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Le oui à la guerre

À quelques mois du quatrième anniversaire de la victoire divine dont le bilan s'est élevé à 1 500 morts libanais, des dizaines de milliers de maisons rasées et des milliards de dollars en destructions, le roulement des tambours de la guerre se fait de nouveau entendre et les mises en garde pleuvent de Washington, Paris, Ankara et d'autres capitales concernées par ce chaudron permanent qu'est le Moyen-Orient.
Israël, de son côté, alterne le chaud et le froid, multiplie les menaces et les démentis timides, mais attend, en fait, le moment propice pour saisir l'argument qui lui permettra, encore une fois, de détruire le Liban, quelle que soit la partie qui clamera victoire de cette énième confrontation inutile.
C'est dans ce contexte de tension que le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, a provoqué l'ire des caciques du Hezbollah en s'inquiétant, après sa dernière rencontre avec Saad Hariri à Paris, d'une possible fuite en avant de l'Iran sur le dossier du nucléaire, en utilisant ses protégés du parti de Dieu comme détonateur d'un large conflit armé dans la région.
Les dirigeants hezbollahis, à l'unisson, sont tombés à bras raccourcis sur le ministre français, l'affublant de tous les adjectifs et lui prêtant toutes les mauvaises intentions d'un Occident entièrement acquis à la cause d'Israël.
Mais les Libanais ne sont pas dupes des cris d'orfraie poussés par les détracteurs de Bernard Kouchner. Les observateurs d'entre eux n'ont pas encore oublié la période qui a précédé la guerre de 2006 : à l'époque, et des révélations publiées depuis en attestent, malgré les multiples mises en garde diplomatiques, à l'instar de celles d'aujourd'hui, et malgré les missi dominici envoyés en secret à Hassan Nasrallah pour le convaincre de ne pas entreprendre de menées hasardeuses contre Israël qui n'attendait que ça, le conflit n'a pu être évité ; en dépit également de l'exemple de Gaza où l'État hébreu avait annoncé la couleur en y semant mort et destruction après le rapt du soldat Shalit.
Ils n'ont pas oublié que c'est bien le Hezbollah, armé par l'Iran et bras armé de l'Iran à la frontière libanaise avec Israël, qui avait lancé son opération armée, quelques jours après l'échec des négociations sur le nucléaire avec les Occidentaux et l'annulation d'une réunion à Paris entre les 5+1 et les représentants de la République des ayatollahs. À cette époque, les combattants du Hezb avaient dû s'y reprendre à deux fois (une première opération ayant échoué et coûté au parti trois morts) avant de pouvoir kidnapper à travers la ligne bleue deux soldats israéliens et en tuer huit autres, donnant ainsi le coup d'envoi de l'offensive israélienne.
La situation maintenant est presque à l'identique de celle d'avant juillet 2006 et les mêmes causes risquent de produire les mêmes effets. Car les deux protagonistes, Israël et l'Iran à travers le Hezbollah, sourds aux mises en garde, fourbissent leurs armes tandis que Téhéran durcit sa position sur le nucléaire, tentée de nouveau par la fuite en avant pour essayer, une fois de plus, de se ménager de meilleures positions en changeant la donne régionale par le biais d'une confrontation régionale généralisée.
Entre-temps, il se trouve encore des politiciens, comme le général Aoun, qui estiment qu'il est superflu de discuter de la question des armes, celles de la Résistance et des Palestiniens, puisque, dit-il avec un aplomb pareil à celui des débutants en stratégie politique, il y a un consensus national sur ce dossier, oubliant un peu vite que le pays est profondément divisé sur la question, notamment au sein même de ses légions partisanes à Baabda, au Metn-Nord, au Kesrouan et à Jbeil. On peut en effet dire, sans risque de se tromper, que les habitants de ces régions ne sont guère sensibles au culte du martyre, surtout au service d'agendas extérieurs, régionaux et internationaux. Ils n'accepteront pas non plus que le chef du CPL avalise ce droit de vie ou de mort que le hezb, à travers son arsenal, pratique à l'égard de ses concitoyens en décidant de la guerre plus que de la paix d'ailleurs, en lieu et place de l'État.
Si le général veut vraiment respecter la volonté des Libanais, élargir sa base populaire et assouvir en même temps son tempérament martial, il devrait, par exemple, se poser en allié actif de notre ministre de la Santé, Mohammad Jawad Khalifé, dans sa guerre contre les mafias des médicaments, les malades risquant à tout moment une mort brutale en prenant des produits frelatés et contrefaits qui sont supposés les guérir.
Le général devrait également partir en guerre, utile celle-là, contre ceux qui pratiquent la fraude à l'électricité, désormais du ressort de son gendre, Gebran Bassil, qui, lui, a tout intérêt à bien se dépenser à son poste électrique et se faire pardonner ainsi de nous avoir légué un réseau cellulaire pourri et en lambeaux, à son départ des Télécommunications.
Idem pour les nominations, la circulation et les finances notamment, où M. Aoun ainsi que toute la classe politique devraient militer ardemment pour faire table rase du passé, nettoyer les écuries d'Augias et choisir le fonctionnaire compétent au poste qu'il mérite. Itou dans les autres ministères qui sont toujours dotés d'une administration sclérosée qui pratique allégrement toutes sortes de gabegies.
Oui, donc, à de telles guerres salutaires pour lesquelles le général et chaque responsable politique ou administratif digne de ce nom doivent partir en croisade, et non pas militer pour mener les guerres des autres sur notre propre territoire et verser le sang des Libanais pour des convictions, des principes et aussi des croyances qui ne sont pas les nôtres.
Ce n'est certainement pas ainsi que l'on bâtit un pays !
À quelques mois du quatrième anniversaire de la victoire divine dont le bilan s'est élevé à 1 500 morts libanais, des dizaines de milliers de maisons rasées et des milliards de dollars en destructions, le roulement des tambours de la guerre se fait de nouveau entendre et les mises en garde pleuvent de Washington, Paris, Ankara et d'autres capitales...

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