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Liban - Conférence

Disparition des abeilles : des proportions effrayantes au Liban et dans le monde

Le brusque déclin des abeilles dans le monde et son lien avec la biodiversité, qui se trouve en péril sans ces énergiques pollinisateurs, a fait l'objet d'une conférence qui a eu lieu hier à Beyrouth avec des intervenants libanais et européens.

Les apiculteurs font face à des difficultés en raison des pertes considérables d’abeilles ces dernières années.

Les proportions de mort d'abeilles et de pertes de colonies sont impressionnantes de par le monde : de 20 à 30 % ces dernières années en France, près de 30 % en Espagne, des pertes aussi importantes en Italie et au Maghreb... Au Liban, on estime à 30 % la proportion des morts d'abeilles, et à près de 70 % la perte de la productivité cette année, ainsi que l'indique à L'Orient-Le Jour Dany Obeid, professeur à l'Université libanaise (UL) et membre du comité de l'apiculture au sein du ministère de l'Agriculture, un outil consultatif.
Ces chiffres sur la tragédie mondiale des abeilles et bien d'autres ont été donnés hier lors d'une conférence organisée à l'ordre des ingénieurs par le programme Art Gold du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), le ministère de l'Agriculture, le Forum sur l'apiculture méditerranéenne (MBF) et le Conseil pour le développement et la reconstruction (CDR). Les fonds pour le forum ont été assurés par l'ambassade d'Espagne. Le ministre de l'Agriculture, Hussein Hajj Hassan, était présent, ainsi que le directeur du PNUD au Liban, Seifeddine Abaro, le président de MBF Vincenzo Panettieri, et un représentant de l'ambassadeur d'Espagne, le premier secrétaire Rafael Reig.
Pourquoi les abeilles meurent-elles ? Le changement climatique et l'activité de l'homme, notamment agricole, ont été désignés comme étant les principaux coupables. Le ministre Hajj Hassan, évoquant le cas du Liban, a évoqué les températures anormalement élevées cette année, même sur les hauteurs. « Il y a également l'usage incontrôlé et chaotique des pesticides, a-t-il dit. Je poursuis ma réforme dans ce domaine, malgré les pressions exercées sur moi. Il y a des réalités ahurissantes que j'ai appris des agriculteurs eux-mêmes : imaginez que certains cultivateurs d'agrumes vaporisaient jusqu'à 18 produits pesticides sur leurs arbres ! Comment voulez-vous que les abeilles survivent à cela ? Ces produits tuent les insectes utiles autant que les nuisibles. »
Le ministre a reconnu qu'il y avait des lacunes au niveau de l'orientation apportée aux agriculteurs, mais que celles-ci ont été largement comblées par la nomination de directeurs aux 28 centres du ministère sur tout le territoire.
La situation est similaire à travers le monde. À titre d'exemple, José Perejon, du Centre apicole d'Andalousie, a évoqué des recherches qui ont montré la responsabilité d'une bactérie appelée Nosema, qui attaque l'abeille et provoque l'apparition d'une tumeur, ainsi que les taux anormalement élevés de pesticides employés dans les champs. De même, Naïma Barbouche, de l'Institut national d'agronomie de Tunisie, a insisté sur la responsabilité de l'homme dans la mort des abeilles, soit par l'urbanisation et la perte des habitats, soit par les traitements chimiques.

Gardiennes de la biodiversité
Pourquoi la mort des abeilles fait-elle si peur ? « Les abeilles sont les principaux pollinisateurs dans la nature, elles assurent la continuité de la vie », résume Vincenze Panettieri dès le début de la conférence. Leur importance dans la préservation de la biodiversité et dans la perennité de la chaîne alimentaire n'est donc plus à démontrer.
Là aussi, les chiffres présentés par les experts étaient éloquents : les abeilles sont responsables de non moins de 75 % de la pollinisation croisée des plantes, a affirmé Dany Obeid. Naïma Barbouche a indiqué qu'un tiers en moyenne de la production alimentaire d'une nation dépend de la pollinisation d'insectes, notamment les abeilles.
Claudio Porrini, de l'Université de Bologne, a décrit la complexité de la biodiversité et l'interdépendance entre les plantes et les abeilles, les premières déployant des trésors de séduction acquis au cours de siècles de coévolution pour attirer cet insecte vecteur si essentiel. Il a souligné l'importance de préserver un environnement propice à l'évolution des abeilles, citant une étude selon laquelle il ne faudrait pas consacrer plus des trois quarts d'une surface à l'agriculture, gardant le dernier quart protégé, pour le bien des cultures autant que des insectes.
L'idée de la protection de la biodiversité en vue d'augmenter la vitalité des abeilles a été développée par Pascal Jourdain, de l'Institut de l'abeille en France. Il a cité deux projets envisagés par l'organisme à cette fin, consistant à réaliser des aménagements floristiques à proximité des exploitations, et à gérer des systèmes de cultures plus respectueux de la biodiversité et de la faune pollinisatrice.

Plus de 4 000 apiculteurs
Pour sauver les abeilles, encore faut-il épauler l'apiculteur. Que fait-on à ce niveau au Liban, qui compte 4 100 apiculteurs et quelque 167 000 colonies selon les dernières statistiques du PNUD, citées par le ministre ? D'emblée, Seifeddine Abaro a noté l'aspect positif des réunions entre le ministre et des responsables du PNUD et d'autres parties concernées par l'apiculture, rendant hommage à « la décision de donner à ce secteur l'importance qui lui revient ». Il a affirmé que le PNUD, par le biais d'Art Gold, contribue à organiser le secteur, améliorer la qualité du miel et aider au marketing et à l'exportation.
La qualité et l'aide à l'exportation ont également été évoquées par le ministre Hajj Hassan. « Nous cherchons à apporter un plus au miel libanais, que ce soit au niveau de la qualité, du packaging ou de l'exportation », a-t-il dit, assurant que le ministère s'engage à offrir aux apiculteurs des tests gratuits de leur produit.
Quel est l'avenir de ce secteur ? S'exprimant à L'Orient-Le Jour, Dany Obeid estime que « la mort des abeilles dans de grandes proportions est réversible ». Il a affirmé que la biodiversité végétale du Liban est un atout majeur et souligné que la qualité doit être une priorité. « L'un des grands problèmes du secteur, c'est que tout le monde y est attiré, ajoute-t-il. Chacun a le droit d'entretenir une dizaine de colonies, c'est toujours utile pour la bonne santé des exploitations agricoles. Mais ce n'est pas nécessairement utile pour le secteur, qu'il faut songer actuellement à professionnaliser, en encourageant les grands apiculteurs. »
Les proportions de mort d'abeilles et de pertes de colonies sont impressionnantes de par le monde : de 20 à 30 % ces dernières années en France, près de 30 % en Espagne, des pertes aussi importantes en Italie et au Maghreb... Au Liban, on estime à 30 % la proportion des morts d'abeilles, et à près de 70 % la perte de la...

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