Un enfant qui confectionne un cendrier en poterie.
Le vieux souk date de l'ère ottomane et a été restauré deux fois : en 1988 et en 1995. Il est devenu la principale attraction de la ville, surtout grâce à son festival qui se produit depuis dix années consécutives. Il est devenu un lieu de rencontre sans précédent pour tous les artisans libanais qui veulent promouvoir et faire renaître un savoir-faire précieux, un art en phase de déclin au profit des nouvelles technologies.
À l'entrée du souk, les visiteurs découvrent un grand navire qui les interpelle. Est-il fabriqué avec du bois ? Du plastique ? Ils découvrent, étonnés, que ce grand navire qui mesure 3 m de long, 180 cm de haut et 60 cm de large est réalisé avec de minuscules allumettes. Son auteur ? Un miraculé de la vie, sur son fauteuil roulant, fier de son exploit : Toufic Daher. Le navire n'est pas son seul exploit. La fameuse tour Eiffel, construite avec des millions d'allumettes, a mérité une entrée triomphale dans le livre des records en 2009. C'est sa victoire sur le passé.
La balade dans le vieux souk ne fait que commencer. Des chansons de Fairouz, devenues mythiques, résonnent dans chaque recoin du souk. Elles accompagnent les visiteurs dans leur découverte.
Dans un décor de mille et une nuits, les kiosques, les boutiques et les stands s'encombrent. Des antiquités, des produits naturels, des tenues de danse, des savons parfumés, des accessoires de tout genre pour satisfaire tous les goûts. Dans les ruelles pavées du vieux souk, des visiteurs de tout âge, de toute confession se croisent. « Mes parents et moi sommes des habitués du Liban, du vieux souk. On admire l'art artisanal libanais », explique une jeune fille saoudienne.
En retrait, une fresque repose en paix. Son nom captive les regards. « Hommage à nos grands, phare de notre futur ». Les visages de Fairouz, de Wadih Safi et d'autres grandes personnalités libanaises ornent le centre du tableau. Cette œuvre, sculptée avec beaucoup de virtuosité, a été réalisée le 9 juillet 1998 par Pierre Karam.
Plus loin encore, une religieuse souriante originaire de Zouk s'approche. Elle veut absolument nous faire connaître sa ville. Son nom, sœur Samira Kobaïter, des sœurs de la Croix. Elle nous fait savoir que Zouk Mikaël est principalement connue pour son délicieux « marsabane » (mélange de pâtes d'amande et de sucre), mais également pour sa technique unique du verre soufflé. « De l'autre côté du souk, le maître Nouhad Naufal, maire de la ville depuis 46 ans, a décidé d'aménager le parking de la municipalité pour pouvoir accueillir davantage de stands, précise sœur Samira. Une surprise attend les enfants », poursuit-elle.
On se presse pour rejoindre l'autre côté du souk. Un homme habillé en « cherwal » et en « tarboush », costume traditionnel libanais, surprend les visiteurs. À côté de lui, se rassemblent des dizaines d'enfants aux regards passionnés et attentifs. Ils attendent patiemment leur tour. Ils souhaitent tous mélanger leurs petites mains à la terre, manier la poterie avec leurs doigts pour confectionner un cendrier et l'offrir aux parents qui regardent leurs enfants avec admiration.
Tout près, une salle climatisée. C'est le foyer de l'artisan, « Al bayt al-hourafi ». Un lointain bourdonnement d'abeilles brise le silence de la salle. « On vient de la ville des Cèdres. Le miel fabriqué par ces abeilles est pur et sucré. Il est excellent », affirme le propriétaire des abeilles. De part et d'autre de la salle, des artisans libanais exposent leurs arts et expliquent aux visiteurs, envoûtés par l'odeur des savons parfumés, quelques secrets de fabrication.
Pour les plus gourmands, il n'y a aucun souci à se faire. L'odeur des « manakishs » s'accapare de vos narines. Elle ne vous laisse pas indifférent. À cette fin, des tables ont été prévues au centre du parking pouvant accueillir des centaines de personnes. « Ma famille et moi avons été contraints de quitter nos maisons dans le sud du Liban suite à la guerre de 2006. Depuis, on a décidé d'habiter dans le Zouk et nous participons ainsi chaque année au festival », nous explique une charmante dame qui vend des « manakishs ».
En sortant du foyer de l'artisan, un enfant d'une dizaine d'années, assis derrière son stand, attire notre attention. « J'ai dix ans, je suis là pour vendre les statues en bois que mon grand-père a fabriquées », affirme l'enfant d'un air joyeux.
Tous ces exemples sont l'ultime preuve que ces événements demeurent inévitablement la meilleure façon pour redonner une seconde vie à un héritage précieux certes, mais en voie de disparition, et faire revivre des traditions indispensables à l'histoire et à l'identité de notre société. Cependant, cette atmosphère festive de l'été pourrait-elle faire oublier l'incroyable quantité d'air pollué, libéré quotidiennement par la centrale électrique, et inhalé par les habitants de la ville de Zouk ?