant que la confirmation de son veto total au financement du TSL risque de faire sauter le gouvernement. Aux dépens, bien entendu, de la nouvelle majorité, le 14 Mars redevenant majoritaire, par rapport au 8 Mars, et pouvant alors composer avec le centre, Sleiman-Joumblatt-Mikati-Safadi.
La majorité actuelle se délecte passionnément des turpitudes et des allégations qui éclaboussent en ce moment le Parti de Dieu et veut en meme temps accepter le financement libanais pour le TSL. Vrai dilemne politique . Antoine Sabbagha
06 h 20, le 15 septembre 2011