Confrontation entre deux mondes à travers une Occidentale et un chauffeur bien de chez nous. (Photo Wassim Daou)
Pour cette course chaotique dans une ville qui connaît les embouteillages monstrueux de Beyrouth, ses grues et marteaux piqueurs assourdissants, ses pères aux rêves brisés, ses femmes voilées au cœur déchiré parce qu'un enfant est mort, ses collants revendeurs au babil cousu de fil blanc, un chauffeur (mais aussi parfaitement chauffard, comme il se doit, et personne ne nous apprend rien de neuf ! ), à la fois guide et protecteur, pour une traversée des zones d'ombre des autres et de soi-même.
Hélène et Nabil, deux personnages venus de monde différents, se croisent pour mieux se connaître. Expérience de l'altérité à travers un voyage, des mots et des rencontres.
Elle, occidentale bétonnée dans ses certitudes, son confort et ses petites histoires de cœur, lui, bataillant durement pour son pain et sa vie dans un environnement précaire, dévasté, hostile.
La perte d'un collier insignifiant est-elle aussi importante, douloureuse et grave que celle d'un enfant, d'une maison, d'un pays ? Une oligarchie touchant des émoluments mirobolants a-t-elle le droit de chapitrer des contribuables condamnés aux salaires de misère à se serrer encore davantage la ceinture? L'emprisonnement, vol d'un pan de vie, pèse-t-il plus lourd que l'horreur des assassinats en masse et en toute impunité d'éminentes personnalités
politiques ?
Cela remet en question l'échelle des valeurs éthiques et morales, ainsi que les vieilles interrogations fondamentales entre un malheur vrai et celui qu'on surmonte, réparable ou dérisoire. La relativité pour une nomenclature de ce qui mérite vraiment l'acharnement, le deuil et la réflexion.
Présenté par l'ambassade de Grèce et interprété par le théâtre-train « To treno sto rou », dans une mise en scène dépouillée, sans originalité ni relief, par Tatiana Ligari qui assume, sans jamais décoller, d'une voix monocorde, récitative et plaintive son personnage obsédé par une bricole perdue et aveugle devant l'immensité de la douleur des autres, Le collier d'Hélène de Carole Fréchette reste toutefois une invitation - vaguement poétique - pour témoigner de ce qui ne va pas dans le monde.
Et que cela soit en Grèce, au Liban, au Moyen-Orient ou ailleurs, la solidarité humaine devrait être plus grande pour une société moins brimée, moins parcellaire, moins malmenée, moins injuste. Une société plus épanouie, plus équitable, plus unie, plus stable, davantage en paix avec elle-même et heureuse de vivre.
Pour mieux goûter, incidemment, le théâtre, certes reflet du quotidien, mais aussi espace de rêve, de réflexion, de dépassement et de sublimation.