Erdogan a entamé mardi en Egypte une tournée qui l'a ensuite conduit en Tunisie avant de se rendre jeudi en Libye. Mohamed Abd El-Ghany/
Ankara ne doit pas chercher à dominer le Proche-Orient, ont dit mercredi les Frères musulmans d'Egypte au Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, reçu en grande pompe la veille au Caire. "Nous apprécions la Turquie et nous considérons Erdogan comme un dirigeant de grande importance mais nous ne pensons pas que lui ou son pays doivent diriger seuls la région ou dessiner son futur", a dit Essam el-Eriane, chef adjoint du Parti de la Liberté et de la Justice, mouvement politique créé après la chute de Hosni Moubarak en février dernier.
Le parti d'Erdogan, aux racines islamistes et fort de grands succès électoraux, est un modèle pour la plupart des Frères musulmans et d'autres partis qui se préparent aux premières élections législatives en Egypte depuis la chute du "raïs". Mais les Frères musulmans cherchent à éviter toute ingérence étrangère. Le projet de chaque pays "doit émerger des nouveaux systèmes internes aux pays arabes qui, après les révolutions, (...) seront démocratiques", a dit Eriane, qui était incarcéré sous le règne de Moubarak.
Le responsable du parti des Frères musulmans a cependant salué le succès politique d'Erdogan et son apport à l'économie turque, comme son soutien aux causes des pays arabes. "Il s'est impliqué avec succès dans le problème central du monde arabe et musulman, qui est le cas palestinien", a-t-il dit. Ankara a adopté une position ferme envers Israël après la mort de neufs militants turcs pro-palestiniens lors de l'arraisonnement par l'armée israélienne d'un bateau humanitaire à destination de la bande de Gaza en mai 2010.
Jusqu'à récemment, sa politique étrangère était centrée sur un rapprochement avec l'Union européenne et un alignement sur les intérêts stratégiques des Etats-Unis. Ankara affichait sa volonté d'entrer dans l'Europe et montrait peu d'intérêt pour ce qui se passait dans son arrière-cour au Proche-Orient.
Selon un haut responsable du ministère turc des Affaires étrangères, Erdogan a dit aux Frères musulmans qu'il les aiderait uniquement si ceux-ci le désiraient. "Nous ne disons pas que nous allons venir vous apprendre ce qu'il faut faire, nous disons que nous pouvons vous aider si vous le voulez", a-t-il dit, selon ce diplomate.
Mardi, Erdogan a tenu un discours en faveur de la démocratie et de la liberté. "Le message de liberté parti de la place Tahrir (du Caire) a été une lumière d'espoir pour tous les opprimés à Tripoli, Damas et Sanaa", a dit le Premier ministre turc, salué debout à plusieurs reprises.
Mercredi, la presse égyptienne faisait l’éloge du responsable turc. M. Erdogan "est un homme qui a de vraies capacités de leadership qui inspirent tous ceux qui sont autour de lui", a écrit l'éditorialiste Moataz Abdel Fatah dans le quotidien indépendant Al-Shorouk. "Nous avons besoin de quelqu'un comme lui: fort, expérimenté, digne de confiance, honnête et qui respecte la loi et les institutions", a-t-il ajouté.
"Prêtez-nous Erdogan pour un mois !", s'est exclamé un autre éditorialiste, Mohammed Amin, dans le quotidien libéral Al-Wafd. Il a reproché au précédent régime égyptien d'avoir "rejeté la Turquie et l'Iran en préférant négocier avec Israël". "Mais Erdogan sait que l'Egypte peut diriger la région et que si elle se dresse, toute la rue arabe se dressera. C'est ce que le précédent régime n'avait pas compris", a-t-il affirmé.
Un autre éditorial dans le journal gouvernemental Egyptian Gazette a salué "le statut de la Turquie et l'importance qu'elle a gagnée en quelques années qui a permis à Erdogan de parler sur un pied d'égalité avec Israël".
Le parti d'Erdogan, aux racines islamistes et fort de grands succès électoraux, est un modèle pour la plupart des Frères musulmans et d'autres partis qui se préparent aux premières élections législatives en Egypte depuis la chute du "raïs". Mais les Frères musulmans cherchent à...